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1914 - Une guerre par accident

1914 - Une guerre par accident

Titel: 1914 - Une guerre par accident Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Georges Ayache
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le chancelier y laissait éclater sa colère : « Nous devons
refuser de nous laisser entraîner par Vienne à la légère et sans que nos
conseils soient écoutés, dans une conflagration générale [215] . »
    C’était un peu tard. Eût-elle été expédiée quatre jours plus
tôt, une telle dépêche aurait peut-être pu arranger les choses. Mais à présent,
le scrupule de Bethmann était devenu dérisoire. Bernhard von Bülow avait
cruellement raison. La diplomatie ça ne s’apprend pas, « même en s’y
mettant »…
    À Berlin, la caste militaire était en train de prendre les
choses en main. Le chancelier en avait-il été seulement informé ? Le chef
d’état-major von Moltke venait juste de faire « conseiller
vivement » à son collègue autrichien Conrad von Hötzendorf de
mobiliser toute l’armée.
    La veille, sur le coup de 22 h 30,
Bethmann-Hollweg avait fait convoquer l’ambassadeur britannique Goschen. À ce
dernier, il devait une réponse. Celle de Berlin à la solution de dernière
minute proposée par l’Angleterre à la suite du rejet de sa formule initiale de
conférence internationale. Cette solution était significativement intitulée
« Halte à Belgrade ». Elle préconisait que l’Autriche se contente
d’occuper la capitale serbe en guise de représailles, dans l’attente de
négociations globales. Vienne avait d’instinct rejeté la proposition.
L’Allemagne, elle, hésitait. La formule n’était pas sotte.
    Mais Bethmann-Hollweg souhaitait aller plus loin. Il
importait à ses yeux que lui fût donnée l’assurance de la neutralité anglaise,
gage de la limitation d’un conflit à venir. Lui aussi avait une proposition à
formuler :
    — Si l’Angleterre reste neutre, l’Allemagne peut d’ores
et déjà s’engager à ne réclamer aucune acquisition territoriale continentale à
la France. Elle respectera également la neutralité hollandaise [216] .
    Goschen écouta attentivement, à son habitude, tout en
s’abstenant de poser la moindre question. L’état de tension du chancelier
impérial, qui semblait agité de tremblements nerveux, était palpable. De toute
évidence, il n’était guère en état de dialoguer d’une manière constructive.
D’ailleurs, la déclaration de Bethmann-Hollweg était plus significative par ce
qu’elle ne disait pas que par ce qu’elle disait.
    Comme Goschen l’écrirait peu après dans sa dépêche de compte
rendu à Londres : « Il est clair que l’engagement de l’Allemagne à
l’égard de la France ne concerne pas ses possessions coloniales. De même, le
respect de la neutralité de la Hollande révèle à contrario l’intention de ne
pas respecter la neutralité de la Belgique [217] . »
    Prenant connaissance de la proposition allemande, sir Eyre
Crowe, le sous-secrétaire d’État aux Affaires étrangères, notera dans ses Carnets  :
« Le seul commentaire à faire au sujet de ces stupéfiantes propositions
est qu’elles jettent le discrédit sur l’homme d’État qui les a faites [218] . »
    Plus théâtral, Edward Grey fera état de son « sentiment
de désespoir » à la lecture de cette proposition
« déshonorante » de Bethmann-Hollweg.
    Après avoir longtemps joué avec le feu, la diplomatie
allemande était en train de perdre pied d’une manière calamiteuse. Pire encore,
cela commençait à se savoir dans les chancelleries.
Amirauté britannique, 30 juillet, 11 h 00
    Albert Ballin était accouru de Berlin trois jours plus tôt,
via Hambourg, sous prétexte d’affaires. À ce rythme, il deviendrait bientôt le
meilleur client de la Hapag, sa propre compagnie. C’était la troisième fois en
deux mois qu’il se retrouvait à Whitehall Street dans le bureau de Winston
Churchill. Et cette fois, il n’était pas missionné par le gouvernement
allemand. C’était un homme inquiet, presque aux abois, qui venait aux
nouvelles. Désespérément.
    Le Premier Lord de l’Amirauté avait le visage fermé, ce qui
ne lui ressemblait guère. On venait pourtant de le rassurer en lui annonçant la
mise en sécurité de sa flotte, en mer du Nord. Mais le rythme de travail
frénétique qu’il s’imposait, en même temps que ses collaborateurs, commençait à
produire des effets dévastateurs. Surtout, la brusque aggravation de la
situation internationale ne prêtait plus guère à l’humour.
    Ballin sortait tout droit de chez l’ambassadeur d’Allemagne.
Il partageait en gros, quoi

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