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Au bord de la rivière T4 - Constant

Au bord de la rivière T4 - Constant

Titel: Au bord de la rivière T4 - Constant Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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qu’est-ce qu’il peut ben me vouloir ? murmura-t-il entre ses dents en sortant sur la galerie pour l’accueillir.
    Eudore Valiquette était un petit homme âgé d’une cinquantaine d’années plein d’allant et toujours impeccablement habillé. On remarquait surtout chez lui sa pomme d’Adam saillante et ses manières un peu doucereuses. Il était venu s’installer dans l’ancienne maison d’un neveu, dans le rang Saint-Paul, quelques mois auparavant. L’homme de loi supposément à la retraite ne plaisait pas beaucoup au fils de Baptiste Beauchemin, qui lui trouvait un air faux. Il comprenait difficilement comment ce parfait étranger était parvenu à s’imposer si rapidement au point d’occuper la présidence de la fabrique et le poste de conseiller municipal. Un fait était certain : il faisait régulièrement du démarchage pour inciter les cultivateurs de la région à lui confier leurs économies pour les faire fructifier. C’était pour le moins étonnant pour un notaire qui se disait à la retraite.
    — Bonjour, monsieur le notaire, le salua poliment Donat. Qu’est-ce que je peux faire pour votre service ?
    — Rien, mon jeune ami. Je fais juste le tour des marguilliers pour leur annoncer qu’il va y avoir une réunion à sept heures, ce soir, à la sacristie, dit l’homme de loi sans se donner la peine de descendre de voiture.
    — Normalement, elle devrait pas être mardi prochain ? s’étonna Donat.
    — Oui, mais il y a quelque chose de spécial. Comme presque tous les jours, je me suis arrêté sur le chantier du presbytère, annonça Eudore Valiquette. J’ai parlé avec Dussault, le contremaître. Il m’a dit que tout l’ouvrage va être fini vendredi. Ses hommes ont fini de peinturer l’intérieur. En plus, il y a plus rien à faire dans la grande remise et dans l’autre bâtiment à côté.
    — C’est toute une nouvelle, ne put s’empêcher de dire Donat. J’espère que monsieur le curé est content.
    — C’est le moins qu’on puisse dire.
    Josaphat Désilets s’était souvent plaint auprès de monseigneur Laflèche, arguant qu’il était inhumain d’habiter la sacristie où il gelait l’hiver et jusqu’au début du printemps, au point que l’évêque avait lancé un ultimatum aux paroissiens de Saint-Bernard-Abbé de lui construire un presbytère et quelques bâtiments de service sous peine de leur retirer leur prêtre. Et même si la paroisse était endettée au-delà de ses capacités, il avait fallu se plier aux exigences de l’évêque qui avait tout de même accepté de garantir le prêt nécessaire. Une grande partie du problème était de gérer la folie des grandeurs du curé de Saint-Bernard-Abbé, qui ne tenait aucun compte des restrictions dues à une bourse vide.
    Dès l’ouverture du chantier au début du mois d’avril, le temps inclément avait tant ralenti les travaux que le prêtre se sentit dans l’obligation de passer le plus clair de ses journées au milieu de la demi-douzaine d’ouvriers qu’il ne se retenait pas de houspiller. L’homme de taille moyenne au nez pointu chaussé de lunettes cerclées de métal était vite venu à bout de la patience de Dussault, le contremaître, qui avait fini par le menacer de suspendre le travail dès qu’il le verrait sur le chantier. Josaphat Désilets, fou de rage, avait dû alors se cantonner durant des semaines sur le parvis de la chapelle pour surveiller de loin les travailleurs. Chaque fois qu’il avait eu l’idée d’une modification, Dussault s’était borné à lui répondre sur un ton rogue qu’il devait passer par le président de son conseil de fabrique. C’était l’ordre qu’il avait reçu de Bélisle, le maître d’œuvre et architecte.
    — Les foins sont commencés à matin, déclara Donat au notaire. Je sais pas si les autres marguilliers vont être capables de venir à cette réunion-là.
    — T’es le dernier que j’avertis, fit le notaire. Hyland, Ellis et Meilleur m’ont dit qu’ils vont y être.
    — Si c’est comme ça, je vais y être moi aussi.

    Ce matin-là, après le train, Liam, son bras droit toujours plâtré, trouva sa femme en train d’aiguiser la faux dans la remise. Il faisait beau et chaud et on ne voyait pas un seul nuage dans le ciel.
    — Veux-tu ben me dire ce que tu fais là ? lui demanda- t-il.
    — Comme tu vois, j’aiguise la faux.
    — Voyons donc, t’es pas pour faucher.
    — Je vois pas pourquoi je le ferais pas,

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