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Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
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Dniepr sans qu’il provoque une querelle avec le chef des cinq cents guerriers les plus capables de l’expédition.
    — Je parlerai à Hakon demain matin, confia-t-il à Haraldr d’un ton las.
    Un jeune homme à la barbe éparse s’élança de la foule et se mit à déclamer sur le ton strident des scaldes :
    — Patron des corbeaux ! Bras puissant du grand roi ! Toi dont le front de lune brille de l’éclat des étoiles précieuses…
    Il leva le bras en une arabesque aérienne, comme s’il remuait de la poudre d’or vers le ciel. Hakon leva les yeux vers le jeune scalde et ricana.
    — Grettir ! M’as-tu trouvé de la chair fraîche ? De quoi stimuler mon épieu ?
    — Oui, pourfendeur d’hérétiques.
    Grettir esquissa d’un geste les courbes d’une femme. On écarta la paysanne. Deux Varègues traînèrent la victime suivante au milieu de la foule. À sa vue, Haraldr comprit qu’il ne pourrait pas repartir.
    Elle était vêtue d’une tunique sale et grossière, les poignets et les chevilles liés, mais n’était visiblement pas née pour accepter la servitude. Sa peau était d’un blanc aussi pur que ses longs cheveux étaient noirs. Elle mordit la main de Grettir comme une fouine, et il dut la forcer à relever le menton pour que Hakon l’examine. La colère faisait briller l’agate de ses yeux. Elle avait le nez long et fin, avec le bout pointu et délicat. Même au seuil de l’humiliation, elle conservait une incontestable noblesse. Haraldr se contracta. Une voix murmura en lui mais il ne la comprit pas.
    Hakon sourit, lança son bras de gorille, saisit la longue crinière noire de la jeune fille et la força à s’avancer entre ses énormes cuisses écartées. Curieusement elle se montra docile. C’est à peine si ses yeux brillèrent quand il l’attira bouche contre bouche. Le contact dura un instant puis la tête de l’esclave recula brusquement. Hakon rugit et faillit basculer en arrière de son tonneau. Du sang coulait de son nez écorché.
    Il se frotta le nez d’une main, tandis que l’autre enveloppait presque entièrement la nuque de l’esclave. Le jarl Rognvald décida d’intercéder si Hakon voulait tuer la jeune fille. Les clameurs lubriques des jeunes guerriers varègues se turent soudain. Les yeux de Hakon parcoururent la foule, comme à l’affût d’un signal. Puis des vers retentirent dans le silence.
    Ses cheveux de sable
Pillé sur une plage lointaine de la mer,
Elle a versé le vin des corbeaux,
Indomptable dans sa blancheur de cygne.
    « Un quatrain bien tourné, se dit Haraldr en savourant les paroles du scalde. Mais pourquoi tout le monde me regarde-t-il ainsi ? » Alors seulement il comprit ce qui s’était passé, et ses veines se glacèrent. C’était lui le poète. Il avait lancé les vers à voix haute. Peut-être n’était-ce pas sa voix, mais les mots étaient sortis de sa bouche.
    —  Hvat ? rugit Hakon, aussi étonné que furieux.
    Grettir s’avança de deux pas vers Haraldr et le dévisagea comme s’il venait de voir un serpent parler. Le cœur du jarl Rognvald se souleva : comment allait-il tirer Haraldr de là vivant ?
    Haraldr sentit la dague de Hakon contre sa gorge avant même de voir briller l’acier.
    — Je regrette, jarl Rognvald, mais ton garde du corps s’est moqué de moi, gronda Hakon d’un ton qui n’exprimait aucun regret. Je vais être obligé de lui demander si son épée est aussi pointue que sa langue.
    — Il a été sculpté dans un grand arbre, railla Grettir, mais on dirait que le bois est encore vert.
    — Hakon ! lança le jarl Rognvald en posant la main sur le pommeau de son épée. Recule-toi. Cet enfant m’a été confié. Il n’est pas payé pour me défendre, c’est moi qui ai juré de le défendre, sur mon honneur et par amour.
    Hakon soupesa l’enjeu : le plaisir de faire couler le sang d’un vieux jarl importun contre l’énorme récompense qu’il recevrait s’il amenait ses recrues à Constantinople. Car il avait besoin du jarl et de ses pilotes pour assurer la descente du fleuve… Mais quand ils arriveraient dans la mer de Rus et n’auraient plus besoin des compétences du vieux bonhomme, il veillerait à ce que les crabes lui rongent les os. Quant au protégé merdeux du jarl, jamais il ne verrait l’embouchure du fleuve.
    Hakon baissa sa lame, haussa les épaules et ricana avec mépris.
    — Oui, Grettir, ce bois est trop vert pour qu’on le taille. Mais quelques

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