Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Azteca

Azteca

Titel: Azteca Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
ai
jamais rencontré d’autres que vous deux.
    — C’est peut-être parce que les vrais dieux n’apparaissent que
lorsqu’ils sont sur le point de disparaître, murmura l’autre.
    — Vous feriez bien de disparaître, vous aussi. Nezahualpilli ne
doit pas être content de faire seul le lugubre chemin qui mène à Mictlán, alors
que deux de ses incarnations sont encore ici-bas.
    — Sans doute, ne pouvons-nous pas nous résigner à t’abandonner,
mon ami, répliqua l’homme cacao en riant. Il y a si longtemps que nous te
suivons sous tes diverses personnalités, Mixtli, la Taupe, Tête Haute,
Rapporte ! Zâa Nayàzû, Ek Muyal, Su-Kurû…
    — Vous connaissez mieux tous mes noms que moi-même, coupai-je.
    — Alors, souviens-toi des nôtres, rétorqua-t-il vivement. Moi, je
suis Huehueteotl et lui c’est Ehecatl Yohualli.
    — Pour des apparitions, vous êtes bien insistants, grommelai-je.
Il y a longtemps que je n’avais pas été aussi soûl. Ça doit faire sept ou huit
ans. Ah, c’est vrai ! J’avais dit alors que si je rencontrais un dieu, je
lui demanderais pourquoi lui et ses pareils m’avaient laissé vivre si longtemps
alors qu’ils ont frappé tout le monde autour de moi.
    — La réponse est facile, fit Vent de la Nuit. Toutes ces personnes
ont été, pour ainsi dire, les marteaux et les ciseaux qui ont servi à te
sculpter et ensuite ils se sont brisés. Toi, tu as tenu le coup. Tu as résisté
au burin, à la gouge et au grattoir. »
    Je hochai solennellement la tête et déclarai : « Voilà bien
une réponse d’ivrogne !
    — Tu es bien placé, Mixtli, pour savoir qu’une statue ou un
monument ne sort pas tout fait de la carrière. Il faut scier le bloc, le poncer
et l’exposer aux éléments pour qu’il durcisse et ensuite, il ne peut servir que
lorsqu’on l’a sculpté et poli.
    — Servir ? fis-je amèrement, à quoi pourrais-je donc
servir ?
    — J’ai parlé d’un monument, dit Vent de la Nuit. La seule chose
qu’il puisse faire, c’est de tenir debout et ce n’est pas toujours facile.
    — Et ça le sera de moins en moins, remarqua le Plus Vieux des
Vieux Dieux.
    — Cette nuit même, ton Orateur Vénéré Motecuzoma va commettre une
erreur irréparable et il en fera bien d’autres. Une tempête de feu et de sang
va s’abattre, Mixtli. Tu as été taillé et durci dans le seul but de lui
survivre.
    — Pourquoi moi ? hoquetai-je à nouveau.
    — Un jour, il y a très longtemps, tu étais sur une colline non
loin d’ici, à te demander si tu allais monter. Je t’avais alors dit que les
hommes ont la vie qu’ils se choisissent. Tu as choisi de monter et les dieux
ont choisi de t’y aider. »
    Je me mis à ricaner amèrement.
    « Il est possible que tu n’apprécies pas leurs intentions,
reconnut Huehueteotl, pas plus que la pierre n’est reconnaissante au marteau et
au ciseau. Pourtant, ils t’ont aidé et tu dois maintenant les payer de tout le
mal qu’ils se sont donné pour toi.
    — Tu vas survivre à la tempête, dit Vent de la Nuit.
    — Les dieux t’ont aidé à connaître l’art des mots, poursuivit
Huehueteotl. Ils t’ont aidé dans tes voyages pour que tu puisses voir et
apprendre beaucoup de choses. Grâce à cela, tu sais mieux que personne ce qu’a
été le Monde Unique.
    — A été ? » répétai-je.
    Huehueteotl fit un large geste de son bras décharné. « Tout cela
va disparaître à jamais. Ce monde n’existera plus que dans le souvenir et c’est
toi qui auras la charge de conter son histoire.
    — Tu résisteras », dit encore Vent de la Nuit. L’autre
m’agrippa par l’épaule et me dit avec une tristesse infinie :
    « Un jour, quand tout aura disparu, pour toujours, des hommes
viendront remuer les cendres et se poseront des questions. Tu possèdes les
souvenirs et les mots pour parler de la splendeur du Monde Unique, pour qu’elle
ne tombe pas dans l’oubli. Toi, Mixtli, quand tous les monuments se seront écroulés,
quand la grande pyramide, elle-même, se sera effondrée, tu seras encore…
    — Tu resteras debout », dit Vent de la Nuit.
    Je m’esclaffai devant une telle absurdité. Comment cette monumentale
pyramide pourrait-elle s’effondrer ? Je tentai de dérider mes deux
sinistres fantômes en leur disant :
    « Mes Seigneurs, je ne suis pas de pierre, je ne suis qu’un homme,
le plus fragile des monuments. »
    Je ne les entendis pas répondre. Ils avaient disparu

Weitere Kostenlose Bücher