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Barnabé Rudge - Tome II

Barnabé Rudge - Tome II

Titel: Barnabé Rudge - Tome II Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Dickens
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Tooley-Street, le
Banc du roi, la prison de la Fleet, et le nouveau Bridewell. Chaque
rue était un champ de bataille. Dans chaque quartier, le bruit des
mousquets de la troupe dominait les clameurs et le tumulte de la
populace. La fusillade commença dans le marché à la volaille, où on
avait tendu une chaîne au travers de la chaussée ; c'est là
que la première décharge tua du coup une vingtaine de factieux. Les
soldats, après avoir à l'instant emporté leurs cadavres dans
l'église Saint Médard, firent feu une seconde fois, et, serrant de
près la foule qui avait commencé à céder passage en voyant
l'exécution commencer, se reformèrent en ligne dans Cheapside et
chargèrent à la baïonnette.
    Les rues offraient alors un horrible
spectacle. Les huées de la canaille, les cris des femmes, les
plaintes des blessés, le bruit incessant de la fusillade, formaient
un accompagnement étourdissant et épouvantable aux diverses scènes
étalées sous les yeux à chaque bout. Là où le chemin était barré
par des chaînes était aussi le fort du combat et le plus grand
nombre de victimes ; mais on peut dire qu'il n'y avait pas un
carrefour important où l'affaire ne fût pas chaude et
sanglante.
    À Holborn-Bridge, à Holborn-Hill, la confusion
était plus grande que partout ailleurs ; car la foule qui
débordait de la Cité en deux courants impétueux, l'un par
Ludgate-Hill, et l'autre par Newgate-Street, se réunissait là et
formait une masse si compacte, qu'à chaque décharge les gens
semblaient tomber par tas. On avait posté en cet endroit un gros
détachement de soldats qui tiraient tantôt du côté de Fleet-Market,
tantôt du côté de Holborn, ou de Snowhill, balayant constamment les
rues dans toutes les directions. Là aussi il y avait plusieurs
incendies considérables, de sorte que toutes les horreurs de cette
nuit terrible semblaient s'être donné rendez-vous sur ce seul et
même théâtre.
    Au moins vingt fois les assaillants, ayant à
leur tête un homme qui brandissait une hache dans sa main droite,
monté sur un gros et grand cheval de brasseur, caparaçonné avec les
chaînes emportées de Newgate, dont le cliquetis accompagnait chacun
de ses pas, firent une tentative pour forcer le passage et mettre
le feu à la maison du négociant en vins. Au moins vingt fois ils
furent repoussés avec perte, ce qui ne les empêcha pas de revenir à
la charge ; et, quoique le bandit qui était à leur tête fût
bien reconnaissable, et bien visible, car il n'y avait pas d'autre
factieux à cheval, pas un coup ne put l'atteindre. Chaque fois que
la fumée de la fusillade se dissipait, on était sûr de le trouver
là, appelant ses compagnons de sa voix enrouée, brandissant
toujours sa hache sur sa tête, et prenant un nouvel élan, comme
s'il portait un charme qui protégeât sa vie, et qu'il fût à
l'épreuve de la poudre et des balles.
    C'était Hugh : c'était lui qu'on voyait
se multiplier sur tous les points dans l'émeute. C'était lui qui
avait dirigé deux attaques sur la Banque, qui avait aidé à
renverser les baraques de péage sur le pont de Black-Friars, et en
avait semé l'argent sur le pavé ; qui avait mis le feu de sa
propre main à deux prisons ; qui, ici, là, partout et
toujours, était à l'avant-garde, toujours en mouvement, frappant
les soldats, encourageant la foule, faisant entendre la musique de
fer de son cheval à travers les cris et le tapage, sans jamais être
atteint ni arrêté un moment. Cerné d'un côté, il se faisait jour de
vive force ailleurs ; obligé de se retirer sur ce point, il
avançait sur cet autre à l'instant même. Repoussé de Holborn pour
la vingtième fois, il poussait son cheval à la tête d'une grosse
troupe d'insurgés droit à Saint-Paul, attaquait un poste de soldats
chargés de la garde des prisonniers derrière les grilles, les
forçait à la retraite, leur prenait les hommes dont ils devaient
compte, et, avec ce renfort, revenait à la charge, dans le délire
du vin et de la rage, les excitant de ses hourras comme un
démon.
    Le plus habile cavalier aurait eu bien de la
peine à rester à cheval au milieu d'une telle foule et d'un pareil
tumulte mais, quoique ce furieux roulât sur la croupe (il n'avait
pas de selle) comme un bateau ballotté par la mer, il n'était pas
un instant embarrassé de se tenir ferme et de diriger sa monture
partout où il voulait. Dans les rangs les plus épais et les plus
pressés, sur les cadavres et

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