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Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain-Gilles Minella
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Becket.
    Le chancelier quitte le sol anglais sans doute vers le début du mois de mai 1158, quelques jours après le couronnement de Worcester, et débarque à la tête d’une suite de vaisseaux sur les côtes normandes. Les cales des navires regorgent de tout ce que le royaume peut produire de mieux, de plus spectaculaire et de plus fastueux. Pour Thomas, l’un des moyens de parvenir à convaincre le roi de France est de lui montrer combien il a affaire à un souverain riche et puissant. La diplomatie passe par l’intimidation et aussi la rumeur. Il veut que le roi soit averti, avant même son arrivée à Paris, de la munificence du cortège entourant le chancelier, que la foule soit éblouie, qu’elle en parle et que le bouche à oreille parvienne au Palais de la Cité. Pour cela, il n’a pas lésiné sur les moyens. On sait Thomas habitué aux largesses – sa réputation sur ce point n’est plus à faire – et face à l’enjeu de l’ambassade, il a eu carte blanche des souverains. À la richesse et la diversité du cortège accompagnant le chancelier, on comprend qu’il a fallu du temps pour préparer tout cela et qu’Henri et Aliénor avaient pris leur décision longtemps avant l’envoi de l’ambassade. Cela nous donne une indication sur l’importance qu’ils donnent à la mission confiée à Thomas. Selon toute probabilité, elle s’inscrit dans un vaste plan politique.
    Voyons maintenant le détail de ce cortège qui, par-delà les siècles, continue de nous fasciner. Le chancelier « était accompagné par environ deux cents cavaliers de sa maison, des hommes d’armes, des prêtres, des officiers de bouche, des serviteurs, des hommes armés, des fils de nobles et leurs troupes, tous exercés au métier des armes. Tous, ainsi que leur suite, resplendissaient dans des habits neufs, chacun selon son rang. Il avait vingt-quatre habits de rechange, presque tous destinés à être offerts et à rester outre-mer – Thomas comptait essentiellement s’en servir comme cadeaux aux prélats ou barons qu’il croiserait sur sa route –, des accessoires d’élégance, des peaux, des manteaux, des tapis, et toutes choses qui ornaient le sol de la chambre et le lit du chancelier à l’étape. Des richesses, des chiens et des oiseaux de toutes sortes, selon l’usage des rois, l’accompagnaient. Huit chars tirés chacun par cinq chevaux de même force et de même allure ; chaque cheval avait pour l’accompagner un jeune homme vêtu d’une tunique neuve et chaque char un conducteur et un gardien. Deux de ces chars transportaient uniquement des tonneaux de bière, décoction de grains fermentés que les Français trouvèrent délicieuse et qui est, en effet, une boisson très saine, limpide, de la couleur d’un beau cru, mais meilleure que le vin. La chapelle du chancelier avait son char propre ainsi que tout ce qui servait à la cuisine et au coucher. D’autres chars transportaient des vivres, des boissons, des linges, des tapis, des vêtements de nuit et toutes sortes d’impédiments. Douze chevaux de bât transportaient des coffres dont huit étaient chargés de vaisselle d’or et d’argent, de vases, de coupes, d’amphores, de tasses, de bassins, de plats divers, de salières, de cuillères, de couteaux, d’ustensiles de cuisson. D’autres coffres contenaient des pièces d’argent en quantité suffisante pour faire face aux dépenses quotidiennes de la troupe et faire des dons en route. Un cheval portait les coffres de livres, qui marchait devant les autres. Chaque cheval avait son palefrenier. Quelques chars tiraient derrière eux ou transportaient des chiens d’allure féroce, qu’on aurait pu prendre pour des ours ou des lions. Et même, sur chaque bête de somme, on remarquait un singe – une petite pointe d’exotisme {32}  ! ».
    Le cortège entre dans Paris par une belle journée de juin. Pour l’occasion, les Parisiens venus assister à l’arrivée de l’ambassade anglaise eurent droit à une mise en scène particulière. Le cortège s’ouvrait par les deux cent cinquante pages et écuyers de la troupe, rangés par groupes de seize, rythmant leur marche par des chants anglais et gallois. Ils virent ensuite passer la vénerie composée de chiens de chasse tenus en laisse et, sur les bras des fauconniers, de vautours, éperviers et autres faucons, tous plus superbes les uns que les autres – on sait la passion d’Henri et Thomas pour la chasse au faucon, on peut être

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