1942-Le jour se lève
notre
continent un magnifique avenir et je voudrais passionnément qu’il se réalisât. »
Mais pour cela, il faut chasser les Juifs.
« L’esprit juif est dans la vie intellectuelle de la
France un chiendent vénéneux, qui doit être extirpé jusqu’aux plus infimes
radicelles… Des autodafés seront ordonnés au maximum d’exemplaires des
littératures, peintures, partitions juives et judaïques ayant le plus travaillé
à la décadence de notre peuple. »
Tous ces antisémites « rêvent » à La Mort du
dernier Juif.
C’est là le titre d’un récit d’anticipation publié par l’hebdomadaire Au Pilori.
L’auteur imaginait « le journal d’un Français moyen »
en l’an 2142. Un décret du 25 juin 1942 aurait ordonné que tous les Juifs
soient stérilisés à l’exception de trois couples conservés au zoo de Vincennes,
les enfants des trois couples devant être stérilisés à l’exception de l’aîné.
Le 14 juillet 2142 – deux cents ans plus tard donc –,
le « Français moyen » écrit :
« Une nouvelle merveilleuse parcourt les rues de Paris.
Le dernier Juif vient de mourir. Ainsi c’en est donc fini avec cette race abjecte
dont le dernier représentant vivait, depuis sa naissance, à l’ancien zoo de
Vincennes, dans une tanière spécialement réservée à son usage et où nos enfants
pouvaient le voir s’ébattre en un semblant de liberté, non pour le plaisir des
yeux, mais pour leur édification morale.
« Il est mort ! Dans le fond, c’est mieux ainsi. J’avais
personnellement toujours peur qu’il ne s’évade et Dieu sait tout le mal que
peut faire un Juif en liberté. Il restait seul soit, depuis la mort de sa
compagne, laquelle par bonheur était stérile, mais avec cette engeance, on ne
sait jamais, il faudra que j’aille au zoo pour m’assurer de la véracité de la
nouvelle. » Écrit par un citoyen français, à Paris, le 23 juillet
1942.
Le premier train de Juifs raflés, le 16 juillet 1942, roule
vers Auschwitz.
C’est déjà par centaines de milliers que se comptent les
Juifs massacrés, d’abord par les Einsatzgruppen – en Pologne, en Ukraine,
en Russie –, d’une rafale, puis gazés dans des camions, aménagés à cet
effet, puis entassés dans les chambres à gaz des camps de concentration. Sans
compter ceux battus à mort, à coups de matraque, de crosse, de pioche ou de
pelle, et ceux pendus.
Un Juif, Szmul Zygieboym, qui a réussi – en 1943 –
à fuir la Pologne et à rejoindre Londres, pour alerter le monde sur la
politique d’extermination de tout un peuple, s’y suicidera.
« Je veux par ma mort exprimer une dernière
protestation contre la passivité avec laquelle le monde assiste à l’extermination
du peuple juif… Je contribuerai peut-être par ma mort à dissiper l’indifférence
de ceux qui, aujourd’hui encore, peuvent sauver les quelques Juifs polonais
demeurés vivants. »
27 .
Szmul Zygieboym, en se suicidant, n’a pas atteint son but.
Churchill et Roosevelt n’ont pas changé de politique ni de
stratégie.
Ils veulent vaincre militairement le III e Reich.
La chute de Hitler, la destruction du nazisme, la
capitulation de l’Allemagne, l’anéantissement de ses armées sauveront les Juifs
de l’extermination.
Szmul Zygieboym s’est trompé.
Les grands – Churchill, Roosevelt et Staline – n’ignorent
rien, depuis l’été 1942, de la volonté des nazis de mettre en œuvre la « solution
finale » de la question juive.
Les services de renseignements anglais et américain, les
Russes ont recueilli suffisamment de témoignages pour dresser la liste des
camps d’extermination, pour reconstituer les méthodes employées pour le « transport »
de centaines de milliers de Juifs et pour leur extermination dans les chambres
à gaz.
Ce n’est donc ni par ignorance ni par passivité et
indifférence qu’ils n’interviennent pas, mais parce qu’ils ont décidé que pour
arrêter le massacre, il fallait d’abord briser l’Allemagne, l’écraser sous les
bombardements. Et aucune force ne pouvait être distraite de cette stratégie.
Elle comportait une première étape : l’ouverture d’un second
front.
Il contraindrait les Allemands à retirer une partie de leurs
troupes du front russe.
Staline l’exigeait, Churchill et Roosevelt plus encore s’étaient
engagés à ce que, avant la fin de l’année 1942, un débarquement ait lieu sur
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