Vies des douze Césars
connaître plusieurs membres de cette famille, afin que l’on puisse mieux juger que si, d’un côté, Néron dégénéra des vertus des siens, de l’autre, il reproduisit les vices de chacun de ses ancêtres, comme s’ils lui eussent été transmis avec le sang.
II. Les ancêtres de Néron
(1) Ainsi, en remontant un peu plus haut, nous dirons que son trisaïeul Cn. Domitius, pendant son tribunat, irrité de ce que les pontifes, au lieu de l’élire à la place de son père, s’étaient adjoint un autre candidat, fit enlever aux divers collèges et passer au peuple le droit de nommer les prêtres. Après avoir, dans son consulat, vaincu les Allobroges et les Arvernes, il traversa sa province, monté sur un éléphant et suivi d’une foule de soldats, comme dans la solennité du triomphe. (2) C’est de lui que l’orateur Licinius Crassus disait qu’il n’était pas étonnant qu’il eût une barbe de cuivre, puisqu’il avait une bouche de fer et un cœur de plomb. (3) Son fils, étant préteur, appela C. César devant le sénat, et le somma de rendre compte de son consulat qu’il avait géré, disait-on, contre les auspices et les lois. Consul lui-même, il essaya de l’enlever à son armée de la Gaule ; et, nommé pour lui succéder par la faction de Pompée, il fut pris dans Corfinium au commencement de la guerre civile. (4) Remis en liberté, il releva par son arrivée le courage des Marseillais qui soutenaient un siège pénible ; mais il les abandonna tout à coup et périt enfin à la bataille de Pharsale. Il avait trop peu de fermeté dans le caractère et trop de dureté. Dans un moment où les affaires étaient désespérées, la crainte lui fit souhaiter la mort. Mais il en eut une frayeur si soudaine, qu’il rendit le poison qu’il avait avalé, et qu’il affranchit son médecin qui, prévoyant son retour, avait atténué les effets de la potion fatale. (5) C’est lui qui, lorsque Cn. Pompée délibérait sur ce qu’il fallait faire de ceux qui resteraient neutres, soutint seul qu’on devait les traiter en ennemis.
III. Les ancêtres de Néron
(1) Il laissa un fils qui fut, sans contredit, le meilleur de tous les Domitii. (2) Enveloppé, quoique innocent, dans la loi Pédia contre les complices de la mort de César, il se retira auprès de Cassius et de Brutus dont il était le proche parent. Après leur mort, il sut conserver et même augmenter la flotte qu’ils lui avaient jadis confiée, et ne la remit à Marc-Antoine qu’après la défaite entière de son parti, et par un accommodement volontaire qui fut considéré comme un très grand service. (3) Aussi de tous ceux qui avaient été condamnés pour la même cause, il fut seul rétabli dans sa patrie, où il obtint les plus éclatantes dignités. La guerre civile s’étant rallumée, il fut lieutenant d’Antoine, et ceux qui rougissaient d’obéir à Cléopâtre lui offrirent le commandement. Mais n’osant ni l’accepter ni le refuser à cause de l’affaiblissement subit de sa santé, il passa du côté d’Auguste et mourut quelques jours après, sans avoir pu se garantir de tout reproche ; (4) car Antoine prétendit qu’il ne l’avait abandonné que pour revoir sa maîtresse Servilia Naïs.
IV. Les ancêtres de Néron
(1) Son fils Domitius fut l’exécuteur testamentaire d’Auguste, aussi connu dans sa jeunesse par son habileté à conduire un char, qu’illustré dans la suite par les ornements du triomphe qui lui furent décernés après la guerre de Germanie. (2) Fier, prodigue et cruel, dans son édilité, il força le censeur Lucius Plancus à se ranger sur son passage. Dans son consulat et dans sa préture, il fit paraître sur la scène des chevaliers romains et des matrones pour représenter des mimes. (3) Il donna au cirque et dans tous les quartiers de la ville des combats de bêtes. Il y joignit aussi un spectacle de gladiateurs. Mais il y apporta tant de barbarie qu’Auguste, qui lui en avait déjà fait secrètement d’inutiles reproches, jugea nécessaire de l’en blâmer par un édit.
V. Les ancêtres de Néron
(1) Antonia, l’aînée, lui donna un fils qui fut père de Néron, et dont la vie fut en tout point abominable. Ce fils qui avait accompagné en Orient le jeune Caius César, tua son affranchi parce qu’il avait refusé de boire autant qu’il l’ordonnait. Renvoyé pour ce meurtre de la cour du prince, il ne se conduisit pas avec plus de réserve. Il écrasa
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