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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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suffisants. Quelque temps après je rédigeai donc un document, pour lequel je réussis à obtenir, le 21 mars, la signature de Hitler. Cette pièce stipulait que « les intérêts de l’économie nationale allemande [devaient] être subordonnés aux nécessités de la production d’armements ». Dans le système autoritaire de l’Allemagne d’alors, ce décret de Hitler équivalait aux pleins pouvoirs dans le domaine de l’économie.
    Comme tout ce dont il vient d’être question, la forme juridique de notre organisation portait la marque de l’improvisation et de l’imprécision. Mes attributions et le domaine de mes compétences n’étaient pas clairement délimités ; il me semblait d’ailleurs que cela n’était pas utile, et je m’arrangeai pour qu’on n’y change rien.
    Cela nous permit d’adapter nos compétences aux cas qui se présentaient, de les définir en fonction du but à atteindre et de les ajuster à l’impulsivité de nos collaborateurs. Mes pouvoirs presque illimités, pour lesquels la sympathie de Hitler à mon égard était la meilleure des garanties, me conféraient des prérogatives que je ne tenais pas à voir définies juridiquement : il en aurait résulté à coup sûr des conflits de compétences avec d’autres ministres, sans qu’il soit possible de parvenir à un accord satisfaisant.
    Certes, cette confusion dans la répartition des rôles était un grave défaut de la méthode de gouvernement de Hitler. Mais je m’en accommodai fort bien, aussi longtemps que cela me fut profitable et que Hitler signa tousles décrets que je lui soumettais. Toutefois, quand il cessa de m’accorder les yeux fermés tout ce que je réclamais – ce qui ne tarda pas à se produire pour certaines questions –, je fus réduit à l’impuissance et condamné à recourir aux subterfuges.
    Le soir du 2 mars 1942, un mois après ma nomination, j’invitai les architectes qui travaillaient à la transformation de Berlin, à un repas d’adieu au restaurant Horcher. « Celui qui résiste contre quoi que ce soit par la force finit toujours par être vaincu ! leur dis-je dans une brève allocution. J’éprouve une curieuse impression à la pensée qu’avec mon nouveau travail je ne suis pas du tout dans l’inconnu, alors qu’au premier abord il m’a semblé si différent de ce que je faisais précédemment. Mes études supérieures m’ont appris qu’il faut se consacrer à fond à une tâche, si l’on veut tout comprendre. En ce moment je m’occupe spécialement des chars, parce que cela me permet de me familiariser avec beaucoup d’autres domaines. » En homme prudent, continuai-je, j’avais établi mon programme pour deux ans. Mais j’espérais pouvoir revenir parmi eux avant ce terme. Plus tard, mon travail pour l’armement me profiterait : c’est à nous, les techniciens, qu’il incomberait de résoudre les problèmes de l’avenir. « Mais à l’avenir, m’écriai-je, non sans quelque exaltation, c’est l’architecte qui dominera la technique  4   »
    Désormais investi des pleins pouvoirs par Hitler, ayant apaisé Göring, je pus entreprendre de mettre sur pied le système que j’avais esquissé dans mon organigramme, et qui consistait à accorder une large autonomie à l’industrie. C’est dans la mise en œuvre de cette organisation qu’il faut chercher – on considère aujourd’hui le fait comme certain – l’explication de la rapidité surprenante avec laquelle la production d’armements augmenta. Pourtant les principes de cette organisation n’étaient pas nouveaux. Déjà le Feldmarschall Milch et Todt, mon prédécesseur, avaient adopté la formule consistant à confier la direction de certains secteurs de l’armement à d’éminents techniciens provenant des grandes entreprises de l’industrie. Cette idée n’était pas une découverte du D r  Todt : en fait, le véritable inventeur de l’ « autonomie de l’industrie » était Walther Rathenau, le grand organisateur juif de l’économie de guerre allemande pendant la Première Guerre mondiale. Il avait découvert que si les entreprises échangeaient leurs connaissances techniques, si on opérait une division du travail entre les usines, et si on normalisait et standardisait la fabrication, la production pouvait faire un bond spectaculaire. Cette découverte l’avait amené dès 1917 à énoncer le principe selon lequel, en réalisant ces conditions, on pouvait « doubler la

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