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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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celle qui permettrait de dépasser les limites politiques de la majorité. Ce faisant, il repousse Chaban vers la droite et le limite à la seule UDR.

    Georges Dayan me raconte de son côté que Mitterrand a été très affecté par la mort brutale de Pompidou. La séance du groupe socialiste, mercredi 3 au matin, a été présidée par Gaston Defferre. Après quelques échanges entre eux (« plus ou moins bienvenus », me dit Dayan), Mitterrand est intervenu pour demander aux parlementaires socialistes d’attendre : « Nous nous retrouverons jeudi pour l’éloge funèbre. Je vous demande de ne pas parler, leur a-t-il dit, de ne rien faire avant samedi. Vous allez rentrer dans vos circonscriptions et vous associer aux manifestations de recueillement. Nous reprendrons contact dès lundi matin. »

    Pierre Mauroy, Gaston Defferre et son inséparable Émile Loo, Louis Mermaz et Georges Dayan se retrouvent pour déjeuner rue de Bièvre. À 16 heures, réunion du secrétariat du PS jusqu’à 18 heures. Bureau exécutif de 18 à 21 heures à la cité Malesherbes. La décision est prise de convoquer un congrès extraordinaire pour le lundi après-midi, précédé d’un comité directeur lundi matin.
    Dayan m’assure que Mitterrand n’a pas contacté le Parti communiste : seul Gérard Jacquet a reçu Paul Laurent.
    À l’unanimité encore, le bureau du PS redit sa fidélité à l’union de la gauche.
    Mitterrand annonce la volonté du « premier secrétaire, candidat à la présidence de la République », d’élaborer une charte en quelques options fondamentales pour un programme de gouvernement.
    « Il faut que Mitterrand soit à la fois Léon Blum et Antoine Pinay ! » résume Georges Dayan, qui n’a pas l’air de trouver cela facile.
    En attendant, Mitterrand partira demain, après l’éloge funèbre, pour Château-Chinon.
    5 avril
    Ce jeudi, donc, éloge funèbre de Georges Pompidou à la Chambre. Pour la première fois, me semble-t-il, Messmer passe la rampe. Il est ému, marqué : « Nous devons continuer, et nous continuerons... » Pendant qu’il parle tombe, à 14 h 11, la déclaration de candidature de Jacques Chaban-Delmas. Un peu trop tôt : presque indécent, je trouve.

    Tout de suite après l’hommage de Pierre Messmer (c’est Claude Estier qui me le raconte, avant que Roland Leroy ne m’appelle au téléphone à 22 heures), Mitterrand rencontre Georges Marchais dans une des salles de l’Assemblée réservée aux parlementaires, à l’abri des regards des journalistes, qui, massés à quelques mètres dans la salle des Quatre-Colonnes, ne les voient pas. Georges Marchais remet à François Mitterrand une lettre du comité central du PC : dans leur langage, les communistes y disent que le premier secrétaire du PS « peut être, pour les communistes, le candidat résolu à créer les conditions de l’application du programme commun de gouvernement ».
    « Nous n’avons qu’une exigence, précise Marchais : la référence au programme commun.
    – Pas de problème pour cela, répond Mitterrand. Pour le reste, je ne veux pas négocier, mais garder les mains libres. »
    Jusqu’à présent, il n’y avait pas eu de discussion entre socialistes et communistes sur une candidature unique de la gauche, puisque les uns et les autres pensaient avoir tout leur temps pour aborder la question. Voilà qui est fait.
    En quelques phrases, les deux hommes se mettent d’accord sur la charte que va proposer Mitterrand : un texte directement tiré du programme commun.
    Marchais presse Mitterrand de parler tout de suite. Mitterrand refuse de se déclarer avant lundi.
    À noter que la mort de Pompidou a pris aussi les communistes de court. Georges Marchais a appris la nouvelle alors qu’il était chez lui, dans son pavillon de Champigny ; Roland Leroy était sur le point de partir en vacances dans les Alpes-Maritimes, à Pierrefeu.
    6 avril
    Messe à Notre-Dame de Paris. Le premier à entrer dans la nef est Baudouin de Belgique, suivi par Henrik de Danemark, l’air un peu voyou mais très beau. Les trois derniers sont Podgorny, Nixon, dontla haute silhouette domine celle des autres, et la reine Juliana de Hollande.
    C’est le cardinal Marty qui prononce quelques mots. Puis il lit l’Évangile qui s’achève par : « Je suis la résurrection et la vie. » S’élève enfin un cantique dont je note les paroles :

    Éclaire de Ta lumière
    les dirigeants de tous

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