Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain-Gilles Minella
Vom Netzwerk:
célérité. Sitôt l’élection terminée, on se précipite à Canterbury. Le samedi 2 juin au matin, Becket est ordonné prêtre par l’évêque de Rochester. Le lendemain, jour de la Pentecôte, « les évêques s’assemblèrent dans Canterbury, raconte Roger de Pontigny. S’y pressait aussi une foule d’abbés, de moines, de clercs et de grands avides d’assister à la consécration d’un aussi prestigieux archevêque et de bénéficier de ses prières et de ses bénédictions. Thomas lui-même s’y rendit, accompagné d’un grand nombre de religieux et de personnalités. Les évêques allèrent à sa rencontre avec les moines, le clergé et une foule immense de fidèles qui le reçurent avec un grand luxe d’honneur et une joie indescriptible. Mais Thomas ne s’attachait point à leurs témoignages d’allégresse unanime… Il s’avançait avec une grande humilité, les yeux mouillés de larmes, moins préoccupé de l’hommage qu’on lui rendait que du poids dont on allait le charger ».
    C’est donc un homme conscient de l’importance de la tâche et pénétré d’une sorte de spiritualité s’attachant à la fonction qui lui échoit, que le vieux cardinal Henri de Winchester consacre archevêque par l’onction et l’imposition des mains.
    Pour être entièrement valide, la consécration de Thomas doit être confirmée par le pape. Le nouvel archevêque envoie une ambassade auprès d’Alexandre III qui réside alors à Montpellier, chassé d’Italie par l’armée de Frédéric Barberousse. Le pape n’a aucune raison de refuser son consentement. Pour marquer son approbation, il envoie à Thomas le pallium, une bande de toile de laine blanche qui symbolise la reconnaissance de l’élection du nouvel archevêque et sa soumission à l’autorité apostolique.
    Le 10 août 1162, au cours d’une cérémonie dans la cathédrale de Canterbury, Thomas Becket pose solennellement le pallium sur ses épaules. Pour cette cérémonie, il a revêtu des ornements pontificaux mais il a conservé les pieds nus. Ce détail n’a pas échappé à ses biographes, car il est symbolique de la mutation profonde en train de s’opérer dans l’esprit de l’archevêque.
    Dans les semaines qui suivent, Thomas se dépouille de tous ses biens personnels qu’il distribue aux pauvres. Il renonce à la munificence qui était jusque-là sa marque, et décide d’adopter pour seul vêtement l’habit des moines augustins de Merton parmi lesquels il avait toujours choisi son confesseur : une robe noire descendant jusqu’aux pieds, coupée dans un tissu grossier, garnie de laine de mouton, avec, par-dessus, un surplis blanc, court et recouvert de l’étole. De plus, on s’apercevra à sa mort qu’il portait un cilice de crin sous sa robe. L’archevêque continue à nourrir ses invités avec raffinement, mais lui se contente le plus souvent d’un peu de pain et de vin. « Il prit l’habitude, nous dit Guillaume Fils Étienne, de consacrer aux aumônes le dixième de tout ce qu’il recevait, à quelque titre que ce soit. Chaque jour, agenouillé dans une humble cellule, il lavait les pieds de treize pauvres, en mémoire de Notre-Seigneur, puis il leur donnait un repas et quatre pièces de monnaie. […] Sa maison était toujours ouverte aux indigents et aux malheureux sans abri. L’hiver il distribuait des vêtements en abondance. »
    Thomas Becket ne fait pas les choses à moitié et ne connaît qu’un seul maître. Lorsqu’il est chancelier d’Angleterre, il étale les richesses à profusion au service de son roi, lorsqu’il devient archevêque de Canterbury il « tombe dans l’humilité » avec la même ostentation et le même excès, et ne connaît plus que le service de Dieu. Le chancelier était un chrétien sincère, l’homme d’Église vit une conversion absolue : « Dans son ordination, il reçut sous le signe visible du sacrement l’onction invisible de la grâce divine et, répudiant ce qui le rattachait au monde, se revêtit de Jésus-Christ. » Cette belle formule est de Guillaume Fils Étienne ; elle résume le nouveau Thomas, l’homme de Dieu.
    Vis-à-vis d’Henri, Thomas ne pouvait agir que d’une seule manière. Dès l’automne 1162, un clerc envoyé par l’archevêque traverse la Manche et rejoint le roi et la reine en Normandie. Il a pour mission de rendre à Henri II le grand sceau d’Angleterre. Thomas « démissionne » de ses fonctions de chancelier.
    La

Weitere Kostenlose Bücher