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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
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désormais à une autre histoire.

    J’ignore presque tout des hommes et des péripéties qui ont imposé l’armistice à Bordeaux et des
événements survenus par la suite. J’ai appris, il y a
quelques jours, que le gouvernement s’est installé à
Vichy. Le gouvernement de la France est, pour nous,
à Londres : il s’appelle de Gaulle. Pourtant, presque
aucun d’entre nous n’a entendu l’appel du 18 Juin
du général de Gaulle.

    Aron semble connaître le Général, du moins son
œuvre. Il nous révèle que ce spécialiste des blindés
était le seul à comprendre les exigences de la guerre
moderne, ignorées par les chefs qui ont gagné la
Grande Guerre, à commencer par Pétain et Weygand,
responsables de l’impréparation de cette guerre et
du désastre.

    La réunion de l’Assemblée nationale à Vichy, le
10 juillet, a voté les pleins pouvoirs à Pétain. Le lendemain, il a aboli la République, ce qui m’a rempli
de joie.

    Dimanche 21 juillet 1940

     

    Corvée de charbon

    Une des premières corvées dans le camp est celle
du charbon. Nous devons le charger dans un entrepôt à l’extérieur, puis le livrer aux cuisines.

    Lorsque Saulnier demande des volontaires, toute
la chambrée lève lebras 4 . Je suis choisi, avec deux
camarades. Toute la journée, nous sommes occupés
à cette tâche inconnue. À 5 heures, pour la soupe,
nous ressemblons à des ramoneurs.

    Avec mes deux acolytes, boute-en-train de l’arsenal
de Brest, nous sommes commandés par le caporal-chef Yvon Morandat, rescapé de Norvège. Comme
ses camarades ralliés à la légion de Gaulle, c’est un
mythe vivant. Réserviste comme nous, il révèle un
comportement peu militaire, se faisant obéir grâce
à son humeur espiègle, qui nous enchante.

    Morandat parle librement de tout, nous questionne
sur nos antécédents, curieux surtout de nos opinions
politiques. Mes camarades sont socialistes, partisans du Front populaire. L’un d’eux est un ardent
militant de laSFIO 5 . Depuis Laborde, je suis vacciné
contre ces horreurs.

    Pendant que nous chargeons le charbon dans un
camion, le caporal-chef les écoute raconter leurs souvenirs de grèves et de combats en faveur des congés
payés, conquis grâce au Front populaire. Vient montour. Morandat se montre surpris lorsque j’avoue
que j’appartenais aux Camelots du roi et que Charles
Maurras était mon maître : « Pourquoi es-tu venu
ici, puisque l’Action française a rallié Pétain et que
Maurras est la caution du nouveau régime ? » Il
m’est facile de répondre à la première question :
« Je refuse l’esclavage des Boches. » Quant à ma
motivation réflexe, je n’ose évoquer l’« amour de la
patrie », par crainte du ridicule devant mes camarades de l’Internationale…

    Je ne connais l’engagement actuel de Maurras que
par bribes. Les informations de la BBC sont succinctes, et je n’ai encore jamais entendu prononcer
son nom accolé à celui de Pétain. L’affirmation de
Morandat est-elle exacte ? Fin juin, le consul de Vichy
l’a déjà affirmé. En tout cas, il n’est pas à Londres.
Ma première déception passée, Maurras demeure
mon guide. Par qui pourrais-je le remplacer ?

    « En tout cas, je suis sûr que Maurras était contre
l’armistice.

    — Je peux t’affirmer que lui et son équipe ont
emboîté le pas à Pétain et tirent à boulets rouges
sur de Gaulle et les Anglais.

    — Même s’il n’est pas à Londres, je sais que de
Gaulle est un de ses disciples. Et puis, pour préparer
le retour du roi, Maurras est sans doute plus utile à
Vichy qu’ici.

    — Il est possible que de Gaulle ne soit pas républicain, mais en tout cas il n’a jamais rien dit ni
écrit en faveur de la monarchie. »

    Manquant de munitions pour ce qui concerne les
opinions de De Gaulle, je ne réplique rien.

    Mes camarades ont arrêté de travailler et me considèrent avec une sorte de stupeur, comme si j’étais
un énergumène. Depuis que j’ai rejoint l’Angleterre,c’est ma première embardée politique. Jusque-là, je
n’ai guère mentionné mes opinions, sauf pour dénoncer les carences de la III e  République, la trahison
des parlementaires et l’incapacité des militaires, ce
qui n’est guère original. Tous, nous sommes d’accord
sur ce point. Au-delà de ce commun dénominateur,
chacun conserve ses opinions par-devers lui et ne
s’en ouvre qu’entre amis sûrs, comme je le fais avec
Philippe.

    J’ai

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