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Abdallah le cruel

Abdallah le cruel

Titel: Abdallah le cruel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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voix dues selon elle à
la rigueur du climat, elle annula plusieurs concerts et refusa de se rendre au
palais. Ibrahim Ibn Hadjdjadj, qu’on savait être autoritaire, fit preuve à son
égard d’une extraordinaire mansuétude. Il lui passait tous ses caprices. En
fait, il était tombé éperdument amoureux de la chanteuse. Fine mouche, celle-ci
l’avait remarqué et prenait un malin plaisir à repousser ses avances, lui
reprochant de la considérer comme une courtisane de bas étage. Le soupirant
éconduit ne se découragea pas pour autant et parvint à ses fins, au grand
désespoir de ses intendants, furieux de le voir dépenser des sommes folles pour
combler de présents sa favorite. Quant à son épouse, elle ne cachait pas le
mépris que lui inspirait la chanteuse sur laquelle des couplets railleurs ne
tardèrent pas à circuler. Bien renseignée, elle fit savoir à son mari que la
belle le trompait avec ses officiers. Surprise en flagrant délit, Kamar fut
chassée de la ville et reprit le chemin de l’Orient où elle ne retrouva pas les
faveurs du public.
    La présence de Kamar et d’Abou
Mohammad al-Udhri n’était pas un phénomène isolé. Pour combler les vides
laissés par les Chrétiens, Ibrahim Ibn Hadjdjadj dépêcha en Ifriqiya et en
Orient des émissaires chargés d’attirer à Ishbiliyah des immigrants arabes et
berbères. Plusieurs milliers de familles vinrent s’installer en al-Andalous,
apportant avec elles leur culture et leurs traditions. En quelques années, si
l’on faisait exception de la communauté juive et de la petite minorité chrétienne
dont les rangs continuaient à s’éclaircir, la cité devint quasi exclusivement
peuplée de Musulmans. C’était un détail qui frappait tous les voyageurs,
notamment ceux qui s’étaient rendus auparavant à Kurtuba ou à Tulaitula. Selon
qu’ils fussent Musulmans ou Chrétiens, ils ne manquaient pas d’en féliciter le
wali ou de s’en étonner et celui-ci modelait habilement sa réponse selon son
interlocuteur. Il se montrait prudent, convaincu que ses propos seraient
rapportés à l’émir. La passivité de ce dernier l’intriguait. Elle ne
correspondait pas à son comportement habituel et Ibrahim Ibn Hadjdjadj se
demandait ce qu’elle cachait. Jadis, il aurait tenté d’en savoir plus en
soudoyant des informateurs à la cour. Ce n’était plus possible. Son fils était
retenu en otage et il ne voulait pas mettre sa vie en danger.
     

Chapitre IX
    Abd al-Rahman Ibn Ibrahim Ibn
Hadjdjadj coulait des jours heureux à Kurtuba. Il avait presque oublié qu’il
avait été enlevé par les sbires du hadjib et qu’il était un otage. Seul
comptait pour lui le fait de vivre à la cour, dont les fastes l’émerveillaient,
et de pouvoir ainsi observer le souverain qu’il admirait secrètement. Méfiants
au début à son égard, les dignitaires avaient fini par s’habituer à sa
présence. Certains d’entre eux avaient des parents à Ishbiliyah et se
comportaient aimablement avec lui dans l’espoir qu’il parlerait d’eux à son
père dans les lettres qu’il lui envoyait. Un matin, Saïd Ibn Mohammad Ibn
al-Salim lui proposa de l’accompagner à al-Rusafa pour lui montrer la superbe
résidence estivale de l’émir. Il le prévint qu’à l’entrée, il serait fouillé,
« tout comme moi », ajouta-t-il en riant. Le prince héritier vivait
là-bas et des mesures exceptionnelles avaient été prises pour assurer sa
sécurité et déjouer toute tentative de meurtre.
    C’était une chaude journée d’été et
les cavaliers ne furent pas mécontents d’arriver à destination. On leur servit
des rafraîchissements après avoir vérifié qu’ils n’étaient pas armés. Le hadjib
fit visiter à son invité la demeure édifiée par Abd al-Rahman I er ,
puis le conduisit le long des vastes allées de ses jardins ombragés où des
gardes patrouillaient sans relâche. Ils se dirigèrent vers un plan d’eau réputé
pour sa profondeur, en fait une immense piscine de marbre apporté à grands frais
des carrières de la région. Entouré de ses serviteurs, le petit Abd al-Rahman
jouait avec des amis de son âge. Quand il aperçut le hadjib, le prince héritier
courut vers lui. Il fut ravi d’apprendre que son compagnon portait le même nom
que lui. Il leur raconta par le menu les événements des derniers jours. Abd
al-Rahman Ibn Ibrahim Ibn Hadjdjadj fut surpris par l’intelligence du jeune
garçon, sa vivacité et sa bonne

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