Alexandre le Grand "le fils du songe 1"
qui excellaient dans l'art d'animer les banquets par leurs danses, leurs répliques grivoises et l'ardeur juvénile avec laquelle elles s'adonnaient aux plaisirs du sexe.
Philippe, qui était particulièrement gai, décida que les invi tés participeraient également au cottabe, un jeu dont l'inter prète traduisit les règles aux Perses:
" Vous voyez cette fille ? demanda-t-il en indiquant une dan seuse qui était en train de se déshabiller. Il faut éclabousser sa chatte des dernières gouttes de vin restant dans votre coupe. Celui qui visera dans le mille l'aura en récompense. Voilà, regardez ! " Il glissa l'index et le majeur dans l'une des anses et projeta le liquide en direction de la fille.
Mais les gouttes attei gnirent l'un des cuisiniers en plein visage et tout le monde éclata de rire. " Et maintenant, baise le cuisinier, sire ! Le cui sinier ! Le cuisinier ! "
Philippe haussa les épaules et recommença. La jeune fille avait beau s'être approchée, la vue du roi était à l'évidence un peu brouillée.
Peu habitués au vin pur, la plupart des Perses roulaient déjà sous les tables. quant à l'invité principal, le satrape Arsamès, il continuait de caresser le jeune blond qui lui avait tenu com pagnie durant la nuit.
Il y eut d'autres tentatives, mais ce jeu n'obtint pas un grand succès car les convives étaient trop so˚ls pour exceller dans de tels exercices de précision. Chacun attrapa la pre mière fille qui lui tombait sous la mainj tandis que le souve rain s'attribuait, en sa qualité d'amphitryon, celle qui avait constitué le trophée du jeu. Comme d'habitude, la fête dégé néra en orgie, en un enchevêtrement de corps à demi nus et en nage.
Alexandre se leva, s'éloigna du campement et marcha jus qu'à la rive du fleuve, enroulé dans son manteau. L'eau gar gouillait entre les pierres, la lune qui surplombait les crêtes du mont Bermion jetait un voile argenté sur les flots, diffusant sur la plaine une légère clarté opaline.
Désormais, le vacarme et les grognements qui s'échappaient de la tente étaient assourdis par la distance, et la voix de ~a forêt pouvait s'exprimer: des bruissements d'ailes, des murmures, et soudain un chant. Un gazouillis qui évoquait une source, un bruit de clochettes d'abord sombre, puis de plus en plus aigu et argentin, pareil aux arpèges d'un mysté rieux poète dans l'obscurité parfumée du bois: le chant du rossignol.
Alexandre s'absorba dans la mélodie du petit chanteur sans se rendre compte du temps qui passait. Mais il sentit bientôt une présence derrière lui. Il se retourna: c'était Leptine. Les servantes l'avaient emmenée pour qu'elle les aide a préparer les repas.
Elle l'observait, les mains croisées devant elle, le regard aussi limpide et serein que le ciel au-dessus de leurs têtes. Alexandre lui effleura le visage d'une caresse, la fit asseoir près de lui et la tint serrée dans ses bras, sans mot dire.
Le lendemain, les Macédoniens regagnèrent Pella avec leurs hôtes perses, qui furent invités le jour suivant à un banquet solennel.
La reine Olympias voulut que son fils lui rende visite sans tarder. quand elle vit ses bras et ses jambes couverts de bleus et d'écorchures, elle l'embrassa, tremblante et inquiète. Mais le jeune prince se libéra de son étreinte d'un air gêné.
" On m'a rapporté ce que tu as fait. Tu aurais pu perdre la vie.
--Je ne crains pas la mort, maman. Le pouvoir et la gloire d'un roi ne se justifient que s'il est prêt à donner sa vie, quand vient son heure.
--Je le sais. Mais je tremble encore en songeant à ce qui s'est produit.
Je t'en prie, mets un frein à ton audace, ne t'ex pose pas inutilement. Tu es encore un adolescent, tu dois grandir et te développer. "
Alexandre la fixa, puis lui dit d'une voix ferme: " Je dois aller à la rencontre de mon destin, et ma course a déjà
commencé, j'en suis certain. Ce que j'ignore, c'est o˘ elle me conduira et o˘ elle se conclura.
--Personne ne le sait, mon fils, remarqua sa mère d'une voix tremblante.
Le Destin est un dieu dont le visage est mas qué d'un drap noir. "
10
Le matin qui suivit le départ des Perses, Alexandre d'…pire entra, les bras chargés, dans la chambre de son neveu.
" qu'est-ce que c'est ? demanda Alexandre.
--Un pauvre orphelin. Sa mère a été tuée par la lionne, l'autre jour. Tu le veux? Il est d'une excellente race, et si tu l'aimes, il s'attachera à
toi comme un être humain. "
Il lui montra
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