Vie de Franklin, écrite par lui-même - Tome I
encore au-dessous de ce qu'il falloit pour les premiers frais de l'établissement. Franklin fit une nouvelle tentative. Il s'adressa à l'assemblée ; et après quelqu'opposition, il obtint la permission de présenter un bill, qui disoit qu'aussitôt que les souscriptions pour l'établissement de l'hôpital, s'élèveroient à deux mille livres sterling, le trésor public fourniroit une pareille somme. Comme cette somme étoit promise à des conditions, qu'on espéroit ne voir jamais remplir, les opposans gardèrent le silence et le bill passa. Mais les soutiens du projet redoublèrent d'efforts, pour obtenir les souscriptions nécessaires, et ils ne tardèrent pas à y réussir. Ce fut-là l'origine de l'hôpital de Philadelphie ; institution qui, avec le Mont-de-Piété et la maison où l'on distribue des remèdes, est une preuve de l'humanité des habitans de cette ville.
Franklin avoit rempli avec tant d'intelligence l'emploi de directeur des postes de Philadelphie, et il connoissoit si bien ce département, qu'on jugea nécessaire de l'élever à une place plus distinguée.
En 1753, il fut nommé sous-directeur-général des postes des colonies britanniques. Les profits de la poste aux lettres n'étoient pas une petite partie des revenus que le gouvernement anglais retiroit de ses colonies. On prétend que tandis que Franklin en fut chargé, les postes de l'Amérique septentrionale produisirent annuellement trois fois autant que celles d'Irlande.
Les frontières des colonies d'Amérique étoient très-exposées aux incursions des Indiens, sur-tout lorsque la guerre avoit lieu entre la France et l'Angleterre. Ces colonies étoient individuellement trop foibles, pour que chacune pût prendre des mesures efficaces pour sa propre défense, ou elles avoient trop peu de bonne volonté pour se charger, en particulier, de construire des forts, d'entretenir des garnisons, tandis que celle qui auroit fait ces entreprises, auroit vu ses voisins partager le fruit de ses peines, sans avoir contribué à les faire naître. Quelquefois aussi les querelles, qui subsistoient entre les gouverneurs et les assemblées, empêchoient qu'on adoptât des moyens de défense, comme nous avons déjà rapporté que cela avoit eu lieu en Pensylvanie, en 1745.
Cependant il étoit à désirer que les colonies formassent un plan d'union, et pour leur défense commune, et pour leurs autres intérêts. Elles en sentirent la nécessité ; et en conséquence, des commissaires des provinces de New-Hampshire, de Massachusett, de Rhode-Island, de New-Jersey, de Pensylvanie et de Maryland, se réunirent, en 1754, à Albany. Franklin s'y rendit, en qualité de commissaire de la Pensylvanie, et il y présenta un plan, qui, d'après le lieu où se tenoit l'assemblée, a été communément appelé le Plan d'Union d'Albany.
Il proposoit dans ce plan, de demander au parlement d'Angleterre, un acte d'après lequel on établiroit un gouvernement-général, composé d'un président, nommé par le roi, d'un grand-conseil, dont les membres seroient élus par les représentans des différentes colonies.
Il vouloit, en même-temps, que le nombre de ces représentans fût proportionné aux sommes que chaque colonie verseroit dans le trésor public, avec cette restriction, qu'aucune ne pourroit en avoir ni plus de sept, ni moins de deux.
Toute l'autorité exécutive devoit être déléguée au président-général, et l'autorité législative devoit résider dans le grand-conseil et le président réunis ; le consentement de ce dernier étant nécessaire pour qu'un bill fût converti en loi. Le président et le conseil devoient avoir le pouvoir de faire la guerre et la paix, de conclure des traités avec les nations indiennes, de régler le commerce avec elles, et d'en acheter des terres, soit au nom de la couronne d'Angleterre, soit au nom de l'union coloniale ; d'établir de nouvelles colonies, de faire des loix, pour les gouverner, jusqu'à ce qu'elles fussent érigées en gouvernemens séparés ; de lever des troupes, de construire des forteresses, d'équiper des vaisseaux, et d'employer tous les autres moyens propres à la défense générale. En conséquence, ils auroient pu aussi établir les impôts, ou mettre les taxes qu'il auroient cru nécessaires, et les moins onéreuses au peuple.
Toutes ces loix devoient être envoyées en Angleterre, pour obtenir la sanction du roi ; et à moins qu'elles ne fussent improuvées avant trois ans, elles devoient
Weitere Kostenlose Bücher