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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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le prochain septennat.
    – Mais jusqu’à quand Giscard supportera cette position dans laquelle il s’est mis vis-à-vis de Chirac ?
    – Oh, Chirac est un habile homme. On peut lui faire confiance pour habiller les choses. De toute façon, on s’en fout : Giscard n’a plus le choix ! »
    Olivier Guichard, que je rencontre en sortant de mon réduit aux rideaux rouges, me tient un autre langage. Giscard lui a dit la semaine dernière : « Je n’avais pas confié les affaires politiques à Chirac pour ne pas faire comme mes prédécesseurs. Puisqu’il faut aujourd’hui changer quelque chose, allons-y, faisons cela ! »
    Mais Olivier Guichard est formel : le président ne s’attendait pas à ce que cela apparaisse, à l’UDR comme chez les RI, comme une véritable passation de pouvoir. « Comme Giscard est un homme qui réagit par à-coups, tranche-t-il en homme à qui on ne la fait pas, il va y avoir un à-coup en sens contraire !
    « Le problème, maintenant, n’est pas de donner des investitures, c’est de diriger le gouvernement. Et, pour le moment, Chirac ne dirige rien ! »
    Je rentre en séance. De réformes, pas un mot ou presque. À Nice, aux journées parlementaires RI, j’ai noté qu’il n’en a pas davantage été question. Moralité : la majorité giscardienne n’inscrit plus la réforme à son ordre du jour. Pierre Mazeaud est un orfèvre lorsque, abordant rapidement la réforme sur les plus-values, il dit ingénument : « Cette réforme peut aller à une allure de croisière ou à une vitesse de pointe. Pour ma part, je préférerais qu’elle aille lentement et profondément. »
    On ne peut mieux dire les choses.
    Oui, c’est le tournant du giscardisme. Le seul problème est celui-ci : jusqu’à quand Giscard supportera-t-il que Chirac soit à la barre ?
    À ce point de mes réflexions, je rencontre au bistrot du casino Hector Rolland 20 , connu pour son franc-parler, entouré d’un petit cénacle de parlementaires.
    « Je suis allé très profondément, est-il en train de dire, au fond du corps électoral... »
    Ses amis l’interrompent en s’esclaffant : « Non, Hector, c’est au fond des yeux 21  ! »
    Il reprend : « Je l’ai écouté. Il m’a dit que la politique menée ne lui convenait pas, qu’il était nécessaire de changer de cap. Après dix-huit mois de plaintes continuelles, je me suis aperçu de la leçon qui nous a été donnée le 7 et le 14 mars. Des erreurs ont été commises. Libre à ceux qui nous dirigent au stade le plus élevé de ne pas tenir compte de l’avertissement qui leur a été donné. Pour ma part, j’ai retenu que la réaction de notre électorat allait à l’encontre de nos projets de loi. Cela n’a pas été Waterloo, mais un sévère revers, des vestes, même, pour beaucoup d’entre nous. Ces projets de lois [qu’iln’appelle pas, volontairement, des réformes], l’écho du monde rural, qui descend des montagnes, qui monte de nos vallées, me dit que, si nous les votons, ce n’est plus la peine que nous pensions à la victoire dans douze ou dans vingt-quatre mois. Tout le monde ici le pense, et personne ne le dit. Moi, je le dis : ces projets, je ne les voterai pas. Ce n’est pas pour moi, c’est pour elles, c’est pour eux ! »
    Applaudissements et rires parmi la petite troupe qui l’entoure.
    Scène de congrès...
    Jacques Chirac, que je croise ensuite, me révèle brièvement les grandes lignes de son action politique : il recevra, me dit-il, chaque semaine les ministres politiques et les secrétaires généraux des trois partis de la majorité. Les ministres devront cordonner leurs prises de parole et demander l’autorisation avant de s’exprimer : Chirac veut savoir qui parle, ce qui va être dit et le nombre d’interventions prévues sur tel ou tel sujet.
    « Je n’ai reçu qu’une délégation, me dit-il, mais cela me permet de parler à tous avec davantage d’autorité et au nom du président de la République. Ce n’est pas seulement une nuance. »
    Nous reparlons de l’opposition : « Dussé-je être qualifié de primaire, me dit-il, ce qui ne me touche plus depuis le temps qu’on le dit, je répondrai à l’opposition quand je suis agressé. »
    Dernière question sur les réformes : « Il y a une synthèse à faire entre la volonté de réforme et l’immobilisme congénital. Je viendrai personnellement défendre le texte gouvernemental sur la réforme de

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