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Au pied de l'oubli

Au pied de l'oubli

Titel: Au pied de l'oubli Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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qu’elle
     remplit d’eau et mit le tout à bouillir sur la cuisinière électrique.
    — Assis-toi avec moi, Jeanne-Ida. On va pouvoir jaser tranquille pendant que
     j’épluche les patates, proposa Mélanie. Nos fils grouilleront pas, c’est l’heure
     de Bobino.
    Bernard et Dominique collés contre lui, un peu somnolents après leur promenade
     en traîneau, Timmy écoutait avec ravissement l’émission de télévision pour
     enfants.
    — Bonjour les tout-petits, dit l’animateur habillé en vagabond, saluant de son
     chapeau melon.
    — Bonjour Bobino. Bonjour Bobinette. Bonjour, bonjour ! lui répondit
     Timmy.
    Jeanne-Ida avança une chaise berçante près de la table et, avec lassitude, y
     prit place. Elle se frotta les tempes. Les derniers jours d’une grossesse sont
     si difficiles à supporter.
    — Le rire de cette marionnette m’énerve ! se plaignit-elle après que dans le
     petit écran Bobinette se fut esclaffée.
    Mélanie sourit.
    — Nos maris devraient être de retour bientôt, fit-elle remarquer en regardant
     l’heure.
    — Ils sont mieux de tenir leur promesse pis de rentrer avant la noirceur.
    — Mon Pierre était ben excité de visiter la ferme expérimentale.
    — Pas autant que Jean-Marie de l’embarquer sur son nouveau Ski-doo !
    — Tu me paierais cher pour monter sur cette bebitte à neige,
     dit Mélanie.
    — Jean-Marie jure que tout le monde va vouloir en avoir un. Ça faisait des mois
     qu’il l’avait commandé. C’est ben certain que c’est plus pratique que d’atteler
     une carriole pis un cheval. Les chemins l’hiver, en auto, c’est pas de
     service.
    — Ça m’a plus l’air d’un jouet que d’autre chose. Nos maris ressemblaient à
     deux gamins quand ils sont embarqués dessus.
    — C’est Jean-Marie tout craché ça. Il peut être sérieux comme le pape pis te
     sortir des grands discours ou se comporter comme un enfant. J’ai jamais vu un
     homme jouer autant avec son petit gars. Moi mon père, tu te souviens Mélanie, on
     en avait tous tellement peur. Il rentrait de l’étable pour venir sacrer après
     nous autres, pis il disait plus un mot de la soirée.
    — Mononcle était pas évident... acquiesça Mélanie.
    — Je sais même pas si j’ai eu de la peine quand il est mort.
    Mélanie fit son signe de croix.
    — Ça porte malheur, dire des choses de même !
    — Ma peureuse de cousine, tu changes pas. En tout cas, Jean-Marie pis moi on
     est bien assortis question de paternels.
    — Quand je pense que son père Georges a repris contact avec lui.
    — J’ose pas trop en parler devant Jean-Marie. Il le montre peut-être pas, mais
     cette visite l’a ben chamboulé.
    — J’aurais donc aimé être là pis voir les retrouvailles entre ces
     deux-là.
    — C’était loin d’être les grandes embrassades.
    — J’imagine, après tant d’années.
    — Je sais même pas tout ce qu’ils se sont dit, je suis allée dans ma
     chambre.
    — Moi, j’aurais écouté à la porte !
    — Que c’est tu penses que j’ai fait !

    — Ouais ben c’était vraiment impressionnant, dit Pierre en sortant d’une des
     bâtisses de la ferme expérimentale.
    Jean-Marie sourit de satisfaction.
    — Nous sommes pas mal fiers de ce nouveau laboratoire.
    — Je comprends. Jamais je me serais attendu à ça. Aucun rapport avec une ferme
     normale.
    Jean-Marie enfila ses grosses mitaines de cuir.
    — Prêt pour une bonne marche ?
    Leur visite les ayant menés jusqu’aux derniers bâtiments, ils devaient remonter
     à pied une longue allée de neige grattée pour retourner à la motoneige restée à
     l’entrée de la ferme.
    Pierre cala son chapeau de poil sur ses oreilles.
    — Une promenade de santé m’a jamais fait peur, rétorqua Pierre en ajustant son
     pas à celui de son cousin.
    La claudication de Jean-Marie ralentissait leur marche. Côte à côte, en cette
     fin d’après-midi d’hiver au soleil déclinant si rapidement, les deux hommes
     semblaient flâner.
    — Ce n’est pas de l’agriculture de subsistance qu’on fait ici, expliqua
     Jean-Marie. On expérimente pour être plus productifs. On teste de nouvelles
     variétés céréalières, l’insémination artificielle...
    Au souvenir des tubes de sperme de taureau, gêné, Pierre baissa les yeux.
    — Je savais même pas qu’on pouvait remplacer la nature...
    Jean-Marie partit à rire.
    — C’est à peu près le commentaire de papa quand je

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