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Au temps du roi Edouard

Au temps du roi Edouard

Titel: Au temps du roi Edouard Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sackville-West
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de soie et les tendait autour de la jambe. Puis, sa mère se levait, et, debout, en chemise, attendait que Button ait entouré ses hanches et sa fine taille du corset de coutil rose ; la femme de chambre fermait le busc de devant, fixait les jarretelles, puis se mettait au laçage, commençant par la taille et voyageant graduellement de haut en bas, jusqu’à ce qu’elle ait atteint les proportions voulues. Les lacets de soie et les ferrets volaient entre les doigts agiles de la soubrette, aussi rapides que ceux d’un pêcheur qui raccommode son filet. Puis on plaçait les coussinets de satin rose sur les hanches et sous les bras, pour accentuer encore la finesse de la taille. Puis la culotte, puis le jupon, qu’on étendait en auréole sur le parquet et dans lequel Lucie, perchée sur ses hauts talons, entrait, pour que Button le remonte jusqu’à la taille et l’attache. Enfin, Button lui jetait sa robe de chambre sur les épaules.
    Viola avait deviné juste, car, à l’instant même, la porte s’ouvrit et la duchesse entra.
    — Eh bien ! avez-vous fini cette table ? Lisez tout haut. Je n’entends rien. Oui, ça va mieux. Je suis désolée, Sébastien, mais il faut que vous subissiez encore la vieille Octavia Hull. Allons donc ! Elle est très amusante quand elle n’a pas pris trop de drogues. Ce soir elle sera très bien, parce qu’elle aura peur de perdre son argent avec sir Adam. Wacey, allez placer les cartes sur la table. Et vous aussi, Viola. Il y a trop de monde dans cette chambre… Comment ?… Bon… Restez jusqu’à ce que je sois habillée, si ça vous fait plaisir… Button, je suis prête à mettre ma robe. Faites bien attention. N’accrochez pas les agrafes dans mes cheveux. Sébastien, retournez-vous pendant que je retire mon peignoir. Allez-y, Button.
    Button, ramassant les nuages de taffetas et de tulle, présenta le corsage ouvert à la duchesse, qui, enlevant son peignoir, plongea délicatement dans les flots de sa robe. Viola était éblouie par la blancheur des bras et des épaules de sa mère. Button, avec un soupir de soulagement, se mit à agrafer les innombrables crochets du dos. Mais Lucie ne tenait pas en place et se promenait à travers la pièce, traînant Button à sa suite.
    — Vous n’avez pas encore fini, Button ? Allons donc ! ce n’est pas serré. Bientôt, vous direz que je grossis…
    Lucie était fière de sa taille, qui, en réalité, était minuscule, et n’était passée, depuis son enfance, que de dix-huit à vingt pouces.
    — C’est seulement quand Votre Grâce se baisse, s’excusait Button.
    Car, à ce moment précis, Lucie se penchait sur son miroir pour faire bouffer ses cheveux.
    — Là, comme ça, dit la duchesse, en se baissant avec raideur pour prendre son plus gros rubis qu’elle essaya d’abord contre son épaule, puis qu’elle piqua dans le nœud de sa taille.
    Elle mit, ensuite, un haut collier de chien, fermé derrière par un large papillon de tulle blanc.
    — Sébastien, il faudra choisir une femme qui sache apprécier les bijoux, dit-elle, en attachant une boucle d’oreille, car un jour viendra, naturellement, où votre pauvre vieille maman sera obligée de tout donner à sa belle-fille, et nous n’aimerons pas cela, n’est-ce pas, Button ?…
    Maintenant qu’elle se sentait belle, elle avait retrouvé sa gaieté.
    — Enfin, nous nous y résignerons, pour la joie de voir une jeune mariée à Chevron. N’est-ce pas, Button ? N’est-ce pas, Wacey ? Ah ! oui ! c’est vrai, elle est partie s’occuper de la table… Vous et moi, Button, nous nous retirerons dans le domaine des douairières, et nous y vivrons modestement jusqu’à la fin de notre existence ; peut-être Sa Grâce nous invitera-t-elle à une garden-party. Hein, Sébastien, petit fripon, le ferez-vous, si votre femme le permet ?
    Lucie était redevenue elle-même, ajustant sa robe, fermant ses bracelets, poudrant sa gorge, – car elle était de celles qui aimaient la poudre, malgré la désapprobation de ses aînées, – et chacun, sauf Sébastien, répondait à ses sourires par des sourires radieux. Elle effleura de son mouchoir les lèvres de Sébastien.
    — Petit boudeur… Enfin, Sylvia Roehampton prétend que vous êtes encore plus séduisant quand vous boudez que lorsque vous êtes aimable… Maintenant,Viola, ma chérie, il faut que je me sauve. Embrassez-moi et allez vite vous coucher. Est-ce que je suis jolie ?
    — Oh !

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