Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
4 000 ans de mystifications historiques

4 000 ans de mystifications historiques

Titel: 4 000 ans de mystifications historiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
Vom Netzwerk:
ce jeune homme qui avait peint ce chef-d’œuvre.
    Les tests techniques, rayons X, étude microscopique des pigments, résistance de la peinture à l’alcool et autres solvants, présence de blanc de plomb dans les zones claires, avaient démontré l’authenticité du chef-d’œuvre. Reproduit à l’envi dans la presse spécialisée et générale, Les Disciples à Emmaüs était désormais l’un des tableaux les plus célèbres du monde.
    Avant de l’offrir à la Fondation Boymans, la Rembrandt Association l’avait acquis pour la somme de 550 000 guldens, dont les courtiers avaient remis 340 000 à van Meegeren, se partageant entre eux 210 000 guldens.
    Mais l’argent n’avait pas été le seul motif de la prodigieuse mystification de van Meegeren : ç’avait été l’amour-propre. Quelques années plus tôt, en effet, il s’était essayé à l’imitation frauduleuse de maîtres anciens et avait produit un Cavalier riant , attribué à Frans Hals. Le tableau avait été jugé authentique par un expert respecté, Hofstede de Groot, qui l’avait acheté, puis mis aux enchères. Mais examinant l’œuvre à la salle des ventes, l’un des pontes de la critique hollandaise, Abraham Bredius, s’était répandu en sarcasmes, relevant les erreurs stylistiques du prétendu Hals. De Groot en avait été évidemment déconfit, et van Meegeren encore plus.
    Il avait une revanche à prendre sur l’expert. Maintenant, il la tenait, car Bredius était l’un de ceux qui avaient authentifié et loué le faux Vermeer de Rotterdam.
    *
    Van Meegeren était un personnage singulier, sur lequel on ne sait pas grand-chose. Comme on le conçoit, nombre de Hollandais, dont le pays s’enorgueillit de quelques-uns des plus fameux musées au monde, souhaiteraient que son nom et ses agissements sombrent dans l’oubli le plus rapidement possible.
    On sait cependant que van Meegeren était un peintre doué d’une technique prodigieuse, mais que sa carrière alla déclinant au fur et à mesure que l’art moderne montait au firmament de la culture mondiale. Les amateurs le jugeaient trop vieux jeu et s’intéressaient beaucoup plus aux audaces de son compatriote Piet Mondrian, par exemple. Il partageait les opinions des nazis en matière artistique et jugeait que l’art moderne était, en effet, « dégénéré » ; cela lui valut la bienveillance des nazis quand son pays fut occupé, une vingtaine d’années plus tard. En attendant, ses revenus baissaient. Et ce fut alors qu’il voulut prouver que son talent était égal à celui des plus grands. Il commença à fabriquer des faux. L’échec du Frans Hals avait enrichi son expérience, comme le démontre le succès des Disciples à Emmaüs .
    Il ne pouvait produire des Vermeer inconnus en série : il s’attela à des « inédits » de maîtres moins connus, tels que Pieter de Hooch, Gérard Terborch, Dirck van Baburen, et il s’attaqua de nouveau, cette fois avec succès, à Frans Hals.
    Il ne faudrait certes pas brosser du faussaire le portrait d’un maître infaillible. Lorsqu’il mit sur le marché un autre « Vermeer », Le Christ dans la maison de Marthe et Marie , plusieurs marchands d’art pressentis par ses courtiers, tel Georges Wildenstein, patron d’une firme célèbre, flairèrent un faux et firent la grimace. La discrétion les retint de pousser jusqu’à la dénonciation publique : il y a maintes lunes que les marchés pullulent d’œuvres douteuses, à chacun de faire le ménage devant sa porte. Ne parvenant pas à écouler son Vermeer hors du pays, van Meegeren suggéra aux courtiers d’alerter Bredius : celui-ci s’extasia devant le « chef-d’œuvre », loua le bleu du manteau du Christ et maints autres aspects de la toile, puis décida de la rapatrier en Hollande : elle fut achetée pour la somme la plus élevée qu’on eût jusqu’alors payée pour un peintre hollandais du XVII e siècle : 520 000 florins.
    Plusieurs critiques la rejetèrent. Peu importait. Ces découvertes successives de toiles de Vermeer confortaient une thèse, d’ailleurs plausible, selon laquelle on avait répertorié trop peu d’œuvres de ce peintre et qu’il avait dû en réaliser d’autres qu’on retrouverait bientôt (jusqu’au XIX e siècle, en effet, Vermeer avait été quelque peu oublié). On en retrouva bien, mais toutes dues au pinceau de van Meegeren, dont une Tête du Christ , un Isaac bénissant Jacob et un Lavement des pieds ,

Weitere Kostenlose Bücher