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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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tableau d’un avenir éloigné où l’on pourrait mettre au point et exploiter une fusée pour le trafic postal entre les États-Unis et l’Europe. Aussi naïfs que désinvoltes, ils s’abandonnaient à leurs rêves et avaient laissé exécuter par un illustré des dessins débordants d’imagination. Lorsque Hitler me rendit visite à Klessheim et me traita avec des marques étonnantes de prévenance, je profitai de l’occasion pour obtenir la libération des détenus. Mais il fallut attendre une semaine avant que cette promesse ne fût suivie d’effet. Six semaines après, Hitler disait encore, plein d’amertume, combien il lui en avait coûté de m’accorder cette faveur. Le procès-verbal de la conférence du Führer du 13 mai 1944 note que Hitler me promit simplement « au sujet de l’affaire B, que l’intéressé serait à l’abri de toute poursuite pénale aussi longtemps qu’il me serait indispensable, aussi sérieuses que puissent être les conséquences générales que cette mesure entraînerait ». Himmler avait pourtant atteint son but : à partir de ce moment, les membres les plus importants de l’état-major des fusées ne se sentirent plus à l’abri d’une intervention arbitraire de sa part. Car après tout, ils devaient bien se douter que je ne serais pas toujours en mesure de les faire libérer rapidement.
     
    Depuis longtemps déjà, Himmler s’efforçait d’édifier un konzern économique dépendant de la SS. Hitler, me semblait-il, s’y refusait et je l’appuyais. Peut-être était-ce là une des raisons du comportement étrange que Himmler adopta pendant ma maladie. C’est qu’il avait réussi, pendant ces mois où j’étais malade, à convaincre enfin Hitler qu’une grande entreprise économique SS présentait de nombreux avantages et, au début de juin 1944, Hitler me demanda de soutenir la SS dans ses efforts pour édifier un empire économique qui comporterait à la fois l’industrie des matières premières et les industries de transformation. Il justifia cette exigence en invoquant des arguments assez discutables, prétendant que la SS devait être assez puissante pour pouvoir se défendre, quand il ne serait plus là, par exemple contre un ministre des Finances qui voudrait lui couper les vivres.
    Ainsi, ce que j’avais craint au début de mon activité de ministre était arrivé. Certes, je pus obtenir de Hitler l’engagement que les usines de Himmler « seraient soumises au même contrôle que les autres usines travaillant pour la production d’armement et de guerre », afin d’éviter « qu’une partie des armes de la Wehrmacht ne devienne autonome, alors que je m’étais efforcé au cours de ces deux années de travail de réunir l’armement des trois autres armes en une organisation unique 20   ». Hitler me promit de m’appuyer auprès de Himmler, mais j’avais parfois à cette époque de sérieux doutes sur la possibilité qu’il avait d’imposer ses vues. Himmler avait été incontestablement informé de cet entretien, lorsqu’il me pria de venir le voir dans sa maison de Berchtesgaden.
    Certes, le Reichsführer SS semblait parfois un esprit chimérique dont les élucubrations paraissaient ridicules même à Hitler. Mais il était aussi et en même temps un réaliste parfaitement objectif, qui savait exactement quels étaient les buts politiques fort ambitieux qu’il poursuivait. Lors des entretiens, il avait une attitude aimable et correcte, légèrement forcée, mais il ne se montrait jamais cordial et veillait toujours à ce qu’un témoin de son état-major fût présent. Il avait le don, rare à l’époque, d’écouter avec patience les arguments de ses interlocuteurs. Au cours de la discussion, il donnait souvent l’impression d’être mesquin et pédant, pesant longuement et soigneusement ses paroles. Il lui était manifestement indifférent de donner ainsi l’impression de manquer d’agilité ou même de moyens intellectuels. Son bureau travaillait avec la précision d’une machine bien huilée, ce qui était probablement le reflet de son manque de personnalité, toujours est-il que j’avais à chaque fois l’impression que son caractère falot se retrouvait dans le style parfaitement objectif de son secrétariat. Ses secrétaires, jeunes mais nullement jolies, étaient singulièrement zélées et consciencieuses.
    Himmler me présenta un projet élaboré et ambitieux. Pendant ma maladie, la SS, en dépit de toutes

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