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Azteca

Azteca

Titel: Azteca Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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dans les réponses que je leur ferais.
Quand enfin il se tut pour manger une caille grillée, je m’enhardis à lui
demander :
    « Seigneur, puis-je vous adresser une seule requête ? Me
permettez-vous de me reposer chez moi un moment avant d’entreprendre ce
voyage ? Quand je suis parti, j’étais dans la force de l’âge et j’ai
l’impression maintenant de rentrer dans l’âge de jamais.
    — Bien sûr. Inutile de t’excuser, c’est le sort commun de tous les
hommes. Nous finissons tous pour atteindre le ueyquin ayquiç. »
    Je vois, mes révérends que vous ne savez pas ce que veut dire ueyquin
ayquic, « l'âge de jamais ». Non, non, Seigneurs, il ne s’agit pas
d’un âge déterminé. Il arrive tôt pour certains et plus tard pour d’autres.
J’avais alors quarante-cinq ans, j’étais entré dans la maturité et j’avais échappé
à ses griffes plus longtemps que la plupart de mes semblables. Le ueyquin
ayquic arrive avec le moment où l’on commence à se plaindre : «  Ayya ,
jamais les côtes ne m’ont semblé aussi raides », ou bien «  Ayya ,
mon dos ne m’avait jamais fait tant souffrir » ou encore : «  Ayya ,
jamais je n’avais trouvé un cheveu gris ».
    Voilà ce que veut dire l’âge de jamais.
    « Repose-toi bien avant de partir, poursuivit Motecuzoma. Mais
cette fois, tu n’iras pas à pied. Un émissaire officiel des Mexica doit voyager
en grande pompe, surtout qu’il va conférer avec des dieux. Tu auras une litière
confortable, une escorte de soldats et tu revêtiras ta plus belle tenue de
Chevalier-Aigle. »
    Motecuzoma fit alors venir un de ses messagers et lui donna des
instructions. L’homme prit aussitôt le pas de course en direction de
Tenochtitlán pour avertir les miens de mon arrivée imminente. L’Orateur avait
agi dans une bonne intention, pour que ma femme et mes domestiques aient le
temps de se préparer à m’accueillir, mais le résultat faillit bien être
catastrophique.
    Le lendemain, en début d’après-midi, j’arrivai à Tenochtitlán. J’avais
un aspect aussi engageant qu’un mendiant lépreux et les gens faisaient un grand
détour pour m’éviter ou ramenaient ostensiblement leur manteau sur eux pour
éviter mon contact. Cependant, en arrivant dans mon quartier, je reconnus des
voisins qui me saluèrent poliment. En arrivant devant chez moi, j’aperçus la
maîtresse de maison en haut des marches de la porte d’entrée. J’ajustai ma
topaze et je faillis m’évanouir au beau milieu de la rue. C’était Zyanya qui
m’attendait.
    Elle se détachait dans la lumière du jour, vêtue seulement d’un corsage
et d’une jupe, tête nue, et dans ses cheveux flottants, je voyais une mèche
blanche. Le choc me transperça de part en part. Soudain, tout se brouilla
autour de moi ; les maisons et les gens se mirent à tournoyer. Ma gorge se
serra tant que je ne pouvais plus respirer. Mon cœur bondit de joie, puis il se
mit à cogner plus fort qu’il ne l’avait jamais fait quand j’escaladais les
pentes. Je chancelai et cherchai à me rattraper à un poteau d’éclairage.
    « Zaa ! » s’écria-t-elle, en me retenant. Je ne l’avais
pas vu accourir à ma rencontre. « Es-tu blessé ? Es-tu malade ?
    — Tu es bien Zyanya ? » parvins-je à articuler dans un
souffle. La rue s’était obscurcie mais je voyais toujours luire sa mèche de
cheveux.
    « Mon cher… mon cher… vieux… Zaa…» Elle me pressa sur son doux
sein.
    « Mais alors, c’est moi qui suis venu ! » Je riais de
bonheur d’être mort. « Tu m’as attendu pendant tout ce temps à la
frontière du lointain pays…
    — Mais non, tu n’es pas mort, roucoula-t-elle. Tu es seulement
très fatigué. J’ai agi sans réfléchir, j’aurais dû te cacher cette surprise.
    — Quelle surprise ? » m’exclamai-je. Ma vision
s’éclaircissait et je levai les yeux vers son visage. C’était celui de Zyanya
et il était plus beau que celui d’aucune femme, mais ce n’était pas ma Zyanya
de vingt ans. Ce visage avait le même âge que moi, alors que les morts
échappent au temps. Zyanya était toujours jeune, comme Cozcatl, et ma Nochipa
aurait éternellement douze ans. Moi seul étais resté sur cette terre à
connaître l’âge sombre de jamais.
    Béu Ribé avait dû lire une terrible menace dans mon regard, car elle me
lâcha et recula prudemment. Le choc était passé, mais je sentais tout mon corps
se glacer. Je me redressai et lui

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