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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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trois premiers mois n’est pas enthousiasmant. Cela devait être le New Deal, tout aurait dû être en chantier. Le bilan est mince... »
    10 septembre
    Gadget ou attirance de la France profonde ? Giscard a décidé la tenue, pour la première fois, du Conseil des ministres hebdomadaire à Lyon.
    Curieuse atmosphère. Ville glaciale, sans animosité mais sans curiosité. Chirac et Ponia, dans la ville, la veille au soir, se « marquant » l’unl’autre comme au rugby, arpentant les rues à minuit et demi, au milieu de cent journalistes et badauds rigolards.
    Qu’en pensent les Lyonnais ? Pour l’instant, on n’en sait rien.

    À l’aéroport, au moment du départ de Paris, quelque chose d’assez drôle : dans l’avion – un Mercure – Jacques Chirac et le président d’Air France, Vergnaud, attendent Poniatowski. Celui-ci n’arrive pas. Tôt le matin, il a fait dire qu’il serait dans l’avion de Giscard. Il a rectifié, sans doute sur ordre de Matignon, pour signaler qu’il prendrait, en même temps que Chirac, l’avion régulier d’Air Inter.
    Chirac attend un moment, puis demande qu’on prévienne Ponia que l’avion a dû partir. Mais, lorsque l’avion de Giscard atterrit à Lyon-Bron, quelques instants après l’avion de ligne emprunté par Chirac, Ponia est le premier à en descendre !
    11 septembre
    Giscard est arrivé hier à la préfecture. Il demande au préfet, Pierre Doueil 33  : « C’est bien ici qu’est mort Herriot ?
    – Oui, lui répond Doueil.
    – Alors j’irai lui rendre un hommage. »
    Il connaît bien son histoire politique : pour avoir omis de parler – ou n’avoir pas voulu parler –, à Lyon, d’Édouard Herriot, Georges Pompidou s’était aliéné une partie des élus du Rhône.
    Pendant le dîner à la préfecture, le président, nous dit Doueil, s’est montré extraordinairement courtois. Il précise : « Même avec ma femme qu’il ne reverra jamais, du moins je l’espère ! »
    Il fait l’innocent, ou peut-être l’est-il : « Entre Chirac et Ponia, me dit-il, je ne sais pas à quel propos, il y a un formidable agacement. Et quelque chose qui ressemble à de l’animosité. »
    Quelle imprudence pour un préfet !

    C’est donc après le dîner officiel que les journalistes ont retrouvé Ponia et Chirac. Vers minuit vingt, après quelques verres de beaujolais, Chirac étouffe un bâillement. Ponia est en pleine forme aprèscinq jours en Pologne qui ont épuisé tous les photographes qui l’accompagnaient.
    Rentrés à la préfecture à une heure moins le quart, serrements de mains. Une Lyonnaise, attendrie, dit à Chirac : « Reposez-vous, monsieur le Premier ministre, vous ne dormez pas assez ! »
    C’est Gouyou-Beauchamps qui est envoyé nous convaincre que la tenue du Conseil des ministres ici n’est pas une lubie du président. « Pourquoi ici ? Pas pour régler les problèmes politiques régionaux, mais pour contribuer à faire évoluer l’état d’esprit des Français. C’est une attitude très pédagogique, volontairement pédagogique de la part du chef de l’État. »
    Nous rentrons à Paris le soir même.
    12 septembre
    Je rencontre pour la première fois Jean-Pierre Fourcade, ministre de l’Économie et des Finances. Il me raconte sa carrière, comment il a travaillé avec Giscard de 1959 à 1965. Il l’a retrouvé aux Finances en 1969, mais Pompidou a demandé son départ à la suite d’une divergence sur la politique vis-à-vis du petit commerce. « Giscard m’avait donné raison, mais il a accepté mon départ. Je suis allé dans le privé. »
    C’est Jacques Baumel qui est venu lui demander de faire campagne à Saint-Cloud. Ça a marché. Il y est maire depuis 1971. Mais il est toujours resté fidèle à Giscard.
    Aujourd’hui, aux Finances, il craint que la conjoncture internationale ne se soit modifiée avec le nouveau relèvement du prix du pétrole, qui aggrave le déséquilibre de la balance commerciale.
    18 septembre
    Françoise Giroud m’a raconté son entrevue avec Chirac. Détendu, col ouvert, il la reçoit vers 19 heures, un soir de la fin août ou du début septembre. Il lui dit avec le sourire :
    « Franchement, les bonnes femmes, moi, je trouve qu’elles doivent être aux pieds de leur mari, ne pas travailler, ne pas avoir d’idées personnelles. Mais bon : le président de la République n’est pas de cet avis, vous non plus. Rien à faire ! Bon, il faut y aller.

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