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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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l’efficacité de la tactique choisie par Giscard ?
    Pourtant, au-delà de ce projet de loi, c’est bien du sort de Chirac qu’il s’agit. Si le projet est voté et bien voté, pas de problème, Chirac aura montré qu’il tient ses troupes, même lorsqu’il n’est pas convaincu. Si le projet est mal voté, ce sera parce qu’une soixantaine de députés UDR auront lâché Chirac. Celui-ci aura donc fait la preuve de son inefficacité. S’il a perdu soixante députés, à quoi bon le garder ?
    On sent bien, d’ailleurs, que cette histoire de plus-values est le signe d’autre chose. Si Giscard exerçait une autorité réelle sur les parlementaires, cela ne se passerait pas comme cela, il recueillerait beaucoup plus de discipline. En fait, il s’agit d’une vraie crise de confiance avant d’être une crise de la réforme en France.
    Cela étant, Jean-Jacques Servan-Schreiber l’a très bien démontré : jamais une majorité modérée n’a voté un projet d’imposition sur le revenu, encore moins sur les plus-values, les successions ou le capital ! Bon argument, d’ailleurs, pour démontrer à l’UDR que son opposition à ce projet de loi est frappée au coin du conservatisme.
    Mais Giscard sait bien que la majorité n’est pas tout entière réformatrice. S’il voulait une Assemblée à sa botte, il n’avait qu’à proposer, dès son élection à la présidence, des élections législatives. Il ne l’a pas fait. Pourquoi se plaindrait-il ?
    Ce projet militaire, j’y reviens une fois de plus, quelle maladresse ! Et au moment où il faut discuter l’accord de l’UDR sur la taxation des plus-values ! On ne m’ôtera pas de l’idée que la conjonction desdeux est volontaire, comme pour forcer l’UDR à se soumettre ou à se démettre.
    2 juin (suite)
    Suite du débat sur les plus-values. Pour commencer, une salve de Claude Labbé sur le mode : « Vous prenez un filet à grosses mailles, mais, comme il ne descend pas assez profondément dans l’eau, les gros poissons passent au-dessous. »
    Personne à l’UDR ne dit publiquement la vérité. Labbé pas plus que les autres. Ce qui est vrai, c’est qu’ils entendent préserver leur électorat, hostile, petits et gros, à toute loi de taxation des plus-values. Toujours la crainte exprimée périodiquement par Pierre Juillet : « Inutile de perdre nos électeurs pour espérer gagner ceux de gauche, que, de toute façon, nous ne gagnerons pas ! »
    3 juin
    Pauvre Maurice Faure ! Il me dit hier, navré : « Au fond, je suis complètement d’accord avec ce que disait Jean-Jacques Servan-Schreiber à la tribune. C’est même un de mes thèmes favoris ; les sociétés occidentales ont tout, mais elles ont désormais besoin d’autre chose : de justice pour tous, essentiellement. Mais il est seul, complètement seul ! »
    Il ajoute, presque avec sympathie : « Il faut dire qu’il l’a cherché ! »
    Il déverse son inquiétude vis-à-vis de la stratégie de la gauche : « Vous allez voir que la gauche va se débrouiller pour se faire battre en 1978 ! La dénonciation de l’ENA 28 par Claude Estier est imbécile ! Il ne fallait pas toucher à l’ENA de cette façon, d’autant moins que 30 % de l’actuelle promotion au moins est favorable aux socialistes ! C’est comme le Comité de défense créé par François Mitterrand : c’est une concession aux communistes. »
    Il est si mal à l’aise, ainsi assis entre deux chaises, qu’il se demande s’il va se représenter aux élections législatives de 1978.
    Pendant ce temps, le feuilleton « plus-values » continue. J’en passe les épisodes journaliers, pluriquotidiens, même. La seule chose intéressante, à ce stade, c’est de savoir si les réformateurs de Giscard sontplus nombreux au Parlement que les UDR. Et si Giscard a inventé ce débat pour se débarrasser de Chirac, ou pas. Tout de même, moins de trois mois après l’avoir confirmé comme leader de la majorité tout entière, on a peine à croire que Giscard ait déjà l’intention de se dédire.
    Mais c’est bien de cela pourtant qu’il s’agit : Serge Maffert, que je rencontre à Matignon dans l’après-midi, ne me cache pas qu’il y a eu hier (mercredi) un déjeuner de la majorité absolument horrible où Roger Chinaud a dit : « Le débat sur les plus-values en est l’illustration : c’est l’échec de la coordination, il n’y a donc plus de coordonnateur ! »
    Claude

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