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Azteca

Azteca

Titel: Azteca Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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j’enroulai le cordon humide autour d’un
petit rouet de terre cuite que je glissai derrière les pierres du foyer de la
cuisine. Ensuite, je remontai les escaliers en courant et j’attendis avec
impatience qu’on m’autorise à voir ma fille.
    J’embrassai ma femme qui me fit un pâle sourire et j’examinai avec ma
topaze le visage minuscule blotti au creux de son bras. J’avais déjà vu des
nouveau-nés, aussi ne fus-je pas trop surpris. Elle était rouge et plissée
comme une cosse de chili chopini, chauve et laide. Je m’efforçais en vain de
faire monter en moi une bouffée d’amour paternel. Toutes les personnes
présentes m’assuraient que c’était bien ma fille, mais je les aurais crues tout
autant si elles m’avaient dit que ce nouveau-né était un singe hurleur sans
poils.
    Pourtant, de jour en jour, l’enfant prit une apparence plus humaine et
je commençais à la prendre en affection. Je l’appelai Cocôton ; c’est un
surnom très courant chez les filles qui veut dire miette de pain. Elle se mit
rapidement à ressembler à sa mère et par conséquent à sa tante. Ses cheveux
poussaient en boucles souples et ses cils étaient aussi épais, en miniature,
que les cils de colibri de Zyanya et de Béu. Elle souriait maintenant plus
souvent qu’elle ne criait et elle avait le sourire de Zyanya qui obligeait tout
le monde à lui répondre. Même Béu qui, ces dernières années, était devenue si
froide, ne pouvait s’empêcher de lui rendre son radieux sourire.
    Zyanya se leva rapidement et pendant un certain temps, elle se consacra
entièrement à Cocôton qui lui réclamait fréquemment son lait. Lorsque Cocôton
eut deux mois et qu’elle n’eut plus si souvent besoin du lait maternel, Zyanya
commença à montrer des signes d’ennui.
    Elle avait été confinée à la maison pendant de nombreux mois, sans
aller plus loin que le jardin en terrasse où elle allait s’exposer aux rayons
de Tonatiuh et à la brise d’Ehecatl. Elle me déclara qu’elle aimerait sortir un
peu et elle me rappela que la cérémonie en l’honneur de Xipe Totec allait
bientôt se dérouler au Cœur du Monde Unique. Elle voulait y aller, mais je le
lui interdis formellement.
    « Cocôton est venue au monde sans signes funestes, ni malformation
et il semble qu’elle ait une bonne vue, grâce à ton tonalli, au mien ou à la
volonté des dieux. Tant qu’elle ne sera pas sevrée, il faut prendre garde que
les mauvaises influences ne s’infiltrent dans ton lait, au cas où tu serais
effrayée ou bouleversée par un spectacle impressionnant. Rien n’est plus
susceptible de te troubler que la cérémonie de Xipe Totec. On ira n’importe où,
mon amour, mais pas là. »
    Oui, Excellence, j’ai souvent assisté à cette célébration car c’est
l’un des rituels religieux les plus importants chez les Mexica comme chez
d’autres peuples. C’est une cérémonie saisissante et inoubliable, mais je ne
pense pas qu’aucun des participants, ni aucun des spectateurs ait jamais pu y
trouver du plaisir. Cela fait bien des années que je n’ai pas vu Xipe Totec
mourir et renaître et j’ose à peine vous décrire comment cela se passait – et
ma répugnance ne doit rien au fait que je sois devenu chrétien et civilisé.
Toutefois, puisque Votre Excellence s’y intéresse et qu’elle insiste…
    Xipe Totec était le dieu des semailles qui avaient lieu dans le mois de
Tlacaxipeualiztli, que l’on pourrait traduire par l’Ecorchement des Hommes. C’est
la saison où l’on brûle, on enlève ou l’on retourne les tiges sèches de la
moisson précédente, pour que la terre nettoyée soit prête à recevoir de
nouvelles plantations. La mort, en somme, cède la place à la vie, comme chez
les Chrétiens, quand au printemps, le Seigneur Jésus meurt et ressuscite. Que
Votre Excellence ne se donne pas la peine de protester, cette ressemblance
sacrilège ne va pas plus loin.
    Je ne vous décrirai pas tous les préliminaires et les à-côtés :
les fleurs, la musique, les danses, les couleurs, les costumes, les processions
et le tonnerre du tambour qui déchire le cœur. Je passerai là-dessus aussi vite
que possible.
    On choisissait à l’avance une jeune fille ou un jeune homme pour tenir
le rôle honoré de Xipe Totec, dont le nom signifie Notre Seigneur l’Ecorché. Le
sexe avait moins d’importance, que l’obligation d’être adulte et vierge. En
général, on prenait un noble étranger capturé dans

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