Avec Eux...
lâinauguration.
Jâavais demandé à adopter un enfant, jâen avais le désir profondément ancré en moi, non pas parce que je ne pouvais pas en avoir, mais mon expérience avec Nicolas Hulot dâun enfant jamais né a dû renforcer cette conviction. Jâavais déjà un enfant biologique, Gregory, et je voulais absolument en avoir un autre, mais ne pas le faire, aller le chercher au bout du monde, pour donner un futur à un enfant sans destin. Jâen avais rencontré tellement, à travers mes incessants voyages et mes confrontations réitérées avec la misère et lâinjustice du monde. Jâai donc déposé une demande officielle à la DDASS, et on mâa informée quâil y avait quelques enfants possiblement adoptables au Cambodge. Bizarrement, je ne lâai pas demandé à Alain Deloche, que je connaissais pourtant parfaitement,mais je suis passée par un centre de nutrition tout à fait banal, et qui nâexiste plus par ailleurs. Ils mâont parlé dâun « petit enfant de huit mois qui a quelques petits problèmes ; il a des soucis avec une jambe qui ne fonctionne pas très bien, une peau qui parfois se transforme en peau de serpent ; câest un petit enfant qui ne va pas très bienâ¦Â ».
Câest un choix très lourd, un engagement profond que dâadopter un petit qui nâest pas parfait. Mais je lâattends cet enfant, câest décidé : je lâattends, et plus on me dit quâil va mal, plus je suis convaincue intérieurement que câest lui que je dois adopter (je le regrette dâautant moins désormais). On mâenvoie plusieurs photos de lui, mais elles sont impuissantes à me permettre de me rendre compte de sa condition réelle. Une jeune femme, lâune de mes assistantes, mâaide beaucoup dans ce passage vers cet engagement. « Si tu veux, me dit-elle, je vais au Cambodge, je vais le voir, je vais mâoccuper de lui et lui faire prodiguer les premiers soinsâ¦Â »
Alexandra, câest son nom, part donc pour le Cambodge. Je lui donne beaucoup dâargent, je lâinstalle dans un hôtel, et elle se rend tous les jours au centre de nutrition pour sâoccuper de mon futur enfant. Je ne pouvais pas quitter mon job pour une si longue période ; je ne pouvais pas « mâoffrir » ces fameux neuf mois quâil faudrait passer au Cambodge, le temps de gestation dâun enfant. Câest cela une adoption. La DDASS vous fait attendre au minimum le temps de la gestation, ce nâest pas un hasard, câest même presque obligatoire, et je ne leur en veux pas du tout, parce quâil faut bien réfléchir à tout cela, surtout si lâenfant naît dans votre cÅur et non pas dans votre corpsâ¦
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Alexandra part donc pour Phnom Penh. Elle lui fait profiter des soins que je peux financer, mais je lui demande de luifaire faire une prise de sang. Sâil avait eu le sida, sans doute aurais-je renoncé. Adopter un enfant condamné à mourir dans les mois qui allaient suivre, je nâen étais pas capable. Jâenvoie un échantillon de son sang à Alain Deloche qui en fait lâanalyse, et la réponse tombe : il nâa pas le sida, il nâest pas séropositif. Alexandra reste quelque temps là -bas, tandis que je fais toutes les démarches administratives nécessaires en France, jusquâà ce quâenfin on mâinforme que je peux avoir cet enfant, MON enfant. Je pars, mais il manque encore quelques papiers. Il manque toujours un tampon, un papier, une signature⦠Je reviens en France seule, Alexandra, mon assistante et amie, reste là -bas, près de lui.
Et puis, pour ajouter un nouvel obstacle sur mon chemin escarpé, survient un incident qui nâa rien à voir avec lâadoption. Un incident dâordre politique : le Premier ministre du Cambodge, qui sâappelle Hun Sen, est victime à ce moment-là dâune tentative dâassassinat, initiée par le neveu de Norodom Sihanouk. Hun Sen part se réfugier dans sa résidence privée, il bloque tout ce qui concerne les affaires courantes. Les rapports avec lâétranger sont le dernier de ses soucis, quant à lâadoption internationale, ça passe en dernière position sur sa liste de priorités !
à ce
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