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Au temps du roi Edouard

Au temps du roi Edouard

Titel: Au temps du roi Edouard Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sackville-West
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dans sa jalousie que dans ses principes ; ce n’est pas tant qu’il aimait Sylvia, mais que Sylvia était sa femme, lady Roehampton, et qu’elle portait son nom. Maintenant qu’il était remis du premier choc, il ne voyait plus en Sébastien un homme, mais un symbole. Et l’élément personnel diminuant, sa décision en devint plus précise.
    — Je ne supporterai plus de bêtises. (C’était le leitmotiv qui revenait sans cesse en son esprit.) Ma femme se conduira comme il le faut, ou elle cessera d’être ma femme. (C’était une autre phrase qu’il avait trouvée avec satisfaction pendant ces jours d’angoisse, et qui le réconfortait.)
    À la fin de la semaine, il était tout à fait convaincu que sa sévérité envers Sylvia ne s’adressait qu’à lady Roehampton.
    * * *
    Margaret vint compliquer la situation. Margaret avait rencontré un jeune peintre qui s’était épris d’elle, dont elle s’était éprise, et qu’elle voulait épouser. « Où a-t-elle pu rencontrer cet être-là ? » se demandait lady Roehampton, au désespoir, moi qui la croyais en sécurité avec Clemmie et Ernestine !… » Un jour était arrivée chez ses parents une autre Margaret, une Margaret radieuse, et qui plaidait sa cause avec une réelle inspiration. Cette excentricité de leur fille rapprocha beaucoup lord et lady Roehampton : Sylvia fut très reconnaissante à George de sa fermeté, et George oublia presque ses mortels griefs devant l’ardeur que mettait Sylvia à le soutenir. « Elle a encore quelques principes, songea-t-il ; elle n’a pas tout à fait oublié la décence. » Il était absolument impossible que Margaret épousât ce garçon. D’abord, c’était un enfant naturel, et il déclarait en riant qu’il ne pouvait présenter ses parents, ayant été abandonné sur les marches d’un hôpital dans un papier brun, avec le prénom « Adrien » épinglé à ses langes. « Mais, mon cher ami… », disait George, et bien qu’il s’interdît de terminer la phrase, il était clair qu’il voulait dire : « Vous ne pouvez cependant pas prétendre que cela suffit pour épouser notre fille !… »
    Margaret pleurait et lord Roehampton, qui l’aimait, en fut très malheureux. Comme beaucoup d’hommes, en pareil cas, il s’échappa et abandonna Margaret aux soins de Sylvia. Sylvia détestait les complications, surtout celles qui venaient contrarier ses projets ; mais elle se montra patiente avec la jeune fille, et, lui tapotant l’épaule, lui expliqua qu’il fallait faire certains sacrifices quand on était né dans un certain milieu.
    — C’est la rançon, Marguerite chérie, répétait-elle, et nous devons tous la payer sous une forme ou sous une autre. C’est terrible de devenir une déclassée 1 et vous le seriez si vous épousiez ce malheureux garçon… si charmant qu’il soit… s’empressait-elle d’ajouter. – Mais si cela m’est égal ? protestait la pauvre Margaret. – Songez à votre père et à moi, ma chérie ; cela nous briserait le cœur ; nous avons toujours eu tellement d’ambition pour vous. D’ailleurs, je croyais que le jeune Wexford… ? Voilà qui ferait un beau mariage, et nous serions tous si heureux ensemble. »
    À ce moment, on introduisit la duchesse de Hull, vieille, peinte, et pleine de dignité. « Qu’est-ce que j’apprends, Margaret ? Vous voilà fiancée à Tony Wexford ? Eh bien, je vous félicite ; on dit que son château est ravissant, et, après tout, vous n’êtes pas obligés d’habiter toujours en Irlande. »
    Ces réflexions amenèrent un nouveau déluge de larmes chez Margaret.
    — Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? Vous ne l’aimez pas ? Allons, allons, ma petite, cela viendra. Il ne faut pas laisser passer une si belle occasion, n’est-ce pas, Sylvia ?
    — Margaret prétend qu’elle veut épouser un peintre, dit Sylvia, en regardant sa fille avec compassion.
    — Quoi ! s’écria la duchesse, un peintre ? Quel peintre ? A-t-on jamais entendu chose pareille ? La fille de lady Roehampton épouser un peintre ? Mais non, mais non… Vous épouserez Tony Wexford, et nous verrons après ce qu’on pourra faire pour le peintre, ajouta-t-elle, en lançant à Sylvia un coup d’œil rapide.
    * * *
    Margaret, voyant qu’elle ne pouvait trouver d’appui chez ses parents, ne parla plus de son chagrin, et décida d’aller demander conseil à Viola. Elle ne savait pas au juste ce que penserait Viola.

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