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4 000 ans de mystifications historiques

4 000 ans de mystifications historiques

Titel: 4 000 ans de mystifications historiques Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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l’autorité de l’Église, représentée par ses juges. Ceux-ci lui reprochaient les péchés suivants : s’être attribué le don de prophétie, s’être travestie, avoir désobéi à ses parents et avoir prétendu qu’elle n’avait de comptes à rendre qu’à Dieu seul et qu’elle irait au paradis sans absolution. Ce dernier péché, le rejet de l’autorité de l’Église, était celui qui exaspérait le plus les juges : il reflétait le péché d’orgueil et il menaçait l’autorité ecclésiastique.
    Elle fut conduite à la chambre de torture puis, le 23 mai, au cimetière de Saint-Ouen, où elle fut prévenue qu’elle serait brûlée au bûcher si elle n’abjurait pas son obstination. Elle signa un acte dont il n’est pas sûr qu’elle ait compris les termes. Elle fut alors condamnée à la prison à vie. Quand Cauchon lui rendit visite fin mai, il constata qu’elle avait repris son attitude antérieure au jugement et des vêtements d’homme ; telle fut la raison pour laquelle elle fut qualifiée de « relapse », c’est-à-dire d’insoumise récidiviste. Cauchon et les autres juges décidèrent alors de la livrer au bras séculier de la justice. Et ce fut le bûcher.
    Son duel contre Isabeau de Bavière se serait donc achevé sur sa défaite.
    *
    Tout cela est bel et bon, et l’on aura compris que Michelet s’est lourdement laissé abuser pour ainsi camper, dans le tome V de son Histoire de France , sa légendaire héroïne, incarnation idéalisée de l’âme du peuple. Comme bien d’autres, avant et après lui, il a négligé des faits pourtant cruciaux.
    Le premier est le tournoi, longuement décrit dans les Chroniques de Lorraine , qui opposa le 6 mars 1429 la bergerette de Domrémy au duc d’Alençon, dans la cour du château de Chinon, devant le roi et la cour réunis. Un tournoi est un duel équestre entre deux cavaliers en armure, munis de lances ; il est strictement réservé aux hommes de la noblesse. On n’a jamais vu manant ni femme s’y risquer. On ne peut, en effet, s’y aventurer que fort d’un entraînement donné par des maîtres d’armes. Le tournoi s’acheva par la victoire de « Jeanne », à laquelle Alençon offrit son destrier et une bourse.
    La bergère en armure ? Et où diantre se serait-elle entraînée ? C’est impossible, puisque ce tournoi aurait eu lieu le jour même de la rencontre de Jeanne avec Charles VII, ce même 6 mars 1429, donc bien avant qu’elle ait eu la moindre expérience des armes. Et se travestir en page ne confère certes pas des connaissances de cavalier et de lancier. L’obstination de cette bergère à s’habiller en homme ne procède-t-elle pas plutôt du fait qu’elle en est un ? Quoi qu’il en soit, le récit de la fameuse rencontre de Chinon s’écroule : c’est une fabrication postérieure – mais de peu.
    Le deuxième fait çst la déclaration de Martin Le Franc, protonotaire apostolique et secrétaire des papes Eugène IV et Nicolas V, qui écrivit en 1440 que Jeanne d’Arc était « fier prince et non simplette bergerette ». Un secrétaire de deux papes n’avance pas de telles assertions à la légère. Quel prince ? Philippe d’Orléans, déjà cité : le propre demi-frère de Charles VII.
    Aurait-on donc brûlé un homme sur la place du Vieux-Marché à Rouen ? En vérité, on n’en sait rien : les autorités de la ville prirent des précautions extraordinaires pour qu’on ne pût établir l’identité de la personne immolée, qui fut d’abord asphyxiée par la fumée. Le supplice était destiné à montrer au peuple la punition des coupables tels que Jeanne, prétendument « hérétique et relapse ». Or, et c’est là le troisième fait négligé, la personne qui fut hissée sur le bûcher était encagoulée. Bizarre… Plus bizarre encore, le fait que tous les volets de la place du Vieux-Marché furent cloués. Et pour corser le tout, huit cents soldats furent chargés de tenir les spectateurs à distance. D’ailleurs, les huissiers de Rouen refusèrent d’enregistrer le décès.
    Les vers célèbres de François Villon sur Jeanne, qu’« Anglois bruslèrent à Rouen », ne reposent sur rien, car ce furent pas les Anglais mais la Sorbonne qui prononça la sentence de mort. Mais personne ne peut dire que quelqu’un ait été brûlé ni qui c’était. Selon certains  (12) , ce serait une fille de rue, Jeanne La Turquenne, qui aurait été suppliciée. Qui serait donc

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