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Vies des douze Césars

Vies des douze Césars

Titel: Vies des douze Césars Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suetone
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au milieu de la joie et des acclamations du peuple. (2) Il se proclamait vainqueur lui-même. Aussi concourait-il pour l’emploi de héraut. (3) Jaloux d’effacer tout souvenir et tout vestige des anciens vainqueurs, il fit renverser et traîner avec un croc dans les égouts, leurs statues et leurs images. (4) Souvent aussi il conduisit des chars. Aux jeux olympiques, il en guidait un attelé de dix chevaux, quoique, dans une de ses pièces de vers, il eût blâmé le roi Mithridate de l’avoir fait. Il fut renversé de son char ; on l’y replaça ; mais il ne put s’y tenir jusqu’à la fin de la course. Il n’en fut pas moins couronné. (5) En partant, il accorda la liberté à toute la province et le droit de cité aux juges, ainsi qu’une forte somme d’argent. Lui-même, au milieu du stade, le jour des jeux isthmiques, il annonça à haute voix ces récompenses.
     
XXV. Son entrée triomphale dans différentes villes et à Rome. Ses précautions pour conserver sa voix
    (1) Revenu de la Grèce à Naples, où il avait débuté dans l’art théâtral, il y entra sur un char traîné par des chevaux blancs, à travers une brèche pratiquée dans la muraille, selon l’usage des vainqueurs aux jeux sacrés. Il fit la même entrée à Antium, dans sa maison d’Albe et dans Rome. Mais, à Rome, il était sur le char qui avait servi au triomphe d’Auguste, revêtu d’un manteau de pourpre et d’une chlamyde parsemée d’étoiles d’or, la couronne olympique sur la tête, et la couronne pythique à la main droite, tandis que les autres couronnes étaient portées en pompe devant lui, avec des inscriptions qui indiquaient le lieu de sa victoire, le nom des vaincus, les chants et les pièces où il avait triomphé. Le char était suivi de gens qui applaudissaient comme à une ovation ; ils criaient qu’ils étaient les compagnons de l’empereur et les soldats de son triomphe. (2) On démolit ensuite une arcade du grand cirque, et Néron traversa le Vélabre et le Forum pour se rendre au temple d’Apollon Palatin. (3) On immolait des victimes sur son passage ; on y répandait du safran, on y jetait des oiseaux, des rubans et des friandises. (4) Il suspendit ses couronnes sacrées dans ses appartements, au-dessus des lits. Il y plaça aussi ses statues en habit de joueur de luth, et fit frapper une médaille où il figurait de la même manière. (5) Dans la suite, loin de se refroidir et de renoncer à ses goûts, pour conserver sa voix il ne faisait de proclamation à ses soldats que lorsqu’il était absent, ou se servait, pour leur parler, de l’intermédiaire d’un autre. Dans les affaires plaisantes ou sérieuses, il avait toujours auprès de lui son maître de chant qui l’avertissait de ménager ses poumons, et de mettre un linge devant sa bouche. Souvent il réglait son amitié ou sa haine sur la dose plus ou moins forte de louange qu’on accordait à son talent.
     
XXVI. Ses débauches nocturnes. Ses amusements. Sa conduite au théâtre
    (1) Le désordre, la débauche, la profusion, l’avarice et la cruauté ne parurent être d’abord de sa part que des erreurs de jeunesse auxquelles il ne se livra qu’en secret et par degrés ; mais, quoi qu’il fit, personne ne douta que ces vices n’appartinssent à son caractère plutôt qu’à son âge. (2) À l’entrée de la nuit, il se coiffait d’un bonnet ou d’un chapeau, fréquentait les tavernes, parcourait en folâtrant tous les quartiers de la ville et y faisait beaucoup de dégâts. En effet, il chargeait d’ordinaire les gens qui revenaient de souper, les blessait quand ils faisaient résistance, et les précipitait dans les égouts. Il brisait même et pillait les échoppes, et dans une cantine établie chez lui, il vendait le butin à l’encan pour en dissiper le produit. (3) Dans ces sortes de querelles, il risqua souvent de perdre les yeux ou la vie. Un sénateur, dont il avait insulté la femme, pensa le faire expirer sous ses coups. Aussi désormais ne se hasarda-t-il plus en public à la même heure, sans être suivi de loin et en secret par des tribuns. (5) Le jour même, on le portait furtivement au théâtre dans une litière, et, du haut de l’avant-scène, il regardait et encourageait les émeutes excitées par les pantomimes. Lorsqu’on en était venu aux mains et qu’on se battait à coups de pierres et de bancs cassés, il en jetait aussi beaucoup sur le peuple, et blessa même une fois un préteur à la

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