Byzance
déjà.
Haraldr recula et leva les yeux.
— Majesté, je suis venu vous supplier humblement et respectueusement de m’accorder la liberté de partir. Je vous ai servi et j’ai servi votre empire avec autant de loyauté et de dévotion…
Zoé s’assit au bout de son lit et écarta les jambes de sorte que ses lèvres roses furent visibles dans le moindre détail.
— Vous me ferez l’amour avant de quitter Rome, murmura-t-elle d’une voix rauque. Ce sera votre droit de péage pour quitter la ville.
Haraldr se mit à rire.
— Majesté, je ne vois rien qui puisse me convenir davantage en ce moment. Je prendrais mon plaisir, je dirais à Maria ce que j’ai fait et pourquoi, et elle me pardonnerait. Mais cela détruirait les sentiments qu’elle ressent pour vous, et je n’envisage pas de lui faire subir cette souffrance. Je partirai donc sans acquitter ce droit.
Zoé fit ballotter ses jambes en un geste obscène.
— Vous ne partirez pas sans ma permission.
— Ces murailles peuvent empêcher un envahisseur d’entrer. Mais je ne crois pas qu’elles puissent garder à l’intérieur de la ville un simple mendiant. Je partirai avec ou sans votre bénédiction.
— Dans ce cas vous partirez sans Maria.
— Je laisserai Maria en décider.
Zoé se pencha en avant, comme pour le percer de ses yeux meurtriers.
— Vous ferez bien de réfléchir à deux fois avant de me défier, roi Haraldr. Le dernier roi qui m’a défiée en combat d’amour l’a payé très cher.
— Maria vous aime, je vous l’accorde. Mais je suis prêt à mettre ma vie en jeu sur son amour pour moi.
— Vous croyez la retenir par votre amour ? ricana Zoé. Je la tiens par un amour plus puissant, qu’elle ne trahira jamais.
Haraldr attendit que le rire de Zoé se calme.
— Je sais qu’elle est de votre sang, dit-il.
La tête de Zoé se releva brusquement et ses yeux semblèrent des vipères.
— Vous ne savez rien, lança-t-elle, les dents serrées. Vous avez ma permission de quitter Rome. Maria ne l’a pas.
Haraldr prit sa décision.
— Majesté, dit-il en croisant les bras sur sa poitrine, puis-je vous suggérer humblement d’ouvrir vos volets ? Je crois que l’air frais de la mer aurait un effet fort salutaire sur votre comportement.
* *
*
— L’idée de partir dans la nuit comme des malandrins ne me plaît pas, dit Ulfr. Après tout ce que nous avons fait pour Rome, nous devrions être escortés par une flotte de dromons. J’espère que votre plan pour passer par-dessus les chaînes du port réussira, ajouta-t-il en se tournant vers Haraldr.
— Ces coques sont solides, répondit Haraldr en flattant de la main l’une des trois galères amarrées au quai du quartier de Saint-Mammas. Je ferai répéter la manœuvre aux hommes demain soir.
— Comment embarquerons-nous nos affaires et nos provisions pendant la journée sans attirer les soupçons ?
— J’ai passé un marché avec Argyros quand je lui ai vendu mes domaines et mes privilèges fiscaux, expliqua Haraldr. Ce sont ses hommes qui chargeront les bateaux ; ils diront aux inspecteurs du préfet qu’il s’agit d’une des entreprises d’Argyros. Nous avons même préparé des faux papiers.
Les trois hommes du Nord parcoururent des yeux l’anneau de lumières autour de la Corne d’Or. Et les vastes constellations de Galata et de Constantinople.
— Je me demande si nous reverrons un jour ce ciel posé sur la terre, dit Ulfr à mi-voix.
— Nidaros nous paraîtra un minuscule cagibi, répondit Haraldr.
— Mais ce sera votre pays et votre peuple, observa Halldor.
— Ce sera aussi votre peuple. Ulfr et vous ne serez plus les compagnons d’armes d’un prince en fuite. Vous serez compagnons et conseillers du roi de Norvège.
— Je suis impatient de me battre pour la Norvège, répondit Halldor. Et je suis aussi impatient de retrouver une de ces grandes femmes du Nord, au chaume de paille, avec sur les cuisses des poils si pâles qu’ils semblent transparents. Des jambes de poulain. Le genre qui se plaît à vider une corne d’hydromel à vos côtés et vous tient éveillé toute la nuit.
Ulfr se tourna de nouveau vers les lumières de la ville et Haraldr prit Halldor à part.
— Halldor, murmura-t-il, est-ce que Maria vous plaît ?
Pour une fois, Halldor parut abasourdi.
— Je n’ai nullement l’intention de vous faire cocu, si c’est ce que vous voulez dire. Mais… je pourrais vénérer cette
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