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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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elle avec l'aide de son fils et aidée à accoucher de Richard, treize ans
auparavant. La dame sembla l'identifier au même moment et sa figure ridée
s'éclaira d'un large sourire.
     
    — Tiens! Si c'est
pas la petite madame trop pressée d'accoucher pour attendre son docteur!
dit-elle à mi-voix.
     
    — Bonjour,
madame. Vous pouvez pas savoir comment ça me fait plaisir de vous revoir!
s'exclama Laurette, radieuse. Je vous ai tellement cherchée pour vous remercier
pour tout ce que vous avez fait pour moi. Sans vous, je sais pas ce que
j'aurais fait!
     
    — Voyons donc!
protesta la sexagénaire. C'était pas la fin du monde, ma fille, protesta la
femme au visage 487 énergique. J'ai juste fait ce que n'importe quelle femme
aurait fait à ma place.
     
    — Je vous ai plus
jamais revue dans le quartier, lui fit remarquer Laurette.
     
    — C'est normal.
Je suis déménagée sur la rue Montcalm, chez un de mes garçons, une couple de
semaines après ton accouchement... Puis, comment va le bébé? demanda-t-elle,
apparemment impatiente de mettre fin aux remerciements de Laurette.
     
    — Le bébé a
treize ans et c'est, de loin, mon plus haïssable à la maison.
     
    — Inquiète-toi
pas trop avec ça, ma fille, reprit l'autre, c'est souvent notre plus bougeant
qui nous donne le plus de joie en vieillissant. Je sais de quoi je parle, j'ai
eu six gars.
     
    — Ah ben! J'ai
ben hâte de voir ça, fit Laurette, incrédule... Pendant que j'y pense,
voulez-vous passer à ma place. Je suis la prochaine, offrit-elle à sa bienfaitrice.
     
    — T'es ben fine,
mais je suis pas venue pour moi.
     
    J'accompagne ma
bru qui est à la veille de sortir du bureau.
     

À peine
l'inconnue venait-elle de prononcer ces paroles que la secrétaire appela
Laurette au moment où une petite femme toute menue quittait le bureau d'Émilien
Talbot.
     
    Laurette se leva
et se précipita vers le bureau de crainte qu'une autre cliente ne s'avance à sa
place.
     
    Son examen de la
vue ne prit que quelques minutes.
     
    Après lui avoir
scruté les yeux à l'aide d'une petite lampe de poche, l'optométriste, un grand
homme maigre âgé d'une cinquantaine d'années, lui demanda de lire des rangées
de lettres de diverses grosseurs sur fond vert et sur fond rouge. Finalement,
il lui prescrivit des lunettes.
     
    — Vous n'aurez qu'à
vous entendre avec mon assistante pour le type de monture que vous désirez,
dit-il en 488 DES LUNETTES lui ouvrant la porte de la salle d'examen. Vos
verres devraient être prêts à la fin de la semaine prochaine.
     
    Laurette le
remercia et alla s'asseoir devant le bureau de la jeune femme accorte qui
l'avait reçue. Elle songea soudain à l'inconnue qu'elle venait de retrouver par
le plus grand des hasards. Elle se retourna brusquement pour tenter de
l'apercevoir dans la salle d'attente. Il n'y avait plus dans la pièce qu'une
seule cliente.
     
    — Ah ben! Tu
parles d'une maudite niaiseuse! dit-elle à mi-voix. J'ai même pas pensé à lui
demander son nom!
     
    — Pardon, madame!
fit la secrétaire, offusquée, qui venait de prendre place en face d'elle, de
l'autre côté du bureau.
     
    Laurette
sursauta. Elle ne l'avait pas entendue revenir.
     
    — Excusez-moi,
fit-elle. Je me parlais toute seule. Je viens de retrouver une femme que j'ai
cherchée pendant des années et j'ai complètement oublié de lui demander son nom
et où elle reste.
     
    Rassurée, la
réceptionniste déposa devant elle un plein coffret de diverses montures
disposées sur un présentoir en velours. Elle déplaça un petit miroir grâce
auquel la cliente pourrait vérifier si une monture lui allait bien.
     
    Laurette fit un
effort pour oublier sa déconvenue et s'occuper de ses lunettes.
     
    — Montrez-moi les
moins chères, dit Laurette à voix basse, en esquissant un sourire gêné.
     
    La jeune femme ne
sourcilla pas et tendit à Laurette une monture en fil de fer. Laurette la posa
sur son nez et se regarda dans le miroir. Elle sursauta et s'empressa de la
retirer.
     
    — Ouache! ne
put-elle s'empêcher de dire avec une grimace.
     
    — Je crois que
celle-là devrait mieux vous convenir, dit l'adjointe de l'optométriste avec un
sourire. Elle est à 489 peine plus cher que l'autre, ajouta-t-elle à voix basse
pour ne pas être entendue par la cliente qui attendait.
     
    Laurette prit la
monture en corne assez fine pour être féminine. Elle l'essaya et se regarda
dans le miroir. Elle jugea qu'elle était moins

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