Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Byzance

Byzance

Titel: Byzance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michael Ennis
Vom Netzwerk:
j’ai l’intention de les séparer. Je dîne avec eux ce soir.
    — Tu es… scandaleuse. Mais si inventive ! J’envie ta liberté. Non pour des raisons de convenances… Que la sainte Théotokos me pardonne, jamais elles ne m’ont retenue. Mais pouvoir faire l’amour sans être asservie par l’amour… Comme je t’envie.
    — Aeifor ! cria Gleb. La quatrième cataracte. La plus meurtrière. Celle où les pélicans nichent sur les rochers.
    Le bruit d’Aeifor n’était pas celui d’une masse d’eau mais d’un animal vivant : un gémissement de monstre chargé de menaces, comme si l’on tirait du sommeil un léviathan. Le vacarme augmenta et les rameurs de Rus se regardèrent. En une matinée ils avaient déjà traversé toute une vie de terreur : les murs de pierre, dressés comme des géants au milieu du fleuve ; les tourbillons affolants, mortellement glacés ; des bateaux disparus derrière des voiles d’écume ; et les planches qui s’abattaient contre les grands rochers quand un des bateaux se disloquait. Des épaves horribles, bordages déchiquetés, ballots de la cargaison, et masses humaines molles, apparemment sans os, filaient dans le courant comme des fantômes. Une centaine de bateaux s’étaient déjà probablement perdus. Et maintenant…
    Aeifor apparut : un halo blanc au-dessus du Dniepr. Quelques hérons et des pélicans s’élevèrent de ses brumes, pareils à des flocons de neige, et volèrent vers les bateaux pour leur souhaiter la bienvenue. Très vite le courant prit de la vitesse, puis d’énormes rochers déchiquetés surgirent à tribord. Les pélicans se rassemblèrent. Des nuages d’écume montaient vers le ciel. Entre deux rochers dressés comme des cathédrales, s’ouvrait une vaste gueule béante, tourbillonnante.
    Le bateau parut heurter quelque chose de dur. Le gouvernail, à l’arrière, pivota soudain comme un bras gigantesque et projeta le timonier dans le fleuve. Haraldr s’élança vers la barre qui tournait en tous sens tandis que le bateau désemparé commençait à prendre de la gîte, près de chavirer. À l’instant où il parvint à saisir la barre, il sentit Gleb s’accrocher à son dos pour l’aider de tout son poids à retenir le bateau qui se cabrait. Enfin, la pale du gouvernail se figea et le bateau put lutter contre le courant, vers bâbord.
    Par-dessus son épaule, Haraldr vit un bateau disparaître dans le linceul blanc d’Aeifor. Pendant un instant la brume se déchira et la proue du bateau puis le bateau entier bondirent sur la lèvre du grand tourbillon ; des hommes sautèrent par-dessus bord. Les avirons abandonnés battaient comme les pattes d’une scolopendre affolée. Puis la proue piqua vers le bas et le bateau, simplement, disparut, avalé tout entier par la bête.
    La plage, sur la rive gauche, était sableuse avec quelques rochers ici et là. Les marins ramèrent pour sauver leur peau : la poigne de fer d’Aeifor ne diminuait pas comme le long des berges entourant les autres cataractes. Pour échouer les bateaux sur la plage, il leur faudrait lutter contre la succion du courant.
    Plus que cinquante coudées de la plage. Haraldr se prépara pour le choc. Un rameur lâcha son aviron et s’écroula sur son banc de nage. La hampe d’une flèche dépassait de son cou ; des ruisselets de sang suintaient de la blessure. Quelques secondes plus tard, le bateau frémit, les planches craquèrent et la proue se souleva. Haraldr fit passer devant lui le bouclier accroché dans son dos et sauta sur le sable ferme. Sur sa droite, le bateau de Hakon venait de faire la même manœuvre.
    La flèche siffla aux oreilles de Haraldr, et pendant un bref instant son murmure domina le tonnerre d’Aeifor. Les Rus formèrent leur mur de boucliers à la manière des hommes du Nord, s’accroupirent et calèrent leurs lances dans le sable.
    Un temps très long parut s’écouler. Haraldr craignait que seul le bruit de la cataracte ait dissimulé les cris des Petchenègues ; ils devaient être à quelques dizaines de coudées dans les fourrés, prêts à lancer la charge. Mais le mur de verdure au-delà du mur de boucliers demeura immobile. Le jarl Rognvald s’agenouilla aux côtés de Haraldr.
    — Je crois que nous les avons pris au dépourvu, cria-t-il. Ils n’ont pas pu se rassembler pour attaquer.
    Le jarl repéra l’archer petchenègue embusqué, isolé, et fit signe à l’un de ses hommes. L’archer rus tira deux flèches, puis

Weitere Kostenlose Bücher