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A l'écoute du temps

A l'écoute du temps

Titel: A l'écoute du temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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t'as fait là, déclara Gilles en adoptant un air faussement
scandalisé. Des plans pour nous empoisonner tous les trois, innocent!
     
    — Ça lui
apprendra à m'écoeurer, déclara son jeune frère avec une joie mauvaise avant de
retourner dans la 58 UN COMMENTAIRE DÉSOBLIGEANT cuisine après avoir endossé
une chemisette et son vieux pantalon.
     
    Il était bien
connu chez les Morin que Richard puait atrocement des pieds. Sa mère avait eu
beau tenter toutes sortes d'expériences pour enrayer le fumet que les pieds de
son cadet dégageaient, elle n'était parvenue à aucun résultat tangible.
L'unique remède semblait consister à lui faire abandonner ses souliers et ses
chaussettes sur le balcon et à l'obliger à se laver les pieds deux fois plutôt
qu'une chaque soir. Mais il fallait bien entreposer les chaussettes sales
quelque part. Il était hors de question qu'elles se retrouvent mêlées aux
vêtements sales que chacun déposait durant la semaine dans la laveuse rangée
dans la chambre des garçons. Laurette avait exigé qu'ils soient placés dans un
sac hermétiquement fermé suspendu à l'arrière de la porte conduisant à
l'escalier de la cave.
     
    — Avec un peu de
chance, les rats vont avoir tellement mal au coeur en sentant ça qu'ils oseront
pas entrer dans l'appartement, avait alors déclaré Denise en fronçant le nez
avec un air de profond dégoût.
     
    Jean-Louis ne
revint dans la cuisine qu'au moment où Richard finissait de manger. Le jeune
étalagiste, rasé et soigneusement coiffé, embaumait l'Old Spice. Il avait noué
sa cravate et avait déjà endossé son veston. Il s'assit devant la tasse de café
que sa mère venait de lui servir.
     
    — T'es sûr que tu
veux pas déjeuner? lui demandât- elle.
     
    — Non, merci,
m'man.
     
    — Vas-tu mieux,
au moins?
     
    — Oui. Je suis
correct, répondit-il avant de boire la moitié du contenu de sa tasse. Ce qui
m'a donné mal à la tête et mal au coeur, c'est une senteur écoeurante qu'il y
avait dans ma chambre. Je sais pas d'où elle venait, mais ça sent plus rien à
cette heure.
     
    59
     
    — Bon. Tant
mieux, fit Laurette, soulagée. Ça devait venir de dehors. Pendant que j'y
pense, j'arrêterai peut-être te dire un petit bonjour à midi, en passant.
     
    — Ça se peut que
vous me voyiez pas, la prévint son fils en réprimant difficilement un rictus
d'agacement. Des fois, mon boss m'envoie travailler en haut, dans les bureaux.
     
    Si vous me voyez
pas, demandez pas à me parler, monsieur Boudreau aime pas ça quand on se fait
déranger pendant l'ouvrage.
     
    — Inquiète-toi
pas, le rassura sa mère.
     
    — Bon. Il faut
que j'y aille sinon je vais arriver en retard. On dirait qu'il y a pas mal
moins de petits chars le samedi matin de bonne heure.
     
    Sur ce,
Jean-Louis se leva, embrassa sa mère sur une joue et prit sur le comptoir le
sac de papier brun dans lequel elle avait placé son repas du midi. Il l'enfouit
dans un porte-documents et quitta la maison. Quelques minutes plus tard, Gérard
fit son apparition dans la pièce, précédant de peu ses trois autres enfants.
     
    L'air affairée et
pressée, Laurette déposa sur la table le vieux grille-pain à deux portes, un
pain Weston et un pot de beurre d'arachide.
     
    — Il y a aussi de
la soupane, annonça-t-elle. Elle est sur le poêle. Vous avez juste à vous
servir.
     
    — Qu'est-ce qu'on
va avoir pour notre lunch? demanda Gilles.
     
    — Il y a une
boîte de Paris-Pâté ouverte dans le frigidaire et il reste aussi du baloney.
     
    Sur ce, la mère
de famille prit son paquet de cigarettes, qu'elle déposait chaque soir sur le
réfrigérateur, et l'ouvrit.
     
    Aussitôt, son
visage refléta un air de doute profond.
     
    — Bout de viarge!
Fumes-tu mes cigarettes, toi? demanda-t-elle à son mari occupé à beurrer une
rôtie.
     
    Gérard leva la
tête et la regarda, surpris.
     
    60 UN COMMENTAIRE
DÉSOBLIGEANT
     
    — Pourquoi tu me
demandes ça? Tu sais ben que j'aime pas pantoute tes Sweet Caporal. Je trouve
qu'elles goûtent rien. J'aime mieux mes Player's.
     
    — C'est drôle en
maudit, cette affaire-là! s'exclama sa femme. Je suis presque certaine d'en
avoir fumé juste deux dans mon paquet avant de me coucher hier soir. À matin,
il y en a cinq de parties, précisa-t-elle en allumant sa première cigarette de
la journée après avoir jeté un regard de suspicion aux siens assis autour de la
table.
     
    — En tout cas,
c'est pas moi. protesta

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