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Bombay, Maximum City

Titel: Bombay, Maximum City Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suketu Mehta
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deux tonnes et demie. Et il soupçonne qu’il pourrait y en avoir deux fois plus : « Nous sommes loin d’avoir récupéré la totalité des arrivages introduits dans le pays avant les attentats. Ces explosifs sont toujours cachés quelque part. »
    À en croire un des tueurs de la Compagnie-D, le prochain soulèvement mettra le feu aux poudres : « Pas besoin d’un grand vent pour propager l’incendie d’un endroit à l’autre : au premier prétexte, à la première étincelle, tout va s’embraser. » Et, cette fois, les musulmans seront armés et prêts à se battre.
    Il y a quelques années, un gradé de Delhi a appelé Ajay au téléphone : l’Afrique du Sud sollicitait l’aide de pays en développement pour réorganiser ses propres forces de police et Ajay, sur proposition de sa hiérarchie, se voyait offrir une mission de deux ans à Johannesburg, « la capitale mondiale de la drogue », ainsi qu’il la définit. Après y avoir réfléchi toute la nuit, Ajay décida d’accepter. Le matin, il en parla à deux anciens commissaires qui le tenaient en haute estime. Tous deux lui déconseillèrent fermement de partir en lui rappelant que son nom figurait en bonne place sur la liste noire de la pègre. « Les gangs t’envoient là-bas pour te descendre », lui dirent-ils. Ajay n’a pas saisi l’occasion, mais aujourd’hui il le regrette et considère qu’il a commis « une erreur tactique ».
    Ritu, qui a fait ses études d’histoire à Oxford, aurait pu obtenir un poste de maître assistant à Cambridge, avec un traitement confortable. À la place, elle a choisi d’épouser Ajay et a donc dû abandonner sa carrière. Aujourd’hui, elle rêve d’émigrer aux États-Unis pour reprendre des études. Chaque fois qu’ils passent à proximité de l’aéroport, leur fils de dix ans se tourne vers Ajay : « Papa, pourquoi on ne prend pas cette route ? » Il sait que son père ne peut se détendre vraiment qu’à l’étranger. Dès que l’avion décolle et qu’il survole Bombay, la tension qui l’habite le lâche : « C’est comme si j’appuyais sur un bouton », dit Ajay.
    « Il n’emmène jamais les enfants au zoo, soupire M me  Lal.
    — J’y suis tous les jours, au zoo », réplique son mari.
    À chacune de nos conversations, Ritu me rappelle qu’elle a sacrifié sa vie professionnelle à sa vie de couple. D’elle-même elle affirme qu’elle a pris la bonne décision en choisissant de se consacrer à ses deux enfants et à son époux. Être la femme d’Ajay l’expose pourtant à des pressions que peu de femmes supporteraient. « Après les attentats à la bombe, je recevais des coups de fil en pleine nuit, du genre : “On sait que tu as un fils qui va à Cathedral.” » Ses correspondants anonymes voulaient qu’Ajay lâche prise. Leurs fils, Rahul et Ravin, sont protégés vingt-quatre heures sur vingt-quatre par des gardes armés. Un jour, après les attentats, des voyous postés sous l’échangeur de Marine Drive, un endroit où les automobilistes sont obligés de ralentir, devaient jeter des grenades sur la voiture qui ramenait Rahul de l’école. Ajay l’apprit à temps, heureusement, et la voiture changea d’itinéraire.
    Quand les enfants sont à l’école, des policiers en armes montent la garde devant la porte de leurs classes. L’aîné, Rahul, trouve cela particulièrement pénible. Ajay le comprend : « Il a l’impression d’être en liberté surveillée. Il ne peut pas aller jouer comme ses petits copains. » Rahul était en CE1 quand Ritu reçut un coup de téléphone l’informant qu’une bombe avait été déposée dans la classe de son fils. Complètement paniquée, elle essaya, en vain, de joindre Ajay. Quelques minutes plus tard, le policier affecté à la sécurité de Rahul confirma au téléphone la réalité de la menace en la prévenant que l’école venait d’être évacuée. Ritu dévala l’escalier, sauta dans sa voiture et fonça sur les lieux à une allure folle, malade à l’idée de ce que son fils était en train de vivre. Elle le trouva devant l’école, sain et sauf, et le ramena à la maison. Depuis, il a plusieurs fois été confronté à des situations similaires. Ajay m’a précisé que l’équipe des démineurs inspecte plus souvent qu’à son tour l’établissement où son fils est scolarisé.
    Tout cela explique la colère que je l’ai vu manifester au cours des interrogatoires. « À partir

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