1940-De l'abîme a l'espérance
humaines ne sont que passagères. »
Rentré à Vichy, dès le lundi 22 juillet, il rend compte de ses entretiens avec Abetz :
« Pendant deux heures, écrit Baudouin, Laval nous fait un récit fumeux, détaillé et désordonné de ses négociations à Paris. Il ne paraît pas avoir négocié mais conversé en désordre avec Abetz en s’engageant très loin…
« Il a promis une collaboration très large aux Allemands sans préciser ce qu’il entendait par ce mot. »
En fait, il a confié aux Allemands que des poursuites avaient été décidées contre les responsables de la guerre : Daladier, Gamelin, Reynaud, Mandel, Blum. L’affaire serait renvoyée devant un tribunal en formation – correspondant à peu près à « notre cour de justice populaire », souligne un diplomate allemand. Les sept juges seraient nommés par le gouvernement.
Et tous les Juifs connus seront invités à quitter Vichy avec interdiction de s’installer dans l’Allier ou le Puy-de-Dôme.
Ces preuves de servilité données, cette suite de capitulations, en vue de promouvoir la collaboration, en ce mois de juillet, ne produisent aucun résultat.
Au contraire.
Le mercredi 24 juillet, des douaniers allemands sont placés sur les crêtes des Vosges, à l’ancienne frontière de 1914. L’Alsace est annexée de fait et le lundi 29 juillet l’usage de la langue allemande y est seul autorisé.
Déjà, les Alsaciens et Lorrains d’origine française ont été expulsés !
La ligne de démarcation est, le lundi 22 juillet, fermée.
Il s’agit pour les Allemands de montrer qu’ils peuvent serrer ce garrot jusqu’à l’asphyxie de l’économie des deux zones.
« Elle peut entraîner, commente le responsable allemand Hemmen, la mort de la France, si la France et l’Allemagne ne se mettent pas d’accord pour collaborer. »
Et pour bien marquer que c’est Berlin qui décide en maître, et que la France doit s’incliner, le général Streccius, commandant de l’administration militaire en France, expulse de Paris le ministre des Finances, Yves Bouthillier, qui s’était installé rue de Rivoli pour affirmer la volonté du gouvernement de Pétain de gagner la capitale.
On ne force pas la main aux nazis.
Le lundi 22 juillet, ils prennent le contrôle des banques. Le lendemain, ils décident d’exercer un droit de regard sur la justice. Les magistrats doivent soumettre certains procès aux occupants.
Vichy est nu.
En cette fin de juillet 1940, le gouvernement Pétain en plein désarroi s’interroge. Les Allemands l’étouffent. Faut-il attendre de mourir ?
« Il ne faut rien faire tant que je n’aurai pas reçu la réponse d’Abetz et que je ne l’aurai pas revu », répète Pierre Laval.
Pétain veut agir, voir Hitler afin de « trouver entre soldats et dans l’honneur » un accord que personne n’estime Laval capable d’obtenir.
Le Maréchal décide, si les Allemands venaient à Vichy, de confier à l’amiral Darlan le soin d’ordonner à la marine de guerre de gagner l’Afrique du Nord.
« Je ne veux pas de papier, dit-il à Darlan qui deviendrait son successeur. Je ne veux pas de papier, mais vous devez considérer mon ordre comme définitif. Je ne reviendrai pas sur cette décision. D’autre part, il doit bien être entendu qu’elle restera entre nous. »
Les mardi 30 et mercredi 31 juillet, les événements se précipitent.
Le 30 juillet, un croiseur de la Royal Navy débarque des troupes à Douala, au Cameroun.
Le lendemain 31, Londres assimile la France et l’Afrique du Nord au territoire du Reich et les place sous blocus, interdisant toute communication entre la métropole et les possessions d’outre-mer.
C’est asphyxier les colonies et condamner la France à la disette.
L’amiral Darlan veut faire escorter les convois par des navires de guerre, au risque de déclencher un conflit avec la Grande-Bretagne.
Les autres ministres refusent, mais Darlan l’anglophobe vaut-il mieux que Laval pour résister aux tentations et mirages de la collaboration ?
D’autant plus que des territoires français d’outre-mer se rallient au général de Gaulle. Les Nouvelles-Hébrides le lundi 22 juillet, la Côte d’Ivoire le jeudi 25.
Et pour que persiste la volonté de continuer la guerre aux côtés des Anglais, de refuser l’armistice, de Gaulle annonce que, pour la première fois, des aviateurs français des Forces françaises libres ont
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