1944-1945-Le triomphe de la liberte
accomplissons, aucune nation ne peut
l’accomplir ! »
Une Allemande nationale-socialiste écrit :
« Pendant les derniers mois de la guerre, je devais
lutter contre mes larmes chaque fois que j’entendais la voix [de Hitler] à la
radio ou que je le voyais aux actualités. Nous ne voulions pas reconnaître les
signes, toujours plus nets, qui annonçaient la chute prochaine ; notre cœur
avait peur de la terrible vérité.
« Les actualités nous montraient un homme vieillissant,
qui marchait courbé, en jetant des regards à la dérobée. Sa voix rendait un ton
désespéré. Allait-il donc échouer ? Les efforts fabuleux que le peuple
allemand avait accomplis pour diriger le monde étaient, à nos yeux,
personnifiés en Hitler. Celui qui le regardait contemplait la somme immense de
sacrifices en vies, santés et biens, que ces efforts avaient demandés. Tout
cela devait-il être vain ? »
Un élève officier, après avoir écouté le discours du Führer,
écrit à sa femme :
« C’était merveilleux d’entendre la voix du Führer.
Quel lourd fardeau il doit porter ! Quand on y pense, il est presque vil
d’écouter les paroles du Führer dans l’espoir qu’elles vont apporter une
décision. Mais de fait, une décision a été prise. Aucun miracle ne nous
sauvera, sauf celui du cran allemand. »
Mais Hitler lui-même désespère.
Il a quitté, après l’échec de l’offensive dans les Ardennes,
son Grand Quartier Général de Ziegenberg.
Et il vit dans le bunker au-dessous de la Chancellerie du
Reich, à Berlin.
« Je sais bien que la guerre est perdue »,
confie-t-il à l’un de ses officiers d’ordonnance.
Il ajoute : « Mon plus cher désir, c’est de me
tirer une balle dans la tête. »
L’Allemagne périrait aussi.
Déterminé, il répète aussitôt :
« Nous ne capitulerons pas. Jamais. Nous pouvons
sombrer, mais nous emporterons un monde avec nous. »
47.
Combien de millions sont-elles les Allemandes, et combien
sont-ils les Allemands qui, dès ce mois de janvier 1945, ont vu, selon les mots
de Hitler, leur « monde sombrer » ?
Ils sont sur les routes de Prusse, de Silésie, de Poméranie.
Ils avaient cru que jamais les Russes ne pénétreraient dans
le Reich.
Les ministres, les Gauleiters, les membres du Parti avaient
assuré que les « barbares », les « Mongols », les
« bolcheviks » allaient être repoussés, exterminés.
Et tout à coup, à la mi-janvier, des voitures haut-parleurs
ont parcouru les rues des villes – ainsi à Breslau, capitale de la
Silésie – et les Allemands ont entendu les mots inimaginables :
« Les femmes et les enfants évacuent la ville à pied en
direction d’Opperau-Kanth. »
Plus de trains. Un vent polaire. Une température de
20 degrés au-dessous de zéro. Une neige haute d’un demi-mètre. L’Oder
recouvert d’une solide carapace de glace.
Une jeune femme écrit à sa mère :
« Je vais tenter d’arriver chez vous. Je t’en prie,
maman, sois calme, mais je n’aurai pas Gaby avec moi et j’ai un bras gelé…
« Je ne pouvais plus la porter et elle était morte. Je
n’en pouvais plus. Alors je l’ai bien enveloppée et je l’ai ensevelie
profondément dans la neige sur la route après Kanth. Gaby n’y est pas seule.
Des milliers de mères marchaient avec leurs enfants et elles ont mis comme moi
leurs morts dans le fossé, aucune voiture ne pourra ainsi les déranger et leur
faire du mal… »
Cela n’est rien encore.
Sur ces routes qui vont vers l’ouest, il y a les milliers de
déportés que les SS encadrent. Ils ont quitté Auschwitz, le 19 janvier
1945, alors que les SS tuaient les plus faibles et détruisaient le camp. Ils
marchent et certains sont en guenilles, pieds nus, squelettiques. Ils sont
58 000 ! Ils tombent. Les SS les tuent d’une balle dans la nuque.
Il y a des détenus qu’on dirige vers d’autres pénitenciers.
Cinq cent soixante-cinq prisonnières se mettent ainsi en route le
21 janvier 1945 pour parcourir 36 kilomètres – du pénitencier de
Fordon, près de Bomberg, à celui de Krone. Il n’y eut que 40 survivantes.
Cela n’est rien encore.
Une colonne de SS mitraille les prisonnières qu’on évacue de
Krone… Et des soldats allemands qui passent tirent des détenues hors des rangs
et les violent.
Marchent aussi des travailleurs français, des Italiens, des
Belges, des Hollandais, tous ces
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