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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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désignant un jouet et lui enlève son oeuf. L’enfant voyant son coquetier vide prend son couteau et en menace l’Empereur :
    — Rends-moi mon oeuf ou je te tue.
    — Comment, coquin, tu veux tuer ton oncle ?
    — Je veux mon oeuf ou je te tue.
    Napoléon s’exécute en riant et constate :
    — Tu seras un fameux gaillard.
    — Alors Mademoiselle, dit-il une autre fois à la petite Napoléone, fille d’Élisa, j’en apprends de belles ; vous avez p... au lit cette nuit.
    Et la petite fille de cinq ans – la future comtesse Camerata – de lui répondre :
    — Mon oncle, si vous n’avez que des bêtises à dire, je m’en vais...
    Il en rira toute la journée.
    Après le repas, le vrai travail commence. Retiré dans son cabinet, Napoléon gouverne, reçoit les ministres et les directeurs généraux ou préside les conseils.
    — Sire, voilà un projet...
    Les demandes se précipitent :
    — Est-il complet ? Tous les cas sont-ils prévus ?
    — Pourquoi ne vous occupez-vous pas de ceci ?
    — Cela est-il nécessaire à dire ?
    — Cela est-il juste ?
    — Cela est-il utile ?
    — Comment cela était-il autrefois ? à Rome ? en France ?
    — Comment cela est-il maintenant ?
    — Comment cela est-il ailleurs ?
    Il ne se lasse pas de poser ces deux questions :
    — Cela est-il juste ? Cela est-il utile ?
    Quand il s’écrie : « Cela n’est pas juste », sa voix a, parait-il, un accent tout particulier. Et il répète sa déclaration à plusieurs reprises en l’étayant chaque fois par une nouvelle raison. Parfois, il se lève, va consulter ses « outils », c’est-à-dire ses états de situation qui lui permettent – bien que tout soit classé dans sa tête – de trouver instantanément l’effectif ou la position d’un régiment, ou encore l’état des recettes et des dépenses concernant chaque ministère.
    Au Conseil d’État, en ce début du règne, on discute d’un problème important : quel emblème gravera-t-on sur le sceau impérial ?
    — Un lion !
    — Un éléphant !
    — Un coq !
    Napoléon remarque :
    — Le coq est de basse-cour. C’est un animal trop faible...
    On vote, le coq est élu à la majorité, mais Napoléon insiste :
    — Le coq n’a point de force : il ne peut pas être l’image d’un empire tel que la France. Il faut choisir entre l’aigle, l’éléphant ou le lion... Il faut prendre un lion, étendu sur la carte de France, la patte prête à dépasser le Rhin. Malheur à qui me cherche !
    Bien qu’on ait un peu l’air d’imiter l’Autriche et la Russie, c’est l’aigle qui est finalement adopté.
    Le dîner est servi à six heures. Napoléon n’aime pas interrompre son travail et fait souvent attendre Joséphine au-delà des limites permises. Ne vit-on pas un jour vingt-trois poulets mis successivement au four, afin qu’il y ait toujours une volaille cuite à point pour l’Empereur ?
    Aux Tuileries et à Saint-Cloud, Napoléon et Joséphine dînent seuls, sauf le dimanche où la famille impériale, assise sur des chaises – à l’exception de Madame Mère qui a le droit d’occuper un fauteuil – est conviée à prendre place autour de la table. Le service est fait par les pages, secondés par les valets de chambre, les maîtres d’hôtel, les écuyers tranchants, mais jamais par la livrée. Le repas se prolonge, cette fois, durant une vingtaine de minutes. L’Empereur boit du vin de Chambertin coupé d’eau. Un de ses menus nous a été conservé :
    2 potages : Purée de marrons. Macaroni.
    2 relevés Brochet à la Chambord. Culotte de boeuf garni.
    4 entrées Filets de perdreaux à la Monglais. Filets de canard sauvage au fumet de gibier. Fricassée de poulet à la chevalière. Côtelettes de mouton à la Soubise.
    2 rôts : Chapon au cresson. Quartier d’agneau.
    Entremets : Gelée d’orange moulée. Crème à la française au café. Génoise décorée. Gaufres à l’allemande.
    Les plats recouverts de cloches d’argent sont disposés sur la table – c’est le service dit à l’ambigu – et l’Empereur fait son choix. Il ne mange souvent qu’un potage, un plat et un dessert, et commence parfois par les sucreries...
    Après le repas, lorsqu’il ne se dirige pas aussitôt vers son cabinet de travail, Napoléon se rend chez Joséphine – au rez-de-chaussée du palais, dans les anciens appartements de Marie-Antoinette. Le cercle de la cour se tient dans les salons du premier étage ouvrant sur le Carrousel. Souvent, l’Empereur s’y montre

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