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Bombay, Maximum City

Titel: Bombay, Maximum City Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suketu Mehta
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nous en mettent plein la vue. Nous buvons un whisky sur le balcon. Sunil a retiré sa chemise ; en tricot de peau, il se prélasse dans son fauteuil en jetant sans arrêt des coups d’œil à sa montre neuve, moins pour vérifier l’heure que pour admirer l’objet. Ce n’est pas la première fois que je remarque combien il a l’air à son aise, dans les hauteurs. La grande majorité des gens de son quartier n’a jamais dépassé le deuxième étage.
    « Bombay sera bientôt à feu et à sang », prophétise-t-il. Installé en ville depuis dix ans, il envisage de partir pour Raigad afin de mettre ses enfants à l’abri. Il a entendu dire qu’on enlevait des gamins pour leur prendre leurs reins. La teneur en alcool des boissons ingurgitées par les Bombayites est un bon baromètre des tensions ambiantes. « Du fait que les prix sont très hauts, les gens doivent se battre encore plus, et à cause du stress ils boivent comme des trous. À la Bourse, les types boivent des sixers, maintenant. » D’une qualité à peine supérieure à celle de l’alcool local, un sixer ne coûte que cinq roupies la bouteille.
    Il pleut étonnamment fort, pour la saison. « C’est à cause de nos péchés, commente Sunil. Dieu lui-même n’accepte pas Bombay. Il a fait le monde, mais il trouve Bombay inacceptable. » Sunil s’y connaît, en matière de péché. Le mercredi, le vendredi et le dimanche, il propose un film porno dans son bouquet télévisé. La demande pour ce genre de film émane généralement des téléspectatrices. «   Sunil, tu ne t ’ occupes pas bien de nous  » , lui disent les femmes quand il se rend au I.C. College, l ’ école des arts ménagers. Le code est le suivant  : en début de soirée, quand il a décidé de «   s ’ occuper  » de ses abonnées, un petit symbole –  une étoile, par exemple  – s ’ affiche dans un coin de l ’ écran, ou bien un message crypté, indiquant un horaire, défile plusieurs heures durant en bas –  du style, «   le canal de la BBC a changé  » – et les initiés comprennent qu ’ un film coquin sera diffusé à telle heure, sur telle chaîne. Ces productions ne passent que les nuits de beuverie  : jamais celle du mardi, vouée au culte de Ganesh  ; pas celle du jeudi, réservée à Saï Baba  ; pas non plus, en principe, celle du samedi que de nombreux fidèles dédient au dieu Hanuman  ; et pas le lundi «   parce que les gens ne boivent pas tant que ça vu tout ce qu ’ ils ont éclusé le week-end  » . Nuits des soiffards, les nuits des mercredis, vendredis et dimanches sont donc aussi, dans le Bombay de Sunil, celles des amateurs de porno. Qui apprécient d ’ autant plus le genre qu ’ ils ont bu tout leur saoul avant.
    Les ménagères abonnées à son bouquet font des proies faciles, pour Sunil. «   Qui a le droit d ’ entrer dans la maison, je te le demande  ? Le laitier apporte le lait et s ’ en va  ; le repasseur vient chercher les vêtements et s ’ en va. Moi, j ’ y rentre, dans la maison, et même dans la chambre et j ’ y reste un moment, le temps de réparer ce qui ne va pas.   » Résultat, il peut citer treize femmes avec qui il a couché –  et «   qui m ’ ont plu. Je les ai choisies  » , précise-t-il. Ses préférences vont aux Gujeraties, car «   leurs maris ne font la chose qu ’ une fois par semaine  » .
    Sunil a la santé. «   Rien que dans mon quartier, je me fais cinq bonnes femmes  » , plastronne-t-il. Fascinante proximité du sexe et de la mort, puisque se faire quelqu ’ un c ’ est aussi bien le tuer que le baiser. «   Combien de fois un type marié se tape sa femme  ? Deux, trois fois par semaine  ? Elle, elle en veut. Il faut lui en donner plus.   » Ce n ’ est jamais lui qui fait le premier pas, et il n ’ a pas la main baladeuse. «   Je n ’ ai pas envie de couler ma boîte. C ’ est elles qui m ’ appellent, sous prétexte qu ’ il y a un défaut dans le câble. Elles me tripotent, elles s’asseyent tout près de moi, mais je laisse passer deux jours avant d’y aller. » Jeunes ou vieilles, tout lui va ; une de ses conquêtes avait cinquante-trois ans. Il nous promet de nous emmener un jour dans le village des Aghoris, à la périphérie de Bombay. Ces gens ont une technique spéciale, des plus athlétiques, pour faire l’amour : l’homme demande à la fille de s’accrocher à un arbre, il lui soulève une jambe et se la pose sur

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