1942-Le jour se lève
pièce maîtresse de la
situation.
L’Afrique du Nord est un nœud d’intrigues, de conspirations,
de lâchetés, de tromperies, de bêtises.
Et une tragédie.
Car dans la nuit du 7 au 8 novembre 1942, les navires
anglais et américains ont atteint les côtes marocaines et algériennes.
Depuis des mois, quelques conjurés – industriels, policiers,
fonctionnaires, officiers, aventuriers – ont pris langue avec le consul
américain à Alger, Robert Murphy.
Le consul écoute, promet un débarquement des troupes
américaines. C’est l’opération Torch, à laquelle Roosevelt s’est rallié
et que Churchill a présentée à Staline qui en a compris tous les avantages.
Mais Robert Murphy ne dévoile pas aux conjurés le détail de
l’opération et les « conjurés » sont vite neutralisés par les
officiers décidés à suivre les ordres de Pétain.
Le Maréchal a reçu un message de Roosevelt.
Le président des États-Unis affirme que le débarquement
américain a pour but de prévenir une agression des troupes de l’Axe – Allemagne-Italie –
contre l’Empire français.
Roosevelt poursuit :
« Je n’ai pas besoin de vous dire que le but ultime et
le plus grand est la libération de la France et de son Empire du joug de l’Axe…
« Je n’ai pas besoin de vous affirmer à nouveau que les
États-Unis d’Amérique n’ambitionnent la conquête d’aucun territoire… »
La réponse de Pétain est apparemment sans ambiguïté :
« C’est avec stupeur et tristesse que j’ai appris cette
nuit l’agression de vos troupes contre l’Afrique du Nord, commence le Maréchal.
« J’ai lu votre message, vous invoquez des prétextes
que rien ne justifie.
« Vous prêtez à vos ennemis des intentions qui ne se
sont jamais traduites en actes.
« J’ai toujours déclaré que nous défendrions notre
Empire s’il était attaqué… Nous sommes attaqués, nous nous défendrons, c’est l’ordre
que je donne. »
Ces mots enfantent des morts.
Américains et Français s’entretuent sur les plages
nord-africaines. Car les ordres de Pétain sont exécutés.
On résiste aux Américains.
Au Maroc, les troupes du général Noguès comptent 1 500 morts
et infligent près de 1 000 tués aux Américains !
On peut aussi mourir à Sidi-Ferruch, non loin d’Alger.
Et les Américains ne débarquent pas en Tunisie, laissant
ainsi les troupes allemandes s’y installer. Et il faudra de durs combats –
de nombreux morts – pour les déloger.
Puisque les troupes françaises restent fidèles au maréchal
Pétain, Robert Murphy se tourne vers l’amiral Darlan.
Mais
celui-ci refuse de donner l’ordre d’accueillir les Américains en libérateurs.
« J’ai prêté serment au maréchal Pétain, explique
Darlan. Et depuis deux ans, je recommande à mes marins et au pays de s’unir
derrière le Maréchal. Je ne peux pas renier mon serment. »
Robert Murphy obtient seulement que Darlan demande à Pétain ses
instructions.
Pétain, qui vient de donner l’ordre de résister, télégraphie
sa réponse à Darlan :
« J’ai bien reçu vos messages par l’entremise de l’amirauté
et suis heureux que vous soyez sur place. VOUS POUVEZ
AGIR ET ME RENSEIGNER. VOUS SAVEZ QUE VOUS AVEZ TOUTE MA CONFIANCE . »
Darlan est bien le maître de la situation, puisque Pétain
lui donne un blanc-seing.
En fait, Pétain pratique son double jeu habituel : pour
satisfaire les Allemands, il doit faire des déclarations invitant à la
résistance aux Américains.
Et il faut permettre à Darlan de négocier avec ces
Américains que Pétain invite à tuer.
Car le 8 au soir, les combats qui ont cessé à Alger se
poursuivent à Oran et Casablanca !
Ces « finasseries » sanglantes se parent des
vertus de la bonne conscience : Pétain et Laval prétendent que leur
politique est la seule qui permette de protéger la population de la métropole
des représailles allemandes.
À Weygand qui propose de signer l’armistice avec… les
Américains, de déclarer la guerre à l’Axe, de donner l’ordre à l’Armée de l’armistice
de résister aux Allemands s’ils pénètrent en zone libre et d’envoyer la flotte
de Toulon à Alger ou à Oran, le Maréchal répond qu’on ne peut adopter cette
attitude, car la France serait traitée comme la Pologne.
Laval, lui, veut incarner la « collaboration »
active, mais en essayant de ne pas passer « aux
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