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Vies des douze Césars

Vies des douze Césars

Titel: Vies des douze Césars Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suetone
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les commencements de son règne, il jouait tous les jours sur une table avec des quadriges d’ivoire, et s’échappait de sa retraite au moindre bruit d’un exercice dans le cirque, d’abord en secret, ensuite ouvertement, de manière à ne laisser ignorer à personne qu’il y assisterait au jour fixé. (3) Il ne dissimula point l’intention qu’il avait d’augmenter le nombre des prix. Aussi le spectacle se prolongeait-il jusqu’au soir, parce que les récompenses se multipliaient au point que les chefs des factions ne consentaient à amener leurs bandes que pour la journée entière. (4) Bientôt Néron voulut conduire lui-même les chars, et se donner souvent en spectacle. Après avoir fait son apprentissage dans ses jardins devant ses esclaves et le bas-peuple, il se montra publiquement dans le grand cirque. Ce fut un de ses affranchis qui donna le signal du même lieu d’où les magistrats le donnent ordinairement. (5) Non content d’avoir essayé ses divers talents à Rome, il alla, comme nous l’avons dit, en Grèce, (6) uniquement parce que les villes où étaient établis des concours de musique avaient coutume de lui envoyer les couronnes de tous les concurrents. (7) Il les acceptait avec tant de reconnaissance que les députés qui les lui apportaient étaient reçus les premiers et admis à ses repas intimes. (8) Quelques-uns d’entre eux l’ayant prié de chanter après souper, il fut comblé d’éloges. Il dit alors qu’il n’y avait que les Grecs qui sussent écouter, et qui fussent dignes d’apprécier ses talents. (9) Il partit sans délai, et, à peine débarqué à Cassiope, il se mit à chanter devant l’autel de Jupiter Cassius. Il parut désormais dans tous les genres d’exercices.
     
XXIII. Il dispute aux artistes tous les prix. Mesures d’ordre prescrites quand il chantait. Ruses employées pour sortir du théâtre. Sa jalousie contre ses rivaux. Sa crainte des juges
    (1) Il réunit dans une seule année les spectacles qui appartenaient aux époques les plus éloignées. Quelques-uns même furent recommencés. Il fit, contre l’usage, ouvrir à Olympie un concours de musique. (2) Pour n’être pas dérangé ou détourné de ces occupations, il répondit à son affranchi Helius, qui lui écrivait que les affaires de Rome exigeaient sa présence : « Quoique tu paraisses désirer et être d’avis que je revienne promptement, tu dois plutôt me conseiller et souhaiter que je revienne digne de moi-même. » (3) Lorsqu’il chantait, il n’était pas permis de sortir du théâtre, pas même pour une raison indispensable. Aussi quelques femmes accouchèrent, dit-on, au spectacle, et beaucoup de personnes, lasses d’écouter et d’applaudir, sautèrent à la dérobée par-dessus les murs des villes dont il avait fait fermer les portes, ou feignirent d’être mortes pour qu’on les enlevât sous prétexte de les enterrer. (4) On ne saurait croire avec quelle crainte, quelle inquiétude, quelle jalousie et quelle défiance des juges il entrait dans la lice. (5) Il observait ses adversaires, les épiait, les décriait secrètement, comme s’ils eussent été ses égaux ; quelquefois il les attaquait par des propos injurieux lorsqu’il les rencontrait, et corrompait ceux qui l’emportaient sur lui par leur talent. (6) Avant de commencer, il adressait aux juges une respectueuse allocution, disant qu’il avait fait tout ce qu’il pouvait faire, mais que le succès dépendait de la fortune ; qu’en hommes doctes et sages, ils devaient exclure tout ce qui tient du hasard. Quand les juges l’encourageaient, il se retirait plus tranquille, mais non sans inquiétude, attribuant à la malignité et à la mauvaise humeur le silence et la réserve de quelques-uns d’entre eux, et disant qu’ils lui étaient suspects.
     
XXIV. Sa soumission aux lois du concours. Il fait abattre les statues de tous les vainqueurs. Il conduit un char aux jeux olympiques, et il est couronné, malgré une chute qui l’empêche de terminer la course
    (1) Il obéissait si strictement aux lois du concours, que jamais il ne se permit de cracher, et qu’il essuyait avec son bras la sueur de son front. À une représentation tragique, ayant laissé échapper son sceptre, il se hâta de le relever, tout tremblant, parce qu’il craignait que cette contravention ne l’écartât du concours. Il fallut, pour le rassurer, que son pantomime lui jurât que ce mouvement n’avait point été aperçu

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