Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
Vom Netzwerk:
honte de Vichy. Mais je
dois respecter son secret et surtout achever rapidement mon travail nocturne.

    Assis à ma table, l’esprit ailleurs, je peine sur
l’alphabet en désordre d’un câble auquel j’essaie de
donner sens, mais je n’ai pas le courage d’achever
mon travail. Je me déshabille et me couche ensilence 20 .

    Samedi 26 septembre 1942

     

    Recrutement à Toulouse

    La recherche de locaux est devenue tout aussi
urgente que le recrutement de volontaires pour étoffer
mon secrétariat. La réponse favorable de Blanquat,
mon ancien camarade de l’Action française, m’a
incité à le rejoindre à Toulouse.

    Je lui ai envoyé un télégramme lui annonçant « la
visite du messager de Dany » ce week-end, durant
lequel * Rex attend toujours son départ pour Londres
sur le terrain. Avant la guerre, j’étais souvent venu
dans cette ville avec mes parents. Le rose de ses
façades en brique la pare d’un charme joyeusement
entretenu par la foule des étudiants encombrant rues
et cafés.

    J’arrive par le train en début d’après-midi. J’ai
annoncé ma visite pour 7 heures : j’ai le temps de
suivre les traces de mon passé. À mesure que j’avance
vers la place du Capitole, l’architecture me paraît
familière. L’accent chantant me plonge dans l’univers sonore de mon enfance : celui d’une France
singulière n’appartenant qu’à moi. Je veux revoir la
basilique Saint-Sernin, souvent visitée avec ma mère.
Je suis curieux de la comparer avec les églises
d’Angleterre. Elle me paraît plus vaste et surtout
infiniment plus émouvante. Est-ce l’étroitesse de la
nef tout en hauteur, l’obscurité alentour ? Je déambule lentement et suis enveloppé par cette présence
invisible et totale, qui est le socle de ma foi.

    Après une longue promenade, je sonne chez Mme
Baysoselle. Une dame avenante et replète m’accueille.Prévenue de ma visite, elle m’indique que Blanquat
doit arriver d’un instant à l’autre. En attendant, elle
me fait entrer dans la chambre qu’elle lui loue. C’est
une pièce spacieuse, décorée de quelques meubles
chinois et surtout d’un lit démesuré. Connaissant la
passion de Blanquat pour les filles, je ne doute pas
qu’il possède là un champ de manœuvre à toute
épreuve.

    Je m’installe dans un fauteuil et commence à parcourir mon journal lorsque j’entends une clef tourner dans la serrure et des pas dans l’entrée. La porte
de la chambre s’ouvre : c’est lui. Il s’arrête net sur le
seuil et me contemple avec stupeur. Il me croyait à
Londres et attendait mon « messager ». Il répète
plusieurs fois : « Ça par exemple ! » Nous nous
embrassons avec force tapes dans le dos pour masquer notre émotion.

    Nous ne savons que dire tant notre bonheur est
intense. Nous sommes séparés depuis plus de deux
ans : à notre âge et dans ces circonstances, c’est une
vie. Il recule pour mieux m’observer, me scrute
comme s’il était pris soudain d’un doute sur mon
identité : « Tu n’as pas changé.

    — Toi non plus. »

    Il porte toujours les mêmes lunettes, qui donnent
à son visage une expression studieuse. Il a aussi
conservé son regard malicieux annonçant des gaudrioles ponctuées d’éclats de rire.

    Par où commencer quand tout est à dire ? Nous
sommes muets de bonheur. « Devine qui habite avec
moi ? me dit-il.

    — Sans doute un harem ! »

    Il rit bruyamment. Ce rire sonore ressuscite toute
notre amitié : la politique, les discussions passionnées, le cercle… « Mais non : Carquoy ! » C’est àmon tour de chavirer. Yves Carquoy est un de mes
amis d’enfance. Ma mère a été au couvent avec la
sienne. Au cours de notre adolescence, l’Action française nous a rapprochés dans une commune espérance et un combat ardent.

    Carquoy partage avec Blanquat le goût des filles
et avec moi celui de la politique et de la montagne.
L’été, il venait à Bescat et nous allions camper tous
les deux dans des lieux escarpés. « Que faites-vous à
Toulouse tous les deux ?

    — En 1940, il faisait son service militaire à
Montpellier. Après l’armistice, il a demandé son
transfert à Toulouse pour achever son temps. Les
nouvelles lois l’y autorisaient. Je l’ai rejoint par
hasard, après avoir été nommé délégué à la propagande du Maréchal pour la Haute-Garonne. »

    Bigre ! Ce doit être une « couverture » pour une
activité clandestine. Connaissant mon

Weitere Kostenlose Bücher