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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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trouvait à l’École militaire. Il s’agit d’une veuve encore charmante, mais dont l’âge ne concorde nullement avec le sien.
    La petite Laure Permon, future duchesse d’Abrantès, se trouvait dans une pièce voisine lorsque Buonaparte avait fait son étrange déclaration. Elle entendit sa mère éclater de rire, puis, après un moment de « stupéfaction », répondre en ces termes à son soupirant inattendu :
    — Mon cher Napoleone, parlons sérieusement. Vous croyez connaître mon âge ? Eh bien, vous ne le connaissez pas. Je ne vous le dirai pas, parce que c’est ma petite faiblesse. Je vous dirai seulement que je serais non seulement votre mère, mais celle de Joseph. Laissons cette plaisanterie : elle m’afflige devant vous.
    — Tout ceci est très sérieux, reprit Napoleone, et d’après ma manière de voir ; l’âge de la femme que j’épouserai m’est indifférent si, comme vous, elle ne devait point paraître avoir trente ans. J’ai réfléchi mûrement à ce que je viens de vous dire. Je veux me marier. On veut me donner une femme qui est charmante, bonne, agréable, et qui tient au Faubourg Saint-Germain. Mes amis de Paris veulent ce mariage. Mes anciens amis m’en éloignent. Moi, je veux me marier, et ce que je vous propose me convient sous beaucoup de rapports. Réfléchissez.
    « Ma mère, conclut Laure, rompit la conversation en lui disant, en riant, que ses réflexions étaient toutes faites... »
    C’est donc vraisemblablement poussée par le ménage Tallien – les « amis de Paris » – que Joséphine – la femme « qui tenait au faubourg Saint-Germain » – aurait fini par envoyer, dans le courant du mois de décembre 1795, ce billet célèbre destiné à relancer celui qui semblait l’avoir oubliée :
    « Vous ne venez plus voir une amie qui vous aime ; vous l’avez tout à fait délaissée ; vous avez bien tort, car elle vous est tendrement attachée. Venez demain septidi déjeuner avec moi. J’ai besoin de vous voir et de causer avec vous sur vos intérêts. « Bonsoir, mon ami. Je vous embrasse.
    « Veuve Beauharnais. »
    S’il ne s’agit pas d’un complot entre Thérésia et Rose, quels sentiments poussent Mme de Beauharnais ? Peut-être n’a-t-elle pas oublié ce que lui a dit un jour son ami Ségur :
    — Ce petit général pourrait devenir un grand homme !
    Assurément, elle avait déjà succombé aux avances de Barras, dont elle était maintenant la maîtresse et qui passait à l’époque pour un grand homme. Mais elle n’ignorait pas que la protection de son amant était provisoire. Il lui fallait mieux ! quelqu’un qui puisse faire face à ses dépenses – ce tonneau des Danaïdes. Et puis, elle trouvait Buonaparte drôle – elle prononçait drolle de sa voix chantante de fille des îles.
    Rabroué par Mme Permon, croyant la veuve Beauharnais fortunée, Buonaparte se rend ce fameux septidi de frimaire, an IV, dans le délicieux petit hôtel situé non loin de la Chaussée d’Antin, plus précisément rue Chantereine, appelée ainsi parce qu’autrefois les reinettes y croassaient. Joséphine l’avait acheté à Julie Carreau, ex-Louise-Julie Talma. Avec adresse, Rose essaye d’abord de persuader Napoleone qu’il n’y a rien qu’une grande amitié entre Barras et elle. Tout ce que l’on colporte dans Paris n’est que calomnie. Buonaparte est déjà prêt à tout croire... Puis il parle de « ses intérêts », sans doute de ce commandement de l’armée d’Italie qu’il espère toujours recevoir, en dépit de ses nouvelles grandeurs.
    Il revient à plusieurs reprises rue Chantereine. Le luxe – un luxe tout extérieur de demoiselle à la vertu légère – l’éblouit. Il admire la manière exquise qu’elle a de dire à chacun exactement ce qu’il faut et le tact avec lequel elle conduit une conversation. Il ne se doute pas qu’il n’y a ici que des dettes, que les domestiques sont rarement payés, et les fournisseurs encore moins... Devant cette « dame » il se sent bien petit provincial... et de bien petite noblesse. Il ignore alors que le titre de vicomtesse dont se pare la « veuve Beauharnais » est usurpé... Il est sous le charme de « l’incomparable Joséphine ». Car c’est déjà ainsi qu’il l’appelle, ne voulant plus employer son prénom de Rose prononcé par trop de lèvres masculines.
    Elle joue de sa coquetterie avec un art et une habileté consommés... et il l’aime, maintenant – lui, sans expérience –

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