Byzance

Attaliétès, stratège du thème de Cilicie et fils aîné du sénateur et magister Nicon Attaliétès.
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    — Voyez-vous, maîtresse, l’interruption des flegmes effluents qui produisent ces désirs est l’inverse des procédés qui stimulent l’inclination sexuelle. Il faut simplement manipuler les organes en prenant bien soin des tourbillons qui règlent la décharge des humeurs vitales. Si la Mère de Dieu le veut, nous avons toute raison de croire que vous serez soulagée de votre inflammation douloureuse et insolente avant l’heure des complies.
    L’impératrice des Romains, Zoé née dans la pourpre, ordonna à Léo, l’eunuque en robe blanche, de lui essuyer le visage. Elle réfléchit un instant aux conseils de ce nouveau spécialiste des désordres sexuels. Le médecin, eunuque au visage long et d’une pâleur mortelle, semblait toujours transpirer de la lèvre supérieure ; son expression aigrie suffisait à dissiper tout appétit charnel. Quant à ses procédés… Zoé se dit qu’elle avait sans doute épuisé le savoir de ces charlatans érudits. De quelle utilité avaient été tous ces spécialistes pour faciliter ses relations conjugales avec feu son mari Romanos ? Les applications sans fin d’onguents aphrodisiaques prescrits par les experts n’avaient rien fait pour reconstituer la virilité de ce vieillard sénile. Mais maintenant, il lui fallait inverser la procédure ; son nouveau mari négligeait de plus en plus ses obligations conjugales et le succès des onguents semblait également improbable. Michel ! Non, elle cesserait de penser à lui. La déception était trop amère.
    — Maria, demanda Zoé, que penses-tu des prétentions ambitieuses de ce médecin ? Selon ton expérience, le désir physique est-il une chose que l’on peut manipuler en appuyant sur des organes internes déficients ? Ou bien est-ce plutôt une chose spirituelle et donc étrangère aux palpations de nos spécialistes éminents ?
    Maria plissa le front, et la pâte cosmétique séchée que l’impératrice lui avait appliquée sur le visage se craquela. Elle était assise sur un siège de camp doré, placé devant le bain de vapeur magyar portatif de l’impératrice ; seul le visage écarlate de Zoé était visible au-dessus de la tente de cuir qui enfermait le corps impérial.
    — Je suis certaine qu’il s’agit des deux. Mais des deux composantes du désir, l’élément physique est le plus facile à soulager. L’élément spirituel du désir peut en revanche pousser quelqu’un à surmonter même une répulsion physique et à profiter de l’amour d’un homme qui n’est beau ni de corps ni de peau.
    Elle trempa le doigt dans le bol d’eau de rose placé sur la console à côté de son siège.
    — Je n’ai jamais aimé à la fois les aspects spirituels et physiques du même homme, en tout cas en même temps. Qui sait ? Peut-être est-ce une combinaison explosive d’éléments, comme les ingrédients du feu liquide. Il brûlerait l’âme. Et je n’ai jamais rencontré un homme qui, ayant enflammé mon corps, fût assez triste pour enflammer mon esprit.
    — Comme c’est intéressant, petite fille.
    Zoé inclina la tête vers le dais de soie écarlate du pavillon de bain. On avait déjà allumé des lampes ; le soleil venait de disparaître derrière les sommets du Taurus.
    — Sais-tu que depuis quelque temps, tu parles de tes passe-temps amoureux avec une étrange dose de mélancolie ? Je t’avais conseillé, et même imploré, d’emmener une sorte de… distraction avec toi pour pallier ce genre de malaise. Errer sans fin dans le désert, comme nous faisons, aurait mis à l’épreuve même la patience de Moïse, l’élu de Dieu. L’immensité de l’Asie afflige l’âme de lassitude et d’appréhension.
    — Je ressentais ce vide avant même notre départ de la Ville impériale.
    — Eh bien, petite fille, tu dois sans doute savoir que plus vive est la flamme de la passion, plus rapidement se consume le feu du désir. Ton problème, c’est que tu fais brûler les flammes si vite que tu t’éveilles au milieu de la nuit avec ton lit tout froid.
    Zoé se détendit ; la vapeur dissipait les fatigues de la route. Michel… Elle ne pouvait pas s’empêcher de penser à lui. Il était la chaleur qui enfiévrait encore ses nuits. Si seulement Joannès n’avait pas abreuvé Michel de mensonges au sujet de Romanos. Pas des mensonges… Tu as regardé pendant