Alias Caracalla
à
Brazzaville par le général de Gaulle, dans lequel il
annonce la création du « Conseil de défense de
l’empire ». Il l’a fait au cours d’une grandiose manifestation de fraternisation entre les armées alliées,la France libre, la Belgique et la Grande-Bretagne.
C’est notre première institution en forme de gouvernement :
Prenant acte du fait que les Français libres
constituent désormais l’unique recours de la
patrie, moi, leur chef, j’organise aujourd’hui un
Conseil de défense de l’empire. Ce Conseil exercera au nom de la France, sur tous les territoires
français qui combattent ou qui combattront,
tous les pouvoirs d’un gouvernement de guerre
[…].
Officiers français, soldats français, citoyens
français, des chefs infâmes sont en train de livrer
l’empire intact de la France. Debout et aux
armes !
Nous n’en avons pas fini avec les coups de théâtre.
À la suite de cette proclamation solennelle, de
Gaulle a publié une ordonnance sur les conditions
de l’exercice des pouvoirs publics. Son article 2 stipule que les pouvoirs dévolus au chef de l’État et au
Conseil des ministres seront exercés par de Gaulle,
assisté du Conseil de défense, formé par lui : « Ces
pouvoirs s’exerceront conformément aux dispositions législatives appliquées en France avant le
23 juin 1940. »
Une fois de plus, de Gaulle apporte la réponse
nécessaire à la clôture de cette semaine honteuse.
Mercredi 30 octobre
Projet misérable
Pétain, à la suite de l’entrevue avec Hitler, a prononcé aujourd’hui même un discours radiodiffusé
dans lequel il annonce un projet misérable confirmant que la capitulation a bien été une trahison. Le
voile est levé :
On a examiné la collaboration entre nos deux
pays. J’en ai accepté les principes. C’est avec
honneur et pour maintenir une unité de dix siècles dans le cadre d’une activité constructive de
l’ordre européen nouveau que je m’engage
aujourd’hui dans la voie de la collaboration.
En corollaire, il définit sa doctrine :
Supprimer les différences d’opinions, réprimer
les révoltes dans les colonies, c’est-à-dire les ralliements à de Gaulle .
Afin que les Français n’ignorent rien de ses intentions et de leur devoir, il conclut :
Je vous ai parlé comme un père, aujourd’hui je
vous parle comme un chef. Suivez-moi .
Ce discours est le second, après celui de l’armistice, dont je suis le témoin. Moins tragique que le
premier, il est — si possible — plus abject encore,
le premier engendrant le second.
Maurice Schumann, s’adressant aux Français,
déclare ce soir à la BBC : « Vous n’avez plus le
choix entre une paix honteuse et le combat. Vous
avez le choix entre le combat pour l’Allemagne et le
combat pour la France. »
Une fois de plus, Schumann et de Gaulle donnent
un accent héroïque à notre réaction spontanée.
Depuis cinq mois, une doctrine de la revanche s’élabore, qui fournit de justes arguments à nos passions.
VI
OLD DEAN
31 octobre 1940-4 août 1941
Jeudi 31 octobre 1940
Le bataillon dans ses meubles
Il n’y a qu’un mois que nous sommes installés à
Camberley lorsque le commandant Hucher nous
annonce notre départ pour un nouveau camp.
Pour être dignes de la tradition des chasseurs,
nous devons, une fois encore, laisser nos cantonnements à l’état neuf. Nous en avons l’habitude : c’est
la troisième fois depuis l’Olympia.
Après le récurage de Bryn-Teg et le nettoyage du
jardin, nous partons à pied vers Old Dean Camp, à
la sortie de Camberley, sur la nationale de Londres. Au bout de deux kilomètres, nous pénétrons
dans la forêt, non loin de la route. Dans une clairière desservie par un chemin de terre, un chantier apparaît, masqué jusque-là par l’épaisseur de
la forêt.
Au milieu d’un marécage de boue noire émergent
de nombreuses huts (cabanes) demi-cylindriques en
tôle ondulée. Chacune doit héberger les douze hommes d’un groupe. Le camp, en cours de construction, est installé sur un éperon dominant la forêt
qui s’étend à perte de vue.
Nous arrivons sous une pluie diluvienne. Les trois huts attribuées à la section Saulnier sont situées en
bordure du plateau, au nord du camp : ce sont les
plus exposées aux intempéries. Le contraste avec
notre arrivée à Delville est déprimant : reflet fidèle
de cet automne noyé.
Le réfectoire et la
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