1943-Le souffle de la victoire
acheter la grandeur au prix de la
liberté… La chute de Mussolini est pour la France la première revanche de la
justice. »
Général DE GAULLE
allocution
radiodiffusée d’Alger
27 juillet 1943
21.
Qui a trahi Mars et Rex, le chef de l’Armée Secrète et le
président du CNR ?
Cette question taraude de Gaulle et tous ceux qui voyaient
dans ces deux hommes l’incarnation la plus pure du courage et du patriotisme.
Qui a trahi ?
Ce René Hardi, du mouvement Combat, qui a caché qu’il
avait été arrêté par la Gestapo et qui se trouvait à Caluire, alors que rien ne
justifiait sa présence dans la maison du docteur Dugoujon, où sont réunis
autour de Moulin les chefs de la Résistance ?
Hardi qui réussira à s’évader, et qu’aucun des hommes de la
Gestapo ne réussira à atteindre alors qu’il court à découvert.
Qui a trahi ?
Derrière Hardi, il y a peut-être des agents des services
secrets alliés qui veulent affaiblir de Gaulle.
Et que penser des communistes, qui sont des combattants
antinazis efficaces mais qui jouent leur jeu ?
Et parfois certains résistants combattent de Gaulle parce qu’on
le dit tombé aux mains des communistes.
Et Jean Moulin ? N’était-il pas durant le Front
populaire membre du cabinet du ministre Pierre Cot, accusé d’être proche des
Soviétiques, voire l’un de leurs agents ?
Or il est si facile pour se débarrasser de rivaux, d’adversaires,
de les dénoncer aux Allemands !
Et il suffit peut-être d’un enchaînement de circonstances, du
non-respect des règles élémentaires de la clandestinité pour que le cataclysme
des arrestations se produise.
Mais en ces derniers jours de juin et ce début de juillet
1943, certains résistants et les groupes qu’ils dirigent échafaudent des plans
pour libérer Moulin, attaquer la prison de Montluc, où ils veulent croire qu’il
est encore détenu, donc vivant.
En fait, Max a été transféré à Paris, pauvre corps brisé, défiguré
par la torture.
Il est sans doute mort le 8 juillet 1943, au cours de
son transport en Allemagne. Est-il mort à Metz ou à Francfort ?
Le 9 juillet, son corps est ramené à Paris, et il est
incinéré au crématorium du Père-Lachaise.
Son corps n’a pas été enseveli dans la « bonne et
sainte » terre de France qu’a évoquée de Gaulle.
Avec la mort de Jean Moulin, une page de la Résistance est
tournée mais le combat continue.
Il faut d’abord rassurer les résistants qui lisent dans la
presse de la collaboration que « l’armée du crime est décapitée ».
Alors, dans leurs numéros du mois de juillet, les journaux
clandestins publient une « mise en garde » du CNR !
« La propagande ennemie a exagéré à dessein l’importance
de quelques arrestations opérées à Lyon. Le Conseil National de la
Résistance informe le pays qu’aucun organisme d’importance décisive n’a été
atteint… »
Le CNR appelle à « redoubler de vigilance contre les
agents de l’ennemi qui essaieraient de se glisser dans leurs rangs ».
Ils sont souvent « facilement décelables » par le
fait que, tout en affirmant leur haine de l’Allemand, ils s’efforcent d’opposer
entre eux les Français d’opinions différentes en se servant notamment de l’épouvantail
du « bolchevisme » dont Hitler s’est constamment servi pour affaiblir
ses adversaires.
« Enfin, le CNR met en garde les Français contre la
campagne de faux documents soi-disant trouvés à Lyon. Cette campagne a pour but
de diviser les Français de plus en plus unis… »
Le sont-ils vraiment ?
La disparition de Moulin a affaibli le CNR. Les rivalités
entre résistants, entre maquis existent. On se méfie des communistes qui
multiplient sabotages et attentats, mais qu’on soupçonne de vouloir contrôler
et dominer les résistants.
Mais personne ne peut nier leur audace et leur résolution.
Le groupe Manouchian, de la Main-d’Œuvre Immigrée (MOI), a
attaqué durant le mois de juillet 1943 des casernes occupées par la Wehrmacht, des
autobus remplis de soldats allemands, fait dérailler plusieurs trains, abattu
des officiers, organisé un attentat – qui a échoué – contre le
Feldmarschall von Rundstedt.
Les FTPF, émanation du Parti communiste, ont un bilan aussi
riche que celui du groupe Manouchian.
Leur chef, Charles Tillon, écrit le 6 août au général
de Gaulle d’égal à égal :
« Les FTP se permettent de
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