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Azincourt

Azincourt

Titel: Azincourt Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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comprendre.
    — Si tu veux, ma fille, tu peux
partir !
    Il désigna vaguement le sud et fut
récompensé par une grimace renfrognée et un déluge de paroles en
français ; il en déduisit que Mélisande voulait rester avec lui. Et elle
resta, mais sa présence était autant un souci qu’un réconfort. Hook ne savait
guère s’il pourrait fuir la campagne française, et quand bien même il
n’entrevoyait aucun avenir. Il pria saint Crépinien en espérant que le martyr
l’aiderait quand il serait en Angleterre. S’il y arrivait. Mais le saint resta
coi.
    Cependant, il leur envoya un prêtre,
le curé* d’une paroisse des bords de l’Oise, qui les trouva endormis
sous un saule et les mena chez lui, où sa femme les nourrit. Le père Michel
était un homme aigri et morose, mais il les prit en pitié. Il parlait un peu
l’anglais, appris lorsqu’il était chapelain d’un seigneur français qui détenait
un prisonnier anglais dans son manoir. Cette période de sa vie lui avait fait
haïr toute autorité, roi, évêque ou seigneur, suffisamment pour vouloir
secourir un archer anglais.
    — Tu iras à Calais, dit-il à Hook.
    — Je suis un hors-la-loi, mon
père.
    — Un proscrit* ,
hein ? Mais l’Angleterre est ton pays. C’est grand, non ? Tu
rentreras là-bas en te gardant éloigné du lieu de ton péché. Quel
était-il ?
    — J’ai frappé un prêtre.
    Le père Michel éclata de rire et lui
donna une tape dans le dos.
    — Bravo ! J’espère qu’il
était évêque.
    — Non, simple prêtre.
    — La prochaine fois, frappe un
évêque.
    Hook paya son écot en coupant du
bois, curant les fossés et aidant le père Michel à rechaumer une étable,
pendant que Mélisande aidait la femme à la cuisine, la lessive et la couture.
    — Les villageois ne te
trahiront point, lui assura le prêtre.
    — Pourquoi cela, mon
père ?
    — Car ils me craignent. Je peux
les envoyer en enfer.
    Il aimait bien bavarder avec Hook
pour pratiquer son anglais, et un jour que Nick taillait les poiriers, celui-ci
lui raconta en hésitant qu’il entendait des voix. Le père Michel se signa.
    — Ce pourrait être la voix du
diable ? suggéra-t-il.
    — Cela m’inquiète, avoua Hook.
    — Mais je ne pense pas, le
rassura le prêtre. Tu as beaucoup taillé dans cet arbre !
    — C’était un fouillis, mon
père. Il aurait dû être rabattu l’hiver dernier, mais cela ne lui fera point de
mal. Vous voulez des poires ? Alors vous ne pouvez le laisser pousser à sa
guise. Croyez-moi, taillez et retaillez. Et même si vous pensez avoir trop
coupé, continuez encore !
    — Tailler et retailler,
hein ? Si je n’ai point de poires l’an prochain, je saurai que tu es
l’homme du diable.
    — C’est saint Crépinien qui me
parle.
    — Mais seulement si Dieu l’y
autorise, et auquel cas c’est Lui qui te parle. Je suis heureux qu’aucun saint
ne me parle.
    — Heureux ?
    — Pour moi, celui qui entend
des voix est soit un saint lui-même, soit voué aux flammes.
    — Je ne suis point un saint.
    — Mais Dieu t’a choisi. Il fait
d’étranges choix, dit le prêtre en riant.
    Comme le père Michel parlait aussi
avec Mélisande, Hook apprit un peu de la vie de la jeune fille. Son père était
un seigneur, que le père Michel appela le seigneur d’Enfer, et sa mère
une servante.
    — Ta Mélisande est donc une
bâtarde de plus, vouée aux ennuis. (Son noble père l’avait fait entrer au
couvent de Soissons comme novice et fille de cuisine.) C’est ainsi que les
seigneurs cachent leurs péchés, expliqua aigrement le curé. En jetant leurs
bâtards en prison.
    — Prison ?
    — Elle ne voulait pas être
nonne. Sais-tu qui était Mélisande ? Une reine de Jérusalem. Et ta
Mélisande t’aime. Prends soin d’elle, lui dit-il le jour de leur départ.
    Ils partirent déguisés. C’était
difficile en raison de la stature de Hook, mais le père Michel lui donna une
robe de pénitent blanche et une crécelle de lépreux. Mélisande fut vêtue de
même, et ses cheveux coupés. Ils étaient censés être des pèlerins en quête d’un
remède pour le mal de Hook. Ils vécurent d’aumônes jetées par les gens qui ne
voulaient pas approcher cet homme qui annonçait bruyamment sa présence. Ils se
déplaçaient encore avec prudence, contournant les grands villages et la ville
d’Amiens. Ils dormaient dans les bois, les étables ou les meules de foin,
tantôt trempés par la pluie, tantôt

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