Alias Caracalla
d’une assemblée
souveraine aux mains des résistants serait à ses
yeux susceptible de s’opposer un jour au Général.
Raison qui l’a décidé à proposer la création d’une
assemblée sous sa direction.
Manuel tente de le rassurer avec son vieil argument : de Gaulle est contre le retour des partis et se
méfie des assemblées. * Rex lui rappelle qu’à la suite
des événements, le Général pourrait être conduit à
l’accepter à cause de sa situation précaire depuis
deux mois. Une telle assemblée serait une manière
de prouver aux Alliés l’adhésion des résistances. Pour
cette raison, * Rex estime que c’est au Général d’imposer une telle institution à la Résistance afin de la
contrôler.
Il interroge Manuel : « Comment neutraliser
*Francis ? » Le commandant lui propose d’envoyer
un télégramme au BCRA recommandant la vigilance
à son égard. Après l’accord de * Rex, Manuel rédige
le texte immédiatement et le lui soumet : Londres
ne doit prendre aucune décision « organique » sans
consulter * Rex. Manuel condamne en outre l’actionde * Francis comme incompatible avec l’autorité du
Comité de coordination de la zone sud et conclut :
« Voyage * Francis ne s’impose pas. »
Il profite de cette « exécution » pour confirmer
que les activités de Morandat sont suspectes et ont
failli aliéner la CGT. Il signale enfin que les contacts
de * Rex en zone nord sont très importants et que
Londres ne peut y envoyer que des personnalités de
premier plan.
En conséquence, Manuel suggère de laisser l’organisation des mouvements en zone nord aux mains de
*Frédéric, l’adjoint de *Rex. Après avoir relu le câble,
*Rex ajoute une phrase, au début : « Suis complet
accord avec texte de * Marnier [Manuel] ci-après. »
Témoin de la conversation ayant précédé le câble,
j’admire une fois de plus la manœuvre de * Rex.
*Rex évoque ensuite une circulaire du CAS (Comité
d’action socialiste), que je lui ai apportée ce matin,
accompagnée d’une lettre de * Villiers. Ce dernier lui
a adressé son texte daté de demain, 4 janvier, par
courtoisie, afin qu’il en prenne connaissance avant
tout le monde. Destiné aux représentants des mouvements, partis et syndicats ainsi qu’à ceux de la
France combattante, il propose d’organiser une réunion le 20 janvier autour d’un ordre du jour concernant la création du Comité exécutif de la Résistance
française.
Début décembre, * Rex avait expliqué au groupe
socialiste de * Froment le danger de cette initiative,
parallèle à celle de * Francis. Cependant, tous avaient
persévéré sans états d’âme. * Rex s’était résigné à prendre à son compte la réalisation de ce projet, à condition qu’il soit créé et contrôlé par le Général.
Une fois de plus, il demande à Manuel (négociateur-né, devenu une sorte d’adjoint politique de * Rex)d’intervenir auprès des socialistes du CAS pour
annuler la réunion du 20.
« Je ferai mon possible, lui répond Manuel, mais
les socialistes résistants sont d’abord des résistants ! D’autant qu’ils sont soutenus par Léon Blum,
dont de Gaulle a besoin. Je n’ai pas de conseil à
vous donner, mais je me demande si ce n’est pas le
moment de brusquer les choses en annonçant, par
une circulaire analogue à celle du CAS, la création
d’un “conseil politique” par la France combattante.
Faites comme eux, expédiez-leur un manifeste ! Le
général de Gaulle choisira. »
Il ajoute : « En tout cas, comptez sur moi pour
appuyer votre projet à Londres. » * Rex ne laisse rien
paraître : « À votre retour, je vous communiquerai
le texte. »
Je rentre dans ma chambre pour coder le télégramme de Manuel et, sans le faire taper par * Mado,
l’apporte à Cheveigné en fin d’après-midi.
Mardi 5 janvier 1943
Les aléas de la clandestinité
*Rex achève son petit déjeuner lorsque je sonne. Il
est tendu : « Elle a commis une énorme bêtise. »
Il désigne du doigt la cloison derrière laquelle vit
Mlle Labonne, puis ouvre la porte de l’armoire à
glace : « Cette idiote a fait le ménage et a jeté un
vieux paquet de gauloises dans lequel j’avais laissé
trois ou quatre cigarettes. »
Je suis stupéfait par la violence de sa réaction
pour si peu. Remarque-t-il ma surprise ? Il m’explique, toujours vindicatif, qu’elle a pris l’initiative
inacceptable d’ouvrir son armoire :
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