Alias Caracalla
Berntsen avait donné une traduction fidèle de l’ensemble du
discours, mais non le sens exact de la péroraison de Churchill.
Celui-ci avait évoqué les épreuves de la guerre « dont on ne saurait
prévoir aujourd’hui la fin, ni les duretés ». Il s’agissait donc du
« terme » de la guerre, non de son « issue ».
11 . Ce témoignage ne prétend pas résumer l’histoire du bataillon.
Ce sont les souvenirs de ce que j’ai vécu dans les limites de ma
section.
12 . Ce travail dura plus longtemps que prévu et fut interrompu
une semaine plus tard par le déménagement à Camberley. Ce fut
donc beaucoup plus tard que la lettre fut expédiée. Cependant, elle
arriva à bon port puisque, en 1993, au cours d’une campagne de
recherches aux Archives nationales, je découvris dans le dossier du
journal France une lettre du directeur Gombault dans laquelle il se
plaignait du ton de cette missive.
13 . Ancien ministre de l’Éducation nationale du Front populaire, emprisonné par Vichy. Il avait écrit dans sa jeunesse qu’il
« conchiait le drapeau français ».
14 . Il faut croire que notre revendication fut assez unanime dans
le bataillon puisque, quelques semaines plus tard, nos actes d’engagement furent modifiés par un ajout de l’intendant militaire,
M. Menguy. Ainsi du mien : « La signature de cet acte d’engagement a été retardée par des circonstances inévitables. Les services
du volontaire Bouyjou-Cordier Dany ont commencé le 1 er juillet
1940. »
15 . Afrique équatoriale française.
16 . Les jours suivants, l’expédition disparut des journaux et des
ondes. Il fallut attendre le 8 octobre pour en avoir un compte
rendu plus complet, dans le discours prononcé aux Communes par
Churchill : « L’opinion que nous avons de De Gaulle a été rehaussée par tout ce que nous avons vu de sa conduite dans des circonstances particulièrement difficiles. Le gouvernement de Sa Majesté
n’a pas la moindre intention d’abandonner sa cause jusqu’à ce
qu’elle soit devenue — comme en vérité elle deviendra — la cause
de toute la France. »
V
CAMBERLEY
26 septembre-30 octobre 1940
Jeudi 26 septembre 1940
Dîner d’apparat
Il ne doit pas y avoir grand monde ce soir à la
cantine : curieux de ce bourg inconnu, nous sortons
pratiquement tous. Adieu les bains chauds du soir
et la lecture au son de la radio !
Dès 5 heures, du fait de la proximité de
Sandhurst, l’élite militaire britannique irrigue
Camberley pour une joute d’élégance dans laquelle
rivalisent aussi bien les hommes de troupe que
les sous-officiers et officiers de toutes armes du
Commonwealth.
C’est un honneur pour nous d’être installés au
cœur du dispositif militaire de la Grande-Bretagne.
De plus, grâce à cette position exceptionnelle, la
bourgade compte un nombre impressionnant de
pubs, fish-and-chips et restaurants de toutes catégories, sans compter cinémas et dancings.
Pour fêter ce que je considère comme la première
étape vers le « front », j’invite Briant au restaurantde l’hôtel. Nous avons tout notre temps puisque,
partout, le dîner est servi à 6 heures.
Cette fois, le centre est proche de nos logis. Nous
profitons ainsi jusqu’à la dernière minute de l’animation de la cité. Il y a dans l’allure des garçons et
le regard des filles quelque chose qui ne trompe
pas : ici aussi c’est la guerre, camouflée sous des
dentelles.
En dépit de cette soirée d’exception, nous sommes au pied de notre paillasse lorsque, à 9 heures,
le lieutenant commence sa visite par le rez-de-chaussée : « Silence à l’appel, garde à vous ! » Ce
commandement familier a ce soir une curieuse
résonance dans les chambres minuscules où la carrure de rugbyman de Saulnier lui occasionne quelque gêne pour se mouvoir.
Vendredi 27 septembre 1940
La vie continue
En dépit du nouveau décor, nous jouons le même
rôle qu’à l’ordinaire. Le sergent Goudenove nous
réveille à 7 heures, mais le rassemblement des
groupes pour la gymnastique se fait dans la rue.
Nous courons sur le macadam, moins agréable que
la terre de Delville.
Le parcours d’aujourd’hui nous permet de découvrir les rues avoisinantes. Nous ne connaissons,
depuis hier, que la route nationale qui mène au
centre-ville. La toilette est sommaire : un long
lavabo en tôle planté au beau milieu du jardin,
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