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Apocalypse

Apocalypse

Titel: Apocalypse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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serrure puis y colla son oreille. Elle entendit distinctement la conversation des deux adultes, comme si son père lui parlait directement.
    — … et après je me suis lavé les mains dans la cuisine. Son corps est dans la citerne du jardin. J’ai remis des pierres et de la terre. On ne voit plus rien. Je te le redis, il avait perdu la tête. C’était la seule solution. Personne ne doit jamais savoir.
    — C’était un de tes frères !
    — Marie, c’était un vieil homme à bout de souffle. Mort de peur. Il m’a vendu à la police. C’était ça ou ils l’expédiaient en Allemagne. Il leur a donné mon adresse à Paris et leur a dit que je m’étais installé dans le coin. Ils doivent être en train de dévaliser l’appartement de la rue Vivienne. Quand il m’a annoncé ça, j’ai perdu la tête et je l’ai poussé contre la cheminée. Il s’est rompu le cou.
    Marie s’était assise sur l’une des chaises, prostrée. Le docteur Lévy marchait de long en large dans le salon.
    — La seule chose que je ne comprends pas, c’est comment ils sont parvenus jusqu’à lui.
    — Un traître, résonna la voix de Marie dans le salon.
    — Un Judas parmi nous ?
    — Comment veux-tu expliquer sinon ?
    Le docteur prit son manteau.
    — Je ne peux pas prendre le risque d’être arrêté. Il n’y a plus que moi qui connais le secret. Je vais tenter de passer en Suisse avec ma famille dès que je peux. Je mettrai le dessin en lieu sûr.
    Marie s’était levée pour le serrer dans ses bras.
    — Brûle ce dessin, André, comme ça tout sera oublié. Il ne restera aucune preuve. Ils ne pourront plus te faire de mal.
    André l’embrassa sur le front.
    — Je ne peux pas. Un jour, quelqu’un sera digne de le posséder. Souviens-toi des dernières paroles de Bérenger sur son lit de mort.
    —  Et in Arcadia ego… Je sais. Cette phrase me hantera jusqu’au dernier jour. Veux-tu de l’argent pour ton départ en Suisse ? Il m’en a laissé plus qu’il ne m’en faut.
    Derrière la porte, Sarah tira la manche d’Hannah et haussa la voix.
    — C’est pas bien, tu ne dois pas écouter à la porte. Si papa te voit, il va être en colère.
    — Tais-toi ! Tu vas me faire prendre.
    Le docteur s’arrêta de parler et tourna la tête vers la porte. Hannah posa à nouveau son œil sur le trou de la serrure. Elle poussa une exclamation et releva la tête.
    — Il vient. Vite, à l’entrée.
    Les deux fillettes bondirent vers le fond du vestibule. Leur père ouvrit la porte du salon dix secondes plus tard, alors qu’elles faisaient semblant de s’habiller. Il était suivi par la vieille dame qui marchait lentement, appuyée sur sa canne.
    — Les filles, on s’en va. Saluez Marie.
    — Attends, André. Avant de partir. Prends une photo avec l’appareil. J’aimerais garder un souvenir de votre passage.
    — On n’a pas le temps, Marie, vraiment !
    — Je t’en prie, supplia la femme voûtée. C’est peu de chose. C’est pour mon album, c’est tout ce qu’il me reste : des souvenirs et des photos.
    Il hésita un instant et prit l’appareil qui se trouvait contre le portemanteau. Il installa le trépied, régla l’objectif, vérifia que le flash marchait.
    — Venez près de moi, les enfants, dit Marie. Vous serez dans l’album à côté des princesses et des rois.
    Hannah se précipita la première, suivie de sa sœur. Elles se mirent chacune du côté de Marie et tentèrent de sourire. La vieille dame avait posé ses mains autour de leurs épaules. L’éclair du flash les aveugla.

34
     
    Rouen
    29 mai 1430
     
    Le printemps s’attardait sur la ville. Un vent chargé d’effluves remontait la Seine et gagnait les vieux quartiers. Dans les vergers, l’odeur lente des fruitiers montait avec le soir et enveloppait jusqu’au clocher de la cathédrale. Accoudé à un balustre, maître Roncelin, les yeux fermés, humait ces senteurs avec une joie d’enfant. Aveugle à la nuit qui tombait, sourd au bruit de la ville, il respirait le parfum de la terre. Un moment, il se crut au paradis, loin de la fureur des hommes et des soubresauts de l’histoire. Mais une odeur, âcre et imprévue, le fit sursauter. Il ouvrit les yeux et aperçut une fumée lourde et grise qui venait de la place du Vieux-Marché. Un frisson le saisit et le fit choir brutalement de son rêve. Sous le nuage qui montait à l’horizon, un rideau de flammes crépita. Effrayé, Roncelin se signa : il venait de

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