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Aesculapius

Aesculapius

Titel: Aesculapius Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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l’ai dit, il est en pâmoison et je crains qu’il délire plus qu’autre chose. Selon moi, une nuit de repos et de soins devrait rendre ses paroles plus sensées.
    — Vous avez sans doute raison, mon ami. Je vous rejoindrai demain, dès après laudes. Il serait souhaitable qu’un autre membre du conseil de village soit également présent.
    — Qui ?
    — Je ne sais. Lafleur ou maître Limace, bref l’un de ceux qui habitent entre nos murs.
    1 - Ou hydromel vineux, connu depuis l’Antiquité. Il s’agit d’une fermentation de miel dans l’eau à laquelle on ajoutait du vin blanc, puis de la gnaule et des aromates pour la conserver. La boisson pouvait être forte.

XXIII
    Château de Saint-Ouen-en-Pail,
 août 1306, au même moment
    D ruon venait de comprendre l’invraisemblable et fixait la mage, sidéré. Igraine était l’une des dernières descendantes des druides et des mages des temps obscurs et lointains dont tous, ou presque, avaient perdu la mémoire. Une sorte de fascination mêlée d’appréhension superstitieuse l’envahit.

    Il se souvint d’un soir, alors que leurs serviteurs avaient depuis longtemps rejoint leurs chambres sous les combles ou au-dessus des écuries. Son père avait évoqué ces êtres étranges qui peuplaient les immenses forêts et connaissaient presque tous les secrets de la nature qu’ils considéraient à l’instar d’une puissante déesse, bienveillante mais capable de terribles colères pour qui lui manquait de respect. Héluise avait rétorqué :
    — Il s’agit d’une légende païenne, père.
    — Non pas, ma chérie. Ces druides, ces magiciens et magiciennes ont disparu – on les y a parfois aidés avec violence – et avec eux leurs étonnantes connaissances. D’aucuns prétendent qu’une poignée d’entre eux persiste toujours dans le plus grand secret. Depuis, nous tâtonnons tels des enfants malhabiles, tentant de réinventer ce qu’ils savaient depuis des siècles. Ah, Héluise, Héluise, toutes ces pertes de savoir me désolent ! Toutes ces magnifiques découvertes perses, égyptiennes, grecques, hébraïques, partout… Tous ces hommes, ces femmes qui, soudain, ont bénéficié d’une révélation, d’un génial éclat de compréhension. Si l’on pouvait retrouver, rabouter tout cela, nous ferions un bond dans le temps.
    — Des savoirs perdus ou volontairement dispersés ? avait-elle demandé, ébranlée.
    — Les deux.
    — Pourquoi disperser la connaissance ?
    — Parce qu’elle est pouvoir, qu’elle décille les hommes et qu’il devient alors beaucoup plus difficile de les dominer, de les faire obéir. Pourquoi crois-tu que l’on n’enseigne ni aux femmes ni aux pauvres ? Parce que, dans le cas contraire, ils pourraient juger, comprendre que leur situation est inique. Et se rebeller. C’est ce qui arrivera un jour, car la connaissance est comme un puissant ruisseau. Si l’on bloque son cours, tôt ou tard, il en trouve un autre.

    — Mire, m’écoutez-vous ? tonna la baronne.
    Druon revint à la salle. Il biaisa :
    — Votre pardon, seigneur madame, je réfléchissais. Certes, je pourrais confectionner des appâts assaisonnés d’autres poisons violents, tels l’if. Nous pourrions aussi avoir recours à une substance fort rare en nos contrées mais redoutable, l’ako 1 . Une seule flèche enduite de ce toxique tue un buffle.
    — Eh bien, mire, procédez au plus vite ! ordonna-t-elle, soudain impatiente.
    — C’est que, madame, si vos appâts enherbés ont échoué, il en sera de même pour les miens. Quant à l’ako, il faudrait transpercer la bête d’une flèche. Or ne m’avez-vous pas dit que ni vous ni vos chasseurs ne l’aviez jamais aperçue, sauf l’un d’eux, isolé et sans doute attaqué par surprise ?
    La déception se lut à la crispation du beau visage autoritaire.
    — Il n’y aurait donc aucun moyen de se défaire de cette maudite créature ? Je ne le peux croire. Je ne le veux croire !
    — Mon père, mon maître, répétait : « Observe, analyse, compare et déduis. » Voyez-vous, il convient de n’évoquer une explication surnaturelle que lorsque toutes les autres se révèlent stupides.
    Léon tonna :
    — Une seule bête capable de massacrer deux jeunes hommes, armés de couteaux !
    — Étiez-vous présent sur les lieux ? Y a-t-il eu des témoins de la scène ?
    Mécontent, le géant barbu hocha la tête en signe de dénégation. Druon poursuivit :
    — Or

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