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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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jours une marque visible de la satisfaction de Sa Majesté.
    « Il ne se doutait pas du mal qu’il nous faisait. Bien souvent, il en faisait autant à l’Impératrice lorsque nous étions en train de l’habiller. Il lui donnait des tapes... de préférence sur les épaules. Elle avait beau lui dire :
    — Finis donc, finis donc, Bonaparte !
    Il continuait tant que le jeu lui plaisait. L’Impératrice s’efforçait de rire...
    Le même homme, désarmé par les larmes d’une femme, et qui accordera la grâce de leurs époux à Mme de Polignac ou à Mme de Hertzfeld, ce même homme osera, un soir, au cercle des Tuileries, demander assez grossièrement à la duchesse de Fleury :
    — Alors, Madame, aimez-vous toujours autant les hommes ?
    — Oui, sire, répondra l’interpellée, lorsqu’ils sont polis.
    Avec les femmes – peut-être par timidité ? – il est, en effet, d’une étonnante maladresse. Il a rarement quelque chose d’agréable à leur dire ; souvent même il leur fait de mauvais compliments :
    — Ah ! mon Dieu, comme vous avez les bras rouges !
    Ou bien encore :
    — Vous avez là une robe bien sale !... Est-ce que vous ne changez jamais de robe ? Je vous ai déjà vu celle-là vingt fois.
    Il tient à la réputation de son entourage et refuse à Mme Tallien, devenue princesse de Caraman-Chimay la faveur d’être présentée à la cour.
    — Vous avez fait trop d’éclats, lui explique-t-il, vous avez eu tant d’amants ! Ah ! convenez que cela est fâcheux.
    — Cela est vrai, avoue-t-elle, mais le temps n’efface-t-il rien ?
    — Oui, mais il est encore de trop bonne heure.
    — Quand donc ?
    — Plus tard... Vous êtes encore trop jolie.
    — Vous croyez ? s’exclame-t-elle, déjà consolée... Je suis encore bien ? Ainsi je puis espérer ?...
    Elle espéra en vain... Il regretta cependant un jour de n’avoir pas aidé Tallien tombé dans la misère.
    — J’aurais dû le faire duc de Thermidor !
    Il se connaît fort bien :
    — Il y a en moi deux hommes distincts : l’homme de la tête et l’homme du coeur.
    Chez lui, l’homme de coeur existe, en effet, quoi qu’on en ait dit. Napoléon n’oubliera jamais ceux qui l’ont aidé dans sa jeunesse, tel le grand Carnot, à qui son républicanisme fera perdre sa pension. Non seulement l’Empereur la lui fera rétablir, mais il lui accordera une retraite d’ancien ministre se montant à dix mille francs. La garde reçoit l’ordre de présenter les armes devant le maréchal de Ségur qui, en 1784, avait contresigné son brevet d’officier du roi. Le général du Theil, le premier peut-être qui, à Auxonne, s’était rendu compte de la valeur du jeune lieutenant en second, lui aussi n’est pas oublié. Mme de Montesson, qui l’a couronné le jour de la distribution des prix de Brienne, reçoit un douaire de cent soixante mille francs. Montalivet, son ancien condisciple, devient préfet, ministre et comte de l’Empire. Lauriston est nommé général et ambassadeur, et Villarceaux, préfet. Son ancien ami des Mazis, qui, rentrant d’émigration, se présente devant lui, reçoit le poste de directeur de la loterie. Plus tard il le nommera administrateur du mobilier des palais impériaux.
    — Sire, lui dira-t-il, je ne suis point administrateur, renvoyez-moi plutôt à mes canons.
    Mais l’Empereur maintiendra sa décision – et des Mazis fera, paraît-il, merveille, avant de devenir chambellan de son ancien camarade...
    — Bonjour, chevalier, dit un jour Napoléon à Hédouville, rentré d’émigration et qui se présente devant lui. D’où viens-tu ? Tu avais émigré ?
    Hédouville murmure une excuse.
    — Tu mens, reprend l’Empereur en riant. Je vois que tu seras bon pour la diplomatie.
    Et il en fera un diplomate.
    S’il juge impitoyablement l’incapacité des nouveaux venus, il pardonne volontiers les erreurs et les fautes de ses anciens compagnons, non sans leur dire vertement ce qu’il pensait au préalable. On sait aussi combien il pleurera Desaix, Lannes et Duroc, tous trois mortellement atteints sur le champ de bataille.
    Sa sensibilité est extrême et, de ses sens, l’odorat semble avoir été le plus développé. Demeurer dans une chambre récemment peinte lui est extrêmement pénible. « Il avait une perception si subtile, nous dit Méneval, qu’il devinait le voisinage d’un souterrain, d’une cave ou d’un égout très éloignés, ou d’odeurs émanant de lieux hors de portée et qui n’étaient

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